Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Momo – The Beautiful Spirit » T1 par Yuji Kobayashi et Z-One
Le Japon est un pays où se côtoient de nombreuses légendes transmises au travers des siècles. Motorao est une des plus connues. C’est l‘histoire d’un jeune garçon sorti d’une pêche (momo) pour libérer un village entier asservi par des démons. Pour réaliser cet exploit, il est accompagné par une équipe totalement improbable : un cygne, un chien et un faisan. Et si ce récit était transposé dans le futur, cela donnerait une histoire bien étrange et fantastique. C’est le pari de « Momo – The Beautiful Spirit », réinventer ce conte populaire avec les codes de la science-fiction d’aujourd’hui.
Sur une planète hostile, un jeune garçon du nom de Taro débarque d’une fusée qui vient de s’écraser. Il a apparemment perdu la mémoire et oublié sa mission. Le précédent équipage d’un autre vaisseau qu’il a retrouvé est mort depuis longtemps. Mais une chose est sûre, il y a de la vie sur ce corps céleste puisque les cadavres sont infestés de vers.
Une jeune fille du nom de Momo le recueille et lui sauve la vie en lui montrant comment se nourrir. Ici, tout est encore à l’état sauvage et l’eau semble une denrée rare. Tout va bien jusqu’à ce qu’une bande de démons plus horribles les uns que les autres débarque et cherche à les tuer. Momo sort immédiatement son artillerie de guerrière et décime les monstres. Mais Taro ne l’entends pas de cette oreille, il est foncièrement pacifiste et se refuse à tuer un être, aussi horrible qu’il soit. À ce rythme-là , il risque de ne pas survivre longtemps. La suite de l’histoire nous dévoilera plus de secrets sur le voyage entrepris par ces deux terriens et sur la raison de leur atterrissage sur cette planète au doux nom de Kikyu.
Les éditions Tonkam piochent de nouveau dans le catalogue du mensuel japonais Gekkan Hero’s. Ils en ont déjà tiré les titres « Hero Mask », « Soul Reviver » ou « Buddy Spirits ». Ce magazine édité par Shôgakukan existe depuis novembre 2011. Il sort le premier de chaque mois et ne coûte que 200 ¥ (1,5 €). Sa particularité est de privilégier les mangas d’action avec un graphisme bien plus élaboré que la moyenne. Son faible coût s’explique par le nombre réduit de séries publiées, moins d’une dizaine par numéros, alors que les autres magazines, notamment le Shonen Jump, en propose le double.
Le scénariste Yuji Kobayashi a clairement pris quelques libertés avec le conte original de Momotaro. Il a choisi d’en faire deux personnages bien distincts. De replacer le contexte médiéval par un futur improbable où les deux jeunes auraient été envoyés en mission sur une planète trouble. Ce qui est intéressant, c’est qu’ici les rôles hommes/femmes sont quasiment inversés. Momo, la jeune fille doit en permanence sauver Taro, soit disant l’homme de la situation. Au départ, le lecteur est laissé dans le flou le plus total. On ne comprend pas vraiment qui fait quoi et surtout pourquoi ! Momo, soi-disant terrienne est habillée fort simplement et ne ressemble pas à l’idée que nous aurions pu avoir d’un être du futur. Au départ, elle est armée de simples couteaux et autres objets tranchants. Puis, tout d’un coup, elle sort un fusil : bienvenue dans ce genre d’affrontement avec des démons plutôt patibulaires ! C’est au fur et à mesure de la lecture de ce premier opus que l’on découvre la raison de leur présence dans ce monde et que les choses deviennent un peu plus claires au fil des pages.
Si le scénario semble tenir la route, sans être transcendant, c’est surtout le dessin qui accrochera le lecteur potentiel. Celui-ci est dû à Z-One, pseudo d’un jeune dessinateur coréen. Il a un trait particulièrement dynamique et un cadrage qui colle parfaitement à ce que l’on attend d’un manga d’action. Ses personnages sont très réalistes et leurs plastiques bien mises en valeur. Que ce soit celle de l’héroïne court vêtue ou des démons aux faces torturées. Le travail sur l’ambiance et les décors sont également de toute beauté, même si cela reste très classique dans la représentation d’un monde hostile et inhabituel. Le travail sur ces aplats noirs et ces différences de ton sur les différents plans donnent une luminosité et une profondeur qui aident à la lisibilité de l’action. Pour faire bref, visuellement, c’est très beau.
Finalement, dans ce premier volume il ne se passe pas grand-chose. Il nous présente surtout le contexte de la mission dans les dernières pages. Les premières étant un enchaînement de combats mettant en valeur les formes généreuses de l’héroïne, mais sans en faire trop, ce qui est rare. À noter quand même que ces scènes violentes sont de toute beauté. Il est clair que ce manga ne cherche pas à conquérir les amateurs de grande littérature. Néanmoins, il sait soigner le public ciblé en lui donnant un récit, somme toute intelligent, qui revisite un classique japonais. Vivement la suite et, surtout, qu’on ait plus d’explications afin de finalement comprendre le sens de la mission de ces deux terriens égarés bien loin de chez eux.
Gwenaël JACQUET
« Momo – The Beautiful Spirit » T1 par Yuji Kobayashi et Z-One
Édition Tonkam (7,99€) – ISBN : 978-2-7560-5781-1
MOMO THE BEAUTIFUL SPIRITS © 2013 Z-ONE, Yuji Kobayashi/HERO’S INC
Ping : Semaine du 08.04.2014 – Beaub'FM
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