« 7 Merveilles T1 : La Statue de Zeus » par Stefano Andreucci, Matthieu Rebuffat et Luca Blengino

Premier tome présenté dans le cadre de la nouvelle série-concept initiée chez Delcourt en avril 2014, « 7 Merveilles T1 : La Statue de Zeus » dévoile comme il se doit son intrigue aux alentours de l’antique sanctuaire grec d’Olympie. En 432 av. J.-C., alors que se déroule la 88e édition des jeux, le destin de trois jeunes gladiateurs va se trouver mêlé à un possible complot, en lien avec le sculpteur Phidias et le secret de son chef-d’œuvre, la statue chryséléphantine de Zeus…

L’Antiquité est redevenue à la mode en bande dessinée, comme en témoignent diverses récentes séries : citons par exemple « Golias » (Le Tendre et Lereculey, Lombard 2012), « Minas Taurus » (Mosdi et Cerqueira, Lombard 2012) ou « Oracle T1 : La Pythie » (Peru et Martino, Soleil Productions mars 2014). Toutefois, la thématique – pourtant vaste – des sept Merveilles du monde antique (dont la liste canonique fut établie par un auteur, Philon de Byzance, à l’origine incertaine…) n’avait pas été encore explorée jusqu’ici. Pour sa part, le scénariste Luca Blengino avait initialement commencé à réfléchir à un one shot : un projet d’hommage à « Nabucco », l’opéra de Giuseppe Verdi réalisé en 1842 et narrant l’esclavage du peuple Juif à Babylone. L’histoire était celle d’un simple jardinier, Å“uvrant dans les légendaires Jardins Suspendus de la ville… Après quatre années de travail, ce scénario s’est considérablement transformé, au profit de sept récits, placés chacun sur les plus emblématiques sites antiques. Suivront donc « Les Jardins de Babylone » (dessin de Roberto Ali ; mai 2014), « Le Phare d’Alexandrie » (dessin de Tommaso Bennato ; août 2014), « Le Temple d’Artémis » (dessin d’Antonio Sarchione ; octobre 2014), « La Pyramide de Kheops » (dessin de Carlos Magno ; janvier 2015), « Le Mausolée d’Halicarnasse » (dessin de Lionel Marty ; mars 2015) et « Le Colosse de Rhodes » (dessin d’Antonio Palma ; mai 2015). Notons que, dans un souci de cohérence, les sept couvertures de ces albums seront dessinées par le graphiste Matthieu Rebuffat.

Une merveilleuse série !

Reconstitution du sanctuaire d'Olympie (dessin de J. C. Golvin)

La célèbre statue, représentée par Jacques Martin dans Les Voyages d'Alix : la Grèce (Casterman, 2000)

Vers 432 et 431 avant J.-C., le monde grec va s’embraser avec la longue Guerre du Péloponnèse, qui opposera jusqu’en 401 la Ligue de Délos (menée par Athènes) et celle du Péloponnèse, sous l’égide de Sparte. La construction du Parthénon s’achève, tandis que les peuples helléniques continuent de perpétrer une longue tradition culturelle et sportive : depuis le VIIIe siècle av. J.-C., on organise les Jeux, dans le cadre d’un festival religieux en l’honneur de Zeus Olympie. Dans le temple qui lui est dédié, le sculpteur athénien Phidias a construit en 436 av. J.-C. une gigantesque et prestigieuse statue chryséléphantine (âme en bois recouverte de plaques d’or et d’ivoire). L’ensemble, de 12 mètre de haut, montre le dieu Zeus assis sur son trône (selon une représentation « classique », remontant à « L’Iliade » d’Homère, en 800 av. J-C.), couronné d’un rameau d’olivier. Zeus tient dans sa main droite une statuette de Niké, déesse personnifiant la victoire, elle-même représentée couronnée d’un bandeau et d’une guirlande. De la main gauche, le dieu suprême arbore un sceptre richement décoré, sur lequel un aigle est perché. Drapé dans un himation (manteau) brodé de figures animales et de fleurs, Zeus porte des sandales. Son trône comporte une décoration à la fois sculptée, incrustée (pierres précieuses, ébène) et peinte. Quatre petites Victoires dansantes couronnent encore les pieds du trône.

Roughs et recherches pour la couverture, par M. Rebuffat

La présente couverture illustre en contreplongée l’impressionnante vision d’un démiurge sombre et inquiétant : devant lui, l’homme n’est qu’un pion insignifiant, dont le destin est malmené de case en case, comme en témoignent symboliquement – et avec un regard plus contemporain ! – le damier des dalles noires et blanches, constitutives du parement du temple de Zeus. Notons que le scénario de Luca Blengino met notamment en scène un certain Pantarké d’Olympie ; ceci alors que – pour les historiens – l’un des moyens les plus fiables dans la datation du sanctuaire et de la statue fut la mention d’une inscription kalos (en l’honneur d’un jeune homme) sur l’un des doigts (« Pantarkès est beau »). Or, le dénommé Pantarkès remporta réellement (en 436 av. J.-C.) l’épreuve de lutte garçons aux Jeux olympiques…

Vision relativement sinistre et infernale, la couverture de « La Statue de Zeus » semblera de fait annoncer toutes les catastrophes : mort et châtiment divin, courroux bientôt manifeste au travers d’une guerre dévastatrice… Elle-même ultérieurement déplacée vers Constantinople à l’époque de l’empereur d’Orient Théodose II (règne de 408 à 450 ap. J.-C.), la statue de Zeus disparaîtra entièrement dans un incendie en 461. Toutes le autres Merveilles (Pyramides d’Egypte mises à part) subiront un destin tout aussi tragique : incendies, intempéries, séismes, manques d’entretien et saccages provoqués par la main de l’homme.

Philippe TOMBLAINE

« 7 Merveilles T1 : La Statue de Zeus » par Stefano Andreucci, Matthieu Rebuffat et Luca Blengino
Éditions Delcourt (14, 50 €) – ISBN : 978-2756037424

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