Apparue pour la première fois dans le mensuel Tchô ! en 2003, Lou est devenue un best-seller de l’édition, avec plus de trois millions d’albums vendus, une série d’animation, un long métrage, des traductions dans le monde entier… Un tel succès méritait bien cet ouvrage anniversaire, qui nous propose — en plus de 300 pages — de revenir sur l’histoire de l’héroïne qui a grandi avec ses lecteurs. Tout en ouvrant généreusement ses carnets de croquis, Julien Neel évoque — au cours d’un long entretien — son propre destin, lié depuis 20 ans à celui de la petite fille blonde devenue grande.
Lire la suite...« Rahan : Le Collier de griffes » par André Chéret et Roger Lécureux : analyse de planche
Mois de juillet et parutions moins nombreuses obligent, la rubrique « L’Art de… » en profite pour revenir sur quelques grands classiques via des analyses de planches. Débutons aujourd’hui en compagnie du légendaire « Rahan », créé par Lécureux et Chéret le 3 mars 1969 dans le premier numéro de Pif gadget. Situées dans une Préhistoire romanesque, les aventures du fils des âges farouches se distinguent autant par leur dénonciation des obscurantismes que par un exceptionnel dynamisme graphique…
Avec sa chevelure « couleur de feu », ses yeux bleus, son physique athlétique et séduisant, son collier à cinq griffes (symboles des valeurs prônées par son père Crao : générosité, courage, ténacité, loyauté et sagesse) et son coutelas en ivoire, le héros ne passe pas vraiment inaperçu ! Longtemps solitaire (les tabous sexuels et l’érotisme latent des planches étant parfois paradoxaux…), migrant de clan en clan afin de faire partager à « ceux qui marchent debout » ses connaissances et son esprit de tolérance, Rahan est à lui seul une incarnation ancienne de Mai 68. Très vite populaire, la série connu un incroyable succès en raison de son passage dans Pif gadget (hebdomadaire tiré à 500 000 exemplaires) et de points d’orgue tels la mort annoncée de Rahan en septembre 1977, laquelle angoissera plus d’un millions de jeunes lecteurs. Heureusement simplement drogué et ressuscité au numéro suivant, le personnage gagnera en finesse psychologique au fur et à mesure des années. Scénarisée par Roger Lécureux (disparu fin décembre 1999) puis par Jean-François Lécureux, la série (riche de 3 500 planches et 170 épisodes !) aura connu diverses intégrales jusqu’à nos jours : 42 numéros mensuels entre 1984 et 1987 (reprenant les récits des années 1969-1983), « Tout Rahan » chez Soleil (28 tomes et trois hors-séries entre 1992 et 2011), une intégrale anniversaire en noir & blanc (Soleil, 10 tomes et un hors-série entre 2009 et 2014) et la plus récente collection publiée chez Altaya (de 2012 à 2013, 67 albums présentant les récits des années 1969-2010 dans l’ordre chronologique). Notons par ailleurs l’existence aux éditions Lécureux entre 2000 et 2010 de nouvelles histoires demeurées longtemps exclusives, puis finalement reprises par l’intégrale Altaya.
En replaçant logiquement et chronologiquement « L’Enfance de Rahan » avant « Le Secret du soleil », la première aventure publiée en 1969, « Le Collier de griffes » – dont nous étudions aujourd’hui une page – constitue le 17e récit imaginé par les auteurs. Alors qu’il cherche à nourrir deux enfants perdus, Rahan est surpris par des chasseurs qui lui interdisent de traquer le gibier sur leur territoire car il n’est qu’un « homme sans-cheveux-au-menton » ! Avant-dernière des 20 pages de cette aventure, la planche choisie illustre la mécanique traditionnelle des scénarios de Lécureux : replié sur lui-même, Zaroak, le chef cruel et orgueilleux du clan des sources, subit l’humiliation suprême (barbe et cheveux coupés ; case 1) tandis que Rahan, plus agile que jamais, s’envole vers d’autres lieux après avoir récupéré son précieux collier. Case 3, la gestuelle super-héroïque réempruntée à Tarzan et l’effet de hors-case permettent à l’œil du lecteur de suivre une ligne oblique allant jusqu’à la case 5, espace échappatoire de la planche. Cette course effrénée, en contraste total avec l’immobilité et l’enfermement moral qui pèsent désormais sur le méchant de l’histoire, permettra à l’évidence de filer vers la planche de clôture et sa sage chute moraliste. Au final, l’esprit communiste de la rédaction de Vaillant-Pif est conservé : rien ne saurait stopper la marche en avant du héros, lequel sait partager ses biens et ses idées au mépris des conservatismes et superstitions de tous ordres. L’héritage – semi-naïf – transmis aux jeunes générations des années 1970-1980 aura atteint son but : outre une certaine ouverture d’esprit, c’est la capacité du personnage à faire face et à résoudre les problèmes les plus divers (techniques, politiques, naturels, etc.) qui en aura fait l’un des grands incontournables de la bande dessinée franco-belge, magnifié à l’évidence par le beau dessin de Chéret.
Philippe TOMBLAINE
« Rahan : Le Collier de griffes » par André Chéret et Roger Lécureux (dans l’intégrale T3, en 1992)
Éditions Soleil – ISBN : 2-87764-118-X
pas de nouvelle intégrale en vue ?
Maestro André Chéret,ces intégrales en noir et blanc sont une merveille,enfin dignes de son talent.Quelle inventivité!
A quand le Grand Prix d’Angoulême pour ce génie instinctif de l’art séquentiel,un des plus grand du monde dans son domaine?
Bonjour, a quand le nouveau rahan ??