Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
Lire la suite...« Mousquetaire T1 : Alexandre de Bastan » par Florent Calvez, Ugo Pinson et Fred Duval
Le 5 septembre 1661, Louis XIV ordonne l’arrestation de Nicolas Fouquet pour malversation. Le Surintendant des finances, qui est l’homme le plus puissant du royaume après le roi lui-même, est poursuivi à Nantes par d’Artagnan, alors capitaine-lieutenant de la célèbre compagnie des Mousquetaires. Partant de cette réalité historique, Fred Duval et Florent Calvez dressent dans « Mousquetaire T1 : Alexandre de Bastan » un impitoyable tableau du siècle, où s’agitent dans l’ombre les empoisonneurs et les derniers fidèles de Fouquet : la mission de D’Artagnan, assisté par une jeune recrue (le bien nommé Alexandre), sera de retrouver trois lettres jugées compromettantes pour les intérêts du pouvoir… absolu.
On devinera, en lisant en creux le premier titre de cette nouvelle série (annoncée en 4 volumes), « Alexandre de Bastan » (le nom Bastan provenant du nom d’un ruisseau et de sa vallée située dans les Pyrénées… en Gascogne), que les auteurs renvoient astucieusement leurs lecteurs au plus grand classique du genre romanesque et historique de cape et d’épée : soit le feuilletonnesque « Les Trois Mousquetaires » dans lequel Alexandre Dumas (1844) met comme on le sait en scène Charles de Batz de Castelmore d’Artagnan. Cet authentique homme de guerre (née vers 1611 et tué en 1673 durant le siège de Maastricht) intègre en 1657 la première compagnie des mousquetaires, dite des « grands mousquetaires » ou des « mousquetaires gris » (en raison de la robe de leur chevaux), avant d’en prendre le commandement dès l’année suivante. Déjà adapté plus de 30 fois au cinéma et en animation (dès 1903), et plusieurs centaines de fois sous la forme de comics pulps, illustrés et bande dessinée (concernant les albums ou séries encore disponibles, citons par exemple les 3 tomes réalisés par Michel Dufranne, Jean-David Morvan et Ruben aux mêmes éditions Delcourt que la présente nouveauté), le roman de Dumas méritait néanmoins une relecture. Avec « Mousquetaire », Fred Duval – prenant donc pour point de départ un fait historique – choisi de faire de D’Artagnan le bras armé de Louis XIV, plus exécuteur mandaté et redoutable âme damnée nocturne que héros agissant avec agilité et panache au plein soleil.
Dès septembre 1661, alors que Fouquet est enfin arrêté (non sans difficultés, car le papier envoyé par le Roi arrive trop tardivement à D’Artagnan !), on s’interroge en haut lieu sur les véritables raisons de cette subite condamnation : Mazarin (décédé en mars 1661) aurait conseillé à Louis XIV de se méfier de ce ministre puissant et ambitieux, qui installe des forts, des hommes et des canons sur l’île d’Yeu, possède une grande clientèle et le soutien des paris dévots. Surtout, Colbert suspecte Fouquet d’être impliqué dans l’affaire des poisons : en juin 1658, Louis XIV (âgé de 19 ans) ne survit ainsi in extremis qu’après de violents vomissements, alors que l’après-règne du monarque est déjà évoqué. De son côté, Fouquet parvient néanmoins à faire prévenir ses proches, tous ne prenant pas l’élémentaire précaution de détruire ses documents les plus compromettants.
Dans l’album, une certaine Madame de Locuste, espionne et empoisonneuse, forme la jeune Éloïse de Grainville (qui sera le sujet du futur tome 2 de « Mousquetaire »), afin d’en faire une demoiselle de cours fidèle et utile. Le nom Locuste fait référence à une fameuse empoisonneuse de la Rome antique : c’est probablement elle qui élimine l’empereur Claude (en 54 ap. J-C.) et son fils Britannicus, sur ordre d’Agrippine et de Néron. Locuste sera condamnée à mort en 69 par Galba. Signalons également que le plus fameuse « affaire des poisons » survient postérieurement au contexte de « Mousquetaire » : en mars 1676, l’arrestation de la marquise de Brinvilliers dévoile assassinats et complicités en grand nombre, conduisant à une centaine de jugements (34 à mort), dont celui de Catherine Deshayes, dite la Voisin, qui a fourni en poisons et sortilèges de grands personnages de la ville et de la cour.
