Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Glénat présente : Glénat renoue avec l’humour…
On peut s’étonner de voir Jacques Glénat se lancer sur le créneau de l’humour. Pas de la bande dessinée d’humour, mais de l’Humour avec un grand H. Les plus anciens lecteurs ne seront pas surpris, puisque c’est un grand nom de l’Humour qui a permis aux jeunes éditions Glénat de prendre leur envol : Claude Serre, avec le best seller que fut « Humour noir et hommes en blanc ». Glénat a ensuite publié Tetsu, Bridenne, Desclozeau, Quino, Barbe, Lacroix… Cabu et son « Grand Duduche » ouvrent le bal pour ce retour aux sources…
Éternel jeune homme à la coupe de cheveux légendaire, Cabu a dominé, que dis-je, écrasé le monde du dessin l’humour depuis les années 1960. Le Grand Duduche, son personnage emblématique, est né dans les pages de Pilote en 1962, où ses propos étaient plutôt sages, avant de découvrir la politique en passant dans Charlie Hebdo, puis dans Le Canard enchaîné. Il est l’invité de ce premier numéro de Glénat présente (le titre figure très discrètement à droite en bas de couverture), qui propose une sélection de dessins évoquant Mai 68.
Après un billet de Jacques Glénat, le magazine s’ouvre avec une préface de Plantu qui conclut : « Il faudra bien qu’un jour les ayatollahs de tout poil et de toute barbe finissent par reconnaître que le trait de Cabu est tout simplement éternel et divin. » Un long et érudit dossier signé Jean-Marc Vidal, « Cabu lance Duduche dans la cour des grands », évoque la longue carrière du dessinateur des « Beaufs », de « Madame Pompidou », de « Catherine », de « Camille le camé »… et même de « Dorothée ». La partie rédactionnelle se conclue avec l’évocation du dessinateur par le philosophe britannique Théodore Zeldin. Enfin (et surtout), le regard malicieux derrière ses lunettes, Cabu nous invite à rejoindre Duduche en 68 pages riches en souvenirs. Cabu est tombé à l’âge de 76 ans, avec ses copains de Charlie Hebdo, sous les balles des kalachnikovs des frères Chérif et Saïd Kouachi, le lundi matin 7 janvier 2015 vers 11 h 20. Il aurait fêté ses 80 ans le 13 janvier.
Présentée comme un numéro collector, cette première livraison de Glénat présente laisse espérer de bonnes pintes de rire, d’autant plus que le numéro suivant annoncé pour le 28 juin sera consacré aux « Années Vuillemin » : une autre pointure de l’Humour. La direction du projet est signée Nicolas Waintraub (Double 8 Média), la conception éditoriale Jean-Marc Vidal. On peut regretter l’aspect un peu maigrelet du magazine, comparé à d’autres numéros hors-série plus copieux et vendus au même prix. Ce qui n’empêche pas sa lecture d’être passionnante. (100 pages en couleurs et en noir et blanc, 6,95 €, en kiosques).
Henri FILIPPINI