Un roman (bio)graphique sur Romy Schneider, cela devait arriver tôt ou tard, et notamment dans la collection 9 1/2 de l’éditeur, dédiée au cinéma… Le choix des auteurs s’est porté sur ses débuts, y compris son enfance — vite évoquée — avec la guerre en fond, et son entrée timide dans le cinéma, jusqu’aux premiers rôles. On croisera naturellement Alain Delon, presqu’inconnu alors que Romy est déjà célèbre après « Sissi » : la relation amoureuse et professionnelle avec le jeune acteur français est fondatrice, essentielle pour les deux. Un album à la mise en images sensible, juste, sans effets appuyés, mais aux couleurs très choisies selon les moments narrés. Un trait doux et bienveillant : connaissant sa fin tragique, ce n’est que justice.
Lire la suite...De Brest en Amazone, avec Briac !
Quand on ouvre un album de Briac, on est d’emblée subjugué par l’originalité du dessin, à nul autre pareil. Alors que l’auteur avait jusque-là déployé ses talents pour représenter Brest et la Bretagne – on y reviendra -, Briac nous délecte en nous proposant un voyage outre-Atlantique : dans les pas du géographe Charles-Marie de La Condamine, parti de Brest en 1735 pour mesurer la Terre…
Mesurer la Terre : La mission est ambitieuse. La Terre est-elle ronde, aplatie aux pôles ou, au contraire, allongée à ses extrémités ? Le Portefaix est en route pour le déterminer. Il compte à son bord des scientifiques spécialisés dans la médecine, l’astronomie, les mathématiques, la botanique… Très vite, les caractères, les passions et les méthodes des uns et des autres s’opposent et la mission vire au vinaigre. Reste pourtant à calculer « la longueur et l’amplitude d’un arc de méridien », d’où le titre.
Après La Dominique, c’est Carthagène, puis Porto Bello, Panama et le Pérou, enfin. Tout le monde s’observe, les indigènes comme ces marins poudrés et en habits de cour. Très vite, La Condamine constate que « l’aimable compagnie s’est disloquée ». Au-dessus de ce petit monde qui s’agite, les oiseaux commentent et se moquent de leurs « gesticulations pathétiques », La Condamine ne détestant pas d’ailleurs s’entretenir avec eux.
Au-delà du périple exceptionnel qui mènera La Condamine à également explorer le bassin amazonien, il faut avant tout se laisser porter par la réalisation graphique, ces dessins qui semblent traités sur la trame d’une toile, ces dégradés de couleurs qui donnent tant de matière et de puissance à ces pages et ces personnages pittoresques. Certaines planches invitent à la contemplation, d’autres à l’admiration, rien de moins. Le voyage d’exploration est incontestablement haut en couleurs et un dossier final replace les contours, documents à l’appuis, du scénario parfaitement documenté d’Arnaud Le Gouëfflec ; lequel a pourtant laissé libre cours à son imagination pour certaines séquences plus intimistes.
Rappelons qu’en 2008, Briac frappait déjà fort avec « Armen 43 », réédité en 2020 avec de nouvelles planches. Dans la Bretagne de la Seconde Guerre mondiale, les gardiens de phare sont obligés de cohabiter avec les marins allemands chargés de leur surveillance. Au phare d’Armen, au large de l’île de Sein, dans l’isolement et la tempête, le huis-clos inquiétant est parfaitement rendu par les couleurs sombres et les visages peu amènes.
Plus récemment, en 2014, avec « La Nuit Mac Orlan », déjà sur scénario de Le Gouëfflec, Briac rendait hommage à l’écrivain par le biais d’un marin se rendant à Brest dans l’espoir de trouver un manuscrit inédit du roman « Le Quai des brumes » et de pouvoir enfin boucler sa thèse. Alors qu’un bouquiniste est sur le point de lui montrer le précieux ouvrage, il se fait assommer et se réveille chez un inconnu, sans vêtements ni papiers. C’est le début d’une cavale au cœur de la nuit brestoise et dans les pas et les arcanes de l’œuvre de Pierre Mac Orlan, le tout baignant dans des atmosphères troublantes ou des visions fantasmatiques.
Dans « Quitter Brest », l’année suivante, nous déambulions dans la ville avec un certain Henri Fautras redécouvrant la ville qu’il n’a pas vue depuis l’enterrement de ses grands-parents. On est en 1966 et il se souvient de Lydia Oswald, une espionne à la solde des Allemands. La bande dessinée était suivie de deux nouvelles policières illustrées sur la Brest des années 1960-1970 et son Arsenal.
Briac, on le voit, construit peu à peu une œuvre originale et puissante qu’il est indispensable de découvrir, ne serait-ce que pour voyager de Brest à Quito…
Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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« Méridien » par Briac et Arnaud Le Gouëfflec
Éditions Locus Solus (29 €) – EAN : 97782368333624
Parution 15 avril 2022