Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Tin Lizzie T1 : La Belle de Ponchatowla » par Dominique Monféry et Thierry Chaffoin
Dès la couverture, on se sait invités en Louisiane, celle du début du siècle : une vieille auto (flambant neuve au moment des faits !), le chapeau de cow-boy du conducteur, le bateau à vapeur au loin qui fleure bon le Mississipi… Pourtant, l’album commence près de 50 ans plus tard, lorsque Jake Lebey apprend le décès de son ami Rhod Fitzpatrick et que lui remonte en mémoire l’année 1908…
Il n’est alors qu’un enfant d’une dizaine d’années lorsque son grand-père, le « Colonel », grand propriétaire de Pontatowla, reçoit sa voiture, la première voiture à la ronde. Maitriser l’engin n’est pas une mince affaire et l’aventure démarre donc, comme il se doit, sur les chapeaux de roue ! Mais le riche planteur n’est  intéressé, lui, que par les 20 chevaux du moteur qui vont remplacer les vrais, à condition d’en faire un tracteur ! C’est la mission du régisseur, Rhod, employé grand et costaud, et de Louis, son collègue Noir.
Le petit Jake, futur héritier du domaine (ses parents sont morts) est vivement attiré par le programme mécanique qui se met en Å“uvre mais, alors que le colonel part avec son épouse à la foire agricole de Saint-Rochelle, il est embarqué dans une virée inoubliable. L’amour de Rhod pour Becky va en effet pousser le trio sur les chemins, direction New Bay, « ses tramways, ses fanfares de jazz, ses pâtisseries, ses glaces aux mille parfums ». Commence alors un road-movie fantaisiste aux confins de la Louisiane où même le petit Jake va tâter de la conduite, une expérience à jamais gravée dans sa mémoire que celle de conduire « Tin Lizzie », qui signifie vieille bagnole ou guimbarde mais qui est aussi le surnom aux Etats-Unis de la célèbre Ford T, car en 1908, avec ce modèle, c’est l’année où l’automobile entre dans l’ère de la grande série.
Cette histoire primesautière, gaie, virevoltante, dessinée avec allant,  est joliment coloriée par Julia Weber qui donne du volume et de la matière aux décors louisianais, comme aux intérieurs des cabanes en bois ou du « French Follies » où chante la si jolie Becky, alias Miss Kay (Mickey ? Peut-être un jeu de mots du dessinateur qui a longtemps travaillé dans les studios Disney ?).
Le second volet paraîtra en juin prochain.
Alors, bon voyage du côté de Ponchatoula qui existe bel et bien en Louisiane. Rochelle, aussi. Saint-Rochelle, c’est moins sûr…
Didier QUELLA-GUYOTÂ ([L@BD->http://www.labd.cndp.fr/] et sur Facebook).http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Tin Lizzie T1 : La Belle de Ponchatowla » par Dominique Monféry et Thierry Chaffoin
Éditions Paquet (13,50 €) – ISBN : 978-2-88890-681-0
On ne peut pas dire que cette automobile est la célèbre Ford T, surnommée « Tin Lizzie ».
Son dessin s’en inspire étrangement, mais la conduite d’une Ford T n’est pas la conduite de l’auto dans cette bande dessinée : elle n’était pas comme sur les automobiles plus courantes, et plus récentes : les pédales d’accélérateur, de frein et d’embrayage diffèrent. La Ford T a déjà le volant de direction à gauche (à droite dans la bande dessinée), et sur ce volant se trouve la manette des gaz (accélérateur), deux pédales seulement : marche avant (1ère et deuxième vitesse) et marche arrière, pédales complétées par un levier à main gauche qui sert aussi de frein et de remise au point mort. Principe qui permettait à Laurel et Hardy (grands utilisateurs de la Ford T) de rouler, stopper et repartir en marche arrière dans un presque même mouvement.
Je remarque d’ailleurs que dans l’album on ne cite pas que c’est une Ford T (on ne voit pas nom plus le nom de Ford sur le radiateur).
L’histoire est pas mal racontée, mais avait-on besoin d’en faire deux tomes ? Le scénario aurait pu tenir sur un seul album. Nous sommes très loin de Blacksad auquel ce genre d’histoire pourrait faire songer.
Complément d’information :
Le véhicule en question pourrait correspondre à une IMPERIAL AUTO CO. Model 50, Touring car, 4 cylindres de 5,2 l, fabriquée à Jackson dans le Michigan, par les frères Campbell à partir de 1908. Les Imperial étaient des assemblages, carrossée par la Beaudette Company qui travaillait pour Buick et FORD…
(d’après un article de La Vie de l’Auto n° 1634 du 23 octobre 2014).
La photo liée à l’article nous montre une automobile avec la silhouette de la FORD T, mais avec la conduite (volant) à droite et les deux leviers hors la carrosserie, tout comme dans la bande dessinée.