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« Frères de terroirs » par Jacques Ferrandez et Yves Camdeborde et « Un grand Bourgogne oublié » par Boris Guilloteau, Manu Guillot et Hervé Richez

21/11/2014
Par Didier Quella-Guyot

S’il est un moyen de voyager, c’est bien par les papilles ! Loin désormais de se cantonner à mettre en scène des gourmands obèses ou des héros qui ne mangent presque jamais, la bande dessinée ne se lasse plus d’évoquer de grands chefs, le marché des vins ou l’art culinaire sous toutes ses formes, multipliant histoires et recettes, les mêlant pour le plus grand bonheur des lecteurs gourmets. Avec « Frères de terroirs » ou « Un grand Bourgogne oublié », le lecteur gastronome est comblé, car au-delà des contenus alimentaires l’art du récit et celui du dessin satisfont également le bédéphile…

Tout a commencé pour Ferrandez par une rencontre, celle du cuisinier Yves Camdeborde avec lequel il va faire un tour de France gourmand à la rencontre de « frères de terroirs » désignant là des amoureux d’une cuisine de caractère, de vins goûteux et naturels, de produits rares, bref l’art culinaire dans ce qu’il a d’artisanal au sens noble du mot. Yves Camdeborde ayant expliqué qu’il n’y a de bon cuisinier qu’entouré de bons producteurs et fournisseurs, et d’une chaîne alimentaire de qualité d’éleveurs, maraîchers, pêcheurs, bouchers, vignerons… S’ensuit la découverte et la présentation de produits tels que la truffe (Gramenon), le Côte-Rôtie (vallée du Rhône), le homard de Chausey, le brochet de la Loire, les chevriers de la Vallée d’Aspe… Sans oublier l’importance d’une bonne coutellerie (les couteaux Perceval), le rôle de la criée (ici, Saint-Jean-de-Luz). De sorte que de reportage en reportage, car c’est bien de cela qu’il s’agit – le tout entrelardé de recettes illustrées probablement savoureuses – le lecteur suit avec délectation les deux auteurs, des « croqueurs » dit le sous-titre de l’album en jouant sur les mots. A noter qu’on retrouve tous ces lieux et plus encore (réalité augmentée) sur le site dédié : http://www.freresdeterroirs.fr/

Avec « Un grand Bourgogne oublié », le reportage est parfaitement noyé dans un récit (l’art du scénariste Hervé Richez y est à l’évidence pour beaucoup), de sorte qu’on suit d’abord une histoire, mieux une enquête ! Propriétaire d’un domaine dans le Mâconnais, Manu découvre un jour un lot de bouteilles anciennes qui lui permet de déguster le meilleur vin qu’il ait jamais goûté. Il décide de replanter une parcelle avec les pieds de vigne qui ont permis de concevoir cette merveille, mais il lui faut d’abord savoir de quel vin il s’agit, car la bouteille ne contient plus d’étiquette, si ce n’est l’année, 1959. La recherche commence… Inspirée de vignerons réels et d’anecdotes non moins véridiques (ce qu’un dossier de huit pages final explique), les auteurs réalisent là un album très réussi, à la fois érudit côté vinification, passionnant côté scénario et dynamique côté dessin. Qu’on s’y connaisse ou pas, on est porté par la quête et on veut savoir, comme le héros, quel est ce vin mystérieux qui a émoustillé intensément ses papilles et qui le fait voyager à Bruxelles, Paris, New York. Et là, encore, il est plus que jamais question de terroir !