Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Monument amour » T1 par Arnaud Floc’h et Didier Quella-Guyot
En août 1914, Camille Le Moall, un sculpteur breton orphelin et veuf, au passé tourmenté, voit arriver la mobilisation pour la Grande Guerre comme une délivrance… jusqu’à ce jour de l’hiver 1917 où, au fond de sa tranchée, il est victime d’un tir d’obus ennemi.
Grièvement blessé aux jambes, le soldat est extrait de la gangue de terre et de boue qui recouvre son corps par un chien venu de nulle part. Imperturbable, l’animal suit ensuite le blessé jusqu’à l’hôpital. Entre l’homme et la bête, qu’il baptise Bounty, se créent des liens mystérieux. Au centre de convalescence, où il sculpte la statue d’une femme dénudée pour redonner vie à un piédestal vide, Camille se lie également d’amitié avec le lieutenant Alcide d’Alembert ; lequel l’aide à rejoindre le centre de dressage pour chiens de guerre, près de Versailles.
Le conflit terminé, Le Moall alors démobilisé repart sans plaisir pour la Bretagne, accompagné d’une bande de chiens blessés, devenus inutiles et condamnés par l’armée à l’équarrissage. Dès son arrivée au village, il gagne le petit cimetière où repose sa femme Sarah, décédée peu avant le début du conflit et que ses beaux-parents – les Mimieux — accusent d’avoir tué. L’homme retourne ensuite son atelier d’artiste, rejoint par ce passé tragique qui l’a hanté tout au long des années de guerre…
Avec en toile de fond l’histoire peu connue des chiens de guerre — héroïques tout au long de la Première Guerre mondiale —, notre collaborateur Didier Quella-Guyot (le scénariste de « Facteur pour femmes » et de « Boitelle et le café des colonies ») brosse le portrait d’un artiste écorché vif, aux prises avec un lourd passé. Par petites touches, il ouvre quelques portes, laissant le lecteur s’interroger sur la véritable personnalité de Camille Le Moall. Arnaud Floc’h, bien qu’ayant débuté en 1982, s’est révélé seulement à partir de 2006 avec la publication d’une série de one shot aux sujets forts : « La Compagnie des cochons », « Les Otages », « Le Carrefour ». Son trait réaliste et soigné lui permet de camper des personnages solides, auxquels le lecteur s’attache. Camille Le Moall est de ceux-là . Il nous faudra attendre la parution du second volume de ce diptyque pour enfin savoir si l’artiste maudit est victime ou criminel.
« Monument amour » T1 par Arnaud Floc’h et Didier Quella-Guyot
Éditions Bamboo/Grand Angle (13,90 €) – ISBN : 978-2818941553