Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Love » ou l’amour des animaux pour petits et grands…
Sous le titre de « Love », aussi généraliste qu’énigmatique, se cache une série étonnante, fascinante et pour tout dire sauvage, dont Vents d’Ouest rééditent les quatre premiers titres et proposent une nouveauté. Voilà désormais cinq tomes indépendants qui font voyager dans le temps (avec les dinosaures) et dans l’espace (pour les quatre autres tomes). Important, elle est clairement tous publics.
Fréderic Brrémaud et Federico Bertolucci ont entrepris d’évoquer le monde animal via des albums totalement muets. Sans un mot, ni une onomatopée, les scénarios proposent de subtiles et extraordinaires promenades dans les pas, dans les pattes, d’animaux mythiques (les lions, les tigres ou les dinosaures), courants avec le renard ou moins courant avec le molosse du dernier titre. Précision importante, ces volumes comportent tous un cahier graphique final indiquant en latin le nom des animaux rencontrés pendant la lecture.
Bertolucci, le dessinateur, déploie une virtuosité graphique et chromatique qui laisse bouche bée. Sans un mot, l’émotion visuelle est partout. Nous sommes les spectateurs ébahis par ces bêtes longuement mises en scène autant que par les paysages fabuleux qui les accueillent. Ce n’est évidemment pas la première fois qu’on suit en images (grâce à celles des documentaires, notamment) la vie quotidienne de la faune, mais à la différence près qu’ici, pour chaque case, le cadrage est différent, étudié, fonctionnel. Il fallait une sacrée audace pour se lancer dans pareille aventure !
Le dernier tome, « Le Molosse », se situe au cœur de la nature australienne, avec pour principaux protagonistes kangourous, opossums, koalas, ornithorynques… Tout ce petit monde s’agite alors qu’un chasseur, piqué par un serpent, agonise. Son chien, un molosse, tente de prévenir sa famille. Il va devoir affronter seul bien des dangers que le lecteur suit sans en perdre une miette, fouillant les décors avec délectation et observant attentivement cette faune pittoresque qui vit sa vie, sauvage et cruelle quelquefois.
Dans un monde qu’on devine sans effort regorgeant de dangers, un petit bambiraptor trouve refuge sous un énorme isisaurus. Sur leur chemin, ils croisent des dinosaures en tous genres : tricératops, ptérosaures, gallimimus et, aussi, le tyrannosaure : le plus dangereux de tous. Autant dire que, là encore, visuellement le spectacle de leurs combats titanesques est prodigieux.
Dans l’épisode qui se situe au Kilimandjaro, en Afrique, un jeune lion subit l’exil au cÅ“ur des vastes étendues de la savane. L’air mauvais, il poursuit sa route, en proie à l’envie qui le ronge de retrouver sa place dans la meute qu’il a été contraint de quitter et de défier son père, le mâle dominant. Dans cette savane aussi attirante qu’impressionnante, sèche ou pluvieuse, le jeune roi lion doit sauver la face et trouver sa place… C’est un peu le problème également du tigre d’Asie. Il est en chasse, mais ce n’est vraiment pas son jour : les plus faibles lui glissent entre les pattes alors que les plus forts lui infligent de cuisants outrages.
Enfin, avec le volume consacré au renard, les auteurs mettent en scène une petite île du Grand Nord en proie à une éruption volcanique. C’est la panique : les animaux gagnent la partie basse de l’île, fuyant vers la mer. Pourtant l’un d’eux, un renard, remonte à contresens, cherchant à tout prix à sauver son petit resté en haut.
On le voit, les animaux d’Asie, d’Afrique, d’Australie ou d’ailleurs combattent et souffrent autant qu’ils s’imposent ou en imposent dans une série indispensable pour qui aiment le monde animalier et pour qui aiment ce monde dessiné avec autant de talent. « Love », c’est un amour de série !
Didier QUELLA-GUYOTÂ ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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 « Love T5 : Le Molosse » par Federico Bertolucci et Frédéric Brrémaud
Vents d’Ouest (14, 95 €) – EAN : 9782749309132
Autres titres : « Le Dinosaure, « Le Renard », « Le Tigre », « Le Lion ».
Savez vous pourquoi ces livres, autrefois édités chez Ankama, sont à présent passés chez Vents d’Ouest?