De poison et d’atmosphère empoisonnée, il est justement fortement question dans ce premier tome illustré en couverture par une autre forme de violence : la pratique du duel. De 1588 à 1608, près de 10 000 gentilshommes sont tués pour des prétextes souvent futiles, au prétexte de l’honneur bafoué. Cette hécatombe entérine un interdit royal, jusqu’à ce que Richelieu condamne à mort les contrevenants à partir de 1626. A l’époque de Louis XIV, le duel est cependant devenu une forme notable de revendication et d’indépendance de l’aristocratie contre la monarchie absolue. De 1643 à 1711, onze nouveaux édits royaux n’enrayeront finalement pas les 7 000 duels et les 400 morts constatés en moyenne chaque année.
Concernant le rapport au roman de Dumas et le rôle des célèbres mousquetaires, nous pouvons renvoyer nos lecteurs à deux précédents articles (réalisés en 2014), sur des univers proches : « Les 7 Vies de l’Épervier – Troisième époque T1 : Quinze Ans après » (http://bdzoom.com/70163/lart-de/%C2%AB-les-sept-vies-de-l%E2%80%99epervier-troisieme-epoque-t1-quinze-ans-apres-%C2%BB-par-andre-juillard-et-patrick-cothias/) et « De Cape et de Crocs T11 : Vingt mois avant » (http://bdzoom.com/80086/lart-de/%C2%AB-de-cape-et-de-crocs-t11-vingt-mois-avant-%C2%BB-par-jean-luc-masbou-et-alain-ayroles/). Créé par Louis XIII en 1622, le mousquetaire est un soldat d’élite nouvellement armé d’un mousquet, alors inventé pour pallier le manque de puissance des arquebuses. Recrutés parmi les gentilshommes, les mousquetaires deviennent pour partie la garde rapprochée de Richelieu. Dissoute en 1646 par Mazarin pour reformée en 1657 avec 150 hommes et passe au service du roi. En 1664, elle reçoit le surnom de « mousquetaires gris », en raison de la robe de leurs chevaux, par opposition aux « mousquetaires noirs » (et aux chevaux noirs…) traditionnels. Avec le temps, la casaque bleue originelle (ornée de 4 croix de velours blanc) qui leur servaient de manteau, deviendra un habit rouge écarlate et brodé d’or. Des manches et un col satinés de blanc et de dentelle, un chapeau au panache blanc, les bottes et l’épée viennent compléter une apparence devenue légendaire.
Précisons ici que l’illustration de couverture, une peinture à l’huile signée par Ugo Pinson (lui-même auteur de la série « Stonehenge », initiée depuis janvier 2015 chez Soleil), est née d’un visuel et d’une réflexion menée par Frédéric Blanchard : ce dernier explique : « La volonté de couper la tête du personnage principal sur ce visuel est le résultat d’une analyse profonde sur ce qu’on essaye de vendre, à savoir une série basée sur une période de l’histoire de France où le costume représentait une fonction. Ainsi, chaque couverture de « Mousquetaire » présentera l’un des 4 personnages principaux de la série au travers de son costume. Les accessoires mis dans les mains de ces personnages sont aussi importants car ils servent à les caractériser. Enfin, les arrière-plans fournissent un contexte qui aide lui aussi à définir chaque caractère. L’idée sous-jacente est de présenter une sorte de « portrait chinois graphique » de chaque personnage où, effectivement, le visage est masqué (comme sur l’affiche originale de « Barry Lyndon ») ; mais qu’importe après tout puisque ceux-ci n’ont aucune notoriété, à la différence de héros comme Thorgal, Blueberry ou Largo Winch. »
Entre petite et grande Histoire, périple volontiers rocambolesque et parcours fidèlement documenté du héros, mystères du récit de genre et troubles inhérents au Grand Siècle, le visuel de couverture rempli parfaitement sa fonction : nous donner envie d’ouvrir ce premier tome parfaitement maîtrisé avant d’attendre les suivants. « Un pour tous et… »
Philippe TOMBLAINE
« Mousquetaire T1 : Alexandre de Bastan » par Florent Calvez, Ugo Pinson et Fred Duval
Éditions Delcourt (15,50 €) – ISBN : 978-2-7560-7100-8
Les Trois mousquetaires adaptés huit fois en bandes dessinées? Allons donc… Sur mon site pastichesdumas.com, qui recense les suites, pastiches, plagiats et autres livres inspirés de Dumas, je montre plus de 200 BD tirées plus ou moins directement des Mousquetaires Dumas reste une source d’inspiration exceptionnelle! Amicalement
Oui, ma formulation était sur ce point imprécise : Dumas a à l’évidence inspiré un grand nombre d’auteurs, mais finalement peu de séries me semblent encore « connues » ou du moins accessibles. Sur la Bédéthèque, seules 8 séries (et 35 albums) sont listées concernant uniquement « Les Trois Mousquetaires » ! (cf. http://www.bedetheque.com/search/tout?RechTexte=les%20trois%20mousquetaires&RechWhere=0). Votre site constitue donc une base documentaire fort utile et appréciable.