Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Cassis T1 : Cassis veut jouer » par Ève Tharlet et Brigitte Luciani
Parmi les séries animalières proposées au jeune public, il y a quelques belles pépites unanimement reconnues pour leur qualité graphique et l’intelligence de leur univers, devenues aujourd’hui des classiques du genre. Elles ont ravi plusieurs générations de lecteurs.
On pense bien sûr à « Toto l’ornithorynque », de Yoann et Éric Omond, apparue chez Delcourt en 1997, avec un premier titre, « Toto l’ornithorynque et l’arbre magique » et riche aujourd’hui de sept titres. Réalisée entièrement en couleurs directes, riches et chaudes, la série raconte la vie de quelques animaux au cœur de la forêt australienne. Une belle découverte avec Toto l’ornithorynque, Wawa le koala, Chichi l’échidné et Riri la chauve-souris.
Et puis aussi bien sûr, « Le Vent dans les saules », série en quatre volumes, toujours chez Delcourt et publiée à partir de 1996, que Michel Plessix adapta d’un grand classique de la littérature anglaise signé Kenneth Grahame. Il y raconte avec un dessin magnifique et une mise en couleurs délicate, les pérégrinations de trois amis, Taupe, Rat et le bouillant crapaud, délaissant leur bois sauvage pour aller découvrir le vaste monde. En 2005, ne souhaitant pas abandonner ce trio détonnant, Michel Plessix entame une nouvelle série, « Le Vent dans les sables », entraînant ainsi ses personnages vers l’Orient.
En 2006, apparaît une nouvelle très jolie série animalière, signée par deux auteures, Ève Tharlet et Brigitte Luciani, « Monsieur Blaireau et Madame Renarde, publiée chez Dargaud. Une maman renarde, Marguerite, y rencontre un papa blaireau, Edmond. Marguerite a une petite renarde, Roussette, fille unique un peu capricieuse,  tandis qu’Edmond est le père de trois enfants, Glouton le bien nommé, Carcajou, plus raisonnable, et la petite dernière, Cassis, qui apprend tout juste à parler. Le compagnon de la renarde, épris de liberté et de voyages, n’a pas supporté la vie de famille. La femme du blaireau est morte d’une maladie.
Si un chasseur n’avait pas détruit le terrier de Marguerite, elle n’aurait pas trouvé refuge chez Edmond avec Roussette. Ces deux-là , très différents dans leur nature même d’animal et leur façon de vivre, n’auraient jamais dû se rencontrer. Il n’y aurait pas eu d’histoire, pas de bande dessinée et cela aurait été fort dommage !
Edmond et Marguerite décident pourtant de vivre ensemble et de recomposer une nouvelle famille. Il faut agrandir le terrier, l’aménager pour que chacun y ait sa place. Il faut faire des concessions, trouver la juste mesure entre le goût de l’ordre et de la propreté de monsieur Blaireