« Charlotte Impératrice T1 : la Princesse et l’archiduc » par Matthieu Bonhomme et Fabien Nury

Annoncé comme l’événement de la rentrée BD (1), le premier volume de cette fresque historique enluminée par le flamboyant dessin semi-réaliste de Matthieu Bonhomme et habilement découpée, dialoguée, par Fabien Nury – il y évite, notamment, toutes les facilités didactiques qui auraient pu faire perdre l’implication du lecteur dans le récit ou son empathie envers les personnages — tient toutes ses promesses !

Le scénariste d’« Il était une fois en France », de « Katanga » ou de « La Mort de Staline » a découvert le mélodramatique destin de Charlotte de Belgique, fille du roi Léopold 1er, en se documentant sur le court règne mexicain de Maximilien d’Autriche (prince cadet de la maison des Habsbourg devenu une sorte d’empereur d’opérette) : il y a trouvé matière à exploiter son goût pour les récits cruels et violents et sa fascination pour les univers fastueux et décadents.

Grâce à son écriture très cinématographique (dans les différentes interviews accordées jusque-là, Matthieu Bonhomme parle des influences – pourtant diamétralement opposées — de réalisateurs comme Luchino Visconti ou Sam Peckinpah que son complice narrateur a d’ailleurs égrainées à bon escient), Fabien Nury joue à merveille avec le glamour et l’inévitable descente aux enfers de ce couple mal accordé : ne négligeant, à aucun moment, de donner la sensibilité et l‘épaisseur nécessaires à ses différents protagonistes…

L’idylle de cette princesse aussi enthousiaste que naïve va vite tourner au cauchemar au contact d’un homme jaloux du pouvoir de son aîné (l’empereur d’Autriche et l’époux de la fameuse Sissi dont les auteurs de cette superbe bande dessinée nous donnent une représentation bien éloignée de la version des films interprétés par Romy Schneider), qui la néglige et qui va perdre pied au fur et à mesure de ces décisions intempestives. Charlotte se retrouve alors prisonnière d’une résidence faite sur mesure, tel un oiseau dans une cage, et sera prête à tout, même à entraîner un pays entier dans une chute inéluctable, pour vaincre sa solitude et son ennui…

Le dessinateur (mais aussi auteur complet) du « Marquis d’Anaon », d’« Esteban » ou de « L’Homme qui tua Lucky Luke » s’en donne, quant à lui, à cœur joie, changeant régulièrement d’angle de mise en scène et peaufinant tous les détails : les costumes et les coiffures d’époque, ou encore les aménagements d’intérieur. On lui doit, aussi, de somptueuses doubles pages où l’on devine, à travers les regards des acteurs de papier, que le luxe, l’opulence ou la démesure vont très vite laisser place à la dureté, l’aridité et la violence d’une saga épique qui se poursuivra dans le Nouveau Monde, dès le prochain tome…

Gilles RATIER

Couverture de la très belle édition en noir et blanc.

(1) Voir : Avant première : « Charlotte Impératrice » par Mathieu Bonhomme et Fabien Nury….

« Charlotte Impératrice T1 : la Princesse et l’archiduc » par Matthieu Bonhomme et Fabien Nury

Éditions Dargaud (16,95 €) — ISBN 9782205077834

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