Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Yslaire : premier « Cahier Baudelaire » !
Le XIXe siècle a toujours fasciné Bernard Hislaire, devenu Yslaire pour ses lecteurs à l’occasion de la création de « Sambre » en 1985. Yslaire, qui est aujourd’hui une référence dans le monde de la bande dessinée, n’a rien perdu de son amour pour le romantisme. Quel meilleur compagnon d’inspiration que Charles Baudelaire (et son romantisme noir) aurait-il pu choisir d’autre pour évoquer pour cette période ?
C’est à travers Jeanne Duval, la maîtresse (rencontrée en 1842) que le poète a le plus aimée, que Bernard Yslaire nous propose de le découvrir.
Surnommée Vénus noire, supposée originaire de Saint-Domingue, quarteronne ou mulâtresse, on sait peu de choses d’elle.
D’autant plus que la correspondance brûlante qu’elle entretenait avec l’auteur des « Fleurs du mal » a été détruite par sa mère à sa mort.
Dandy, flambeur et alcoolique, sa poésie évoque la luxure et la volonté de choquer.
Par l’image, souvent crue, Yslaire fait revivre ce personnage sulfureux au fil d’un récit flamboyant où se côtoient le sexe, la mort, la passion… Cet ouvrage ambitieux, sans doute le plus érotique jamais publié par la collection Aire libre, est annoncé pour 2021, à l’occasion du bicentenaire de la mort de Charles Baudelaire.
Après « Théodore Poussin » de Franck Le Gall et « Tif et Tondu » des frères Blutch…, cette œuvre est proposée en avant-première dans la superbe collection Cahiers des éditions Dupuis, maquettée par Philippe Ghielmetti.
Il ne s’agit pas de l’habituelle présentation en noir et blanc des pages originales, mais de la reproduction des fac-similés des esquisses indispensables à l’auteur, réalisées avant le passage à l’encre.
Parfois poussées, parfois simplement ébauchées, ces images invitent à suivre une étape importante dans la création de l’artiste avant l’encrage et la mise en couleurs.
On peut néanmoins suivre le récit grâce aux textes intégrés au fil de ces dessins, dont l’état brut peut surprendre le lecteur non initié. La présentation est signée Lucie Servin, historienne, journaliste à L’Humanité et aux Cahiers de la BD.Avant d’avoir le plaisir de découvrir « La Vénus noire » dans sa version définitive en 2021 — aïe, aïe, pas facile d’y croire lorsqu’on connaît le souci de perfection d’Yslaire —, trois « Cahiers Baudelaire » nous seront proposés.
Bien que destiné à un lectorat doublement averti (esquisses et sexe), cet album de 32 pages sous jaquette à rabats de format 23,7 x 31 cm devrait être rapidement épuisé.
Son tirage limité à 2 500 exemplaires, le soin porté à sa réalisation, et son prix modeste en font un objet de collection qui risque d’être rapidement recherché.
Cette belle initiative de la part des éditions Dupuis est indispensable aux admirateurs de l’œuvre d’Yslaire.
Avec ce nouveau projet ambitieux, ceux qui attendent la parution du neuvième et dernier épisode de « Sambre » peuvent s’armer de patience.
 « Cahiers Baudelaire » T1 par Yslaire
Éditions Dupuis (15,95 €) — EAN : 9 791 0347 5266 9