Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Manuel de la jungle » par Nicoby et Joub
Sous ce titre ronflant se cache un récit vécu, celui de deux auteurs de BD qui vont passer quelques jours en forêt guyanaise, plus exactement au cœur d’un lac plein de surprises. Ils ne sont pas seuls – heureusement ! – puisque que deux amis, aguerris aux modes de vie amazonienne et autrement plus baroudeurs qu’eux, leurs servent de guides…
Tout a commencé lors d’un repas parisien où Joub a proposé à son éditeur un reportage sur la forêt vierge dans le but d’en donner une vision moins anxiogène que celle qu’on véhicule d’ordinaire à son sujet. L’idée était louable, mais la réalité les poussera à en donner une vision moins rassurante de « l’Enfer vert ». A priori, rien d’infernal, d’ailleurs Olivier et Jérôme qui les guident l’expliquent bien : tout se mange, tout se chasse, et rien ne vous agresse. En gros, c’est-à -dire quand tout se passe bien ! D’ailleurs un petit séjour en carbet devrait leur prouver que « la forêt, c’est un grand supermarché où il n’y à se servir pour manger », que « la forêt c’est que du bonheur ! », mais qu’« il faut la respecter » !En fait, ils sont moins en forêt que sur un lac artificiel créé par un barrage EDF qui a inondé un territoire immense où l’on peut chasser (le caïman) et pêcher, loin de tout. « Loin de tout » a priori, car dans ces contrées reculées il y a des orpailleurs clandestins, qui a coups de dynamite et de mercure font leur bizness, mais ils n’aiment pas les curieux. Du coup, le « manuel de la jungle » se concentre sur eux, leurs installations, leurs déplacements, leurs méthodes souvent radicales… Et l’angoisse devient pesante, la nuit, notamment. Bien entendu, les auteurs en rajoutent. « Ils exagèrent un peu » comme dit Davodeau en préface, tant ils ont tenu à faire sourire ou à se caricaturer eux-mêmes en aventuriers aux dents qui claquent, mais le récit, grâce à cela, en devient savoureux, jovial quelquefois, abordant au passage quelques sérieux problèmes de société. D’autant que Joub, installé en Guyane, connaît bien son sujet ! Tous deux racontent mais Nicoby dessine et Joub aquarelle.
La présence de Davodeau n’est d’ailleurs pas fortuite puisqu’il avait signé avec Joub, précisément,  trois tomes de la série « Geronimo » à partir de 2007 et qu’après les auteurs ont relancé ce personnage en lui faisant raconter ses errances et son séjour… guyanais ! Dans « Il s’appelait Geronimo » (Vents d’Ouest, 2014), Geronimo est un jeune homme un peu paumé qui rêve de partir aux États-Unis. Un jour, il embarque illégalement sur un cargo en partance pour la Guyane. Là , lors d’une bagarre, il défend un homme qui succombe à ses blessures. Il emprunte son identité pour retourner en France et s’appelle désormais Manu et va s’attacher à retrouver ses origines familiales. Ce récit est malheureusement souvent invraisemblable mais il comporte un petit dossier final concernant les « repérages » guyanais.
Didier QUELLA-GUYOTÂ : L@BD->http://9990045v.esidoc.fr/ et sur Facebook.
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« Manuel de la jungle » par Nicoby et Joub
Éditions Dupuis (19 €) – ISBN : 978-2-8001-6179-2
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