Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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L’Islande, terre de glace et de feu, comme se plaisent à dire les dépliants touristiques, est rarement un terrain, voire un terreau pour la bande dessinée (d’ailleurs, quid de la BD islandaise ?), en tout cas elle est rarement mise en scène. A l’heure où les auteurs de polars circumpolaires font leurs choux gras des bas-fonds familiaux et sociétaux, il n’est donc pas bête d’y situer un polar en compagnie de Jazz Maynard, héros qui avait déserté les rayons depuis cinq ans…
Entre 2007 et 2010, un premier cycle de 4 épisodes nous a permis de faire la connaissance de Jazz Maynard, qui comme son nom l’indique est un musicien mais aussi un expert des poings et des armes à feu, comme son nom ne l’indique vraiment pas. Dans le tome 1, « Home Sweet Home », lors de son séjour à New York, il n’hésite pas à sortir des griffes des proxénètes sa sÅ“ur, Laura, contrainte de se prostituer. Revenu à Barcelone, surtout dans son quartier d’El Raval tenu par un caïd, Judas Melchiot, il retrouve son ami Teo et repense à son ancien amour Lucia, mais il tombe dans un piège tendu par des gangsters américains. Dans le tome 2, après avoir sauvé Jazz Maynard de la brutalité des gangsters américains, Judas Melchiot impose en échange à Jazz Maynard une mission impossible : s’emparer d’une pièce d’or chez un chef de bande roumain. Pendant ce temps-là , la violence domine toujours dans le quartier d’El Raval à Barcelone ainsi que les malversations politiques auxquelles s’intéresse Lucia, la journaliste incorruptible, quartier de son enfance.Dans ce cinquième tome et premier volume d’un diptyque, loin de la Méditerranée, c’est dans les fraicheurs nordiques que nous convie Maynard. On pourra regretter que tout le récit se concentre à Reykjavik, mais les auteurs ont pris soin de révéler la vie quotidienne dans ce qu’elle a de plaisant (les spécialités culinaires) ou déplaisant (un état d’esprit d’extrême-droite sans nuance – ce qui est sans doute un pléonasme). Précisons que, côté gastronomie, il y a le requin fermenté (le « hakarl ») ou les testicules de bélier (le « hrutspungur ») ; agrémenté d’alcools forts, tout passe ! En fait, Jazz est venu là avec son ami Teo pour récupérer un objet iranien légendaire, un Å“il sacré et divinatoire, à un moment où dans ce pays sans criminalité, dit-on, 5 meurtres racistes sont commis par des individus qui se font appeler les Vikings. Evidemment les routes des uns et les autres se croisent…Comme dans les premiers épisodes, l’action est privilégiée, les poings des héros frétillent sans arrêt et la tension du récit est systématique. En outre, le dessin est souvent sombre, marqué par des aplats noirs imposants, ce qui dote le récit d’un trait caricatural très expressif, voire expressionniste. Et les perspectives sont volontiers appuyées pour accompagner l’action. Bref, amateurs de polars taillés à la serpe, Jazz Maynard vous attend…
Alors, bon voyage !
Didier QUELLA-GUYOTÂ : L@BD->http://9990045v.esidoc.fr/ et sur Facebook.
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« Jazz Maynard T5 : Blood, Jazz and Tears » par Roger et Raule
Éditions Dargaud (13, 99 €) – ISBN : 978-2-5050-6344-5