Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Madame Livingstone : Congo, la grande guerre» par Barly Baruti et Christophe Cassiau-Haurie
Tout le monde connait Livingstone et les célèbres retrouvailles avec Stanley (« Dr Livingstone, I presume?). Peu probable, en revanche, que quelqu’un connaisse Madame Livingstone… surtout quand il ne s’agit pas de son épouse, mais de son fils, un drôle de monsieur surnommé « Madame Livingstone », qui n’était cependant pas Écossais bien qu’il portât le kilt, mais Congolais. Bon, Reprenons…
On est en 1914, du côté des Grands Lacs, en Afrique centrale. Un aviateur belge, Gaston Mercier, est chargé par son Roi (propriétaire des lieux, ne l’oublions pas), d’aller couler un cuirassé allemand sur le lac Tanganyika (région du Katanga). C’est l’époque où Belges et Allemands tentent se partager en guerroyant à qui mieux-mieux, le cÅ“ur du continent noir. Pour ce faire, Mercier va se faire aider par un personnage local, étonnant – on dirait un drôle de zèbre si on n’était pas là -bas ! -, un métis porteur de kilt et qui se prétend fils de l’explorateur anglais et d’une Congolaise. Peu à peu, l’amitié unit ces deux individus sans point commun. Au contact de l’énigmatique Livingstone, le doute s’immisce dans l’esprit du militaire qui se demande de quel droit finalement les Européens s’écharpent si loin de chez eux, alors que les populations locales ne gagnent rien à l’affaire et même vont en pâtir le plus souvent. « Nous sommes étrangers sur ces terres : Congo belge ou Tanganyika allemand, les Africains s’en foutent complètement », se dit-il. Ce que complète Livingstone en affirmant « Les frontières, c’est vous qui les faites ».
Alors qu’une préface de Jean Auquier, intelligente et éclairée, ouvre l’album, un dossier final apporte sa part d’informations, de documents (notamment sur l’armement) et de croquis préparatoires qui valident cette œuvre humaine et nuancée consacrée à un épisode bien réel de la guerre de 14 et à ce bateau allemand dont Baruti évoque l’incroyable destin. Et c’est au bilan un très bel album, coécrit par le scénariste Apollo et Christophe Cassiau-Haurie, grand spécialiste de la BD africaine, pour lequel Barly Baruti a réalisé un superbe travail, traitant notamment ses couleurs avec subtilité. Les cases sylvestres ou nocturnes sont magnifiques ; les reflets du ciel sur le fleuve ou le jeu des nuages donnent également lieu à des effets spectaculaires et l’œil s’arrête inévitablement sur ces ambiances africaines que l’auteur connait de l’intérieur, bref voilà une centaine de planches qui font réfléchir…  et voyager.
Didier QUELLA-GUYOTÂ ([L@BD->http://www.labd.cndp.fr/] et sur Facebook)Â : http://bdzoom.com/author/didierqg/
 « Madame Livingstone : Congo, la grande guerre» par Barly Baruti et Christophe Cassiau-Haurie
Éditions Glénat (22,50 €) – ISBN : 978-2-7234-9719-0
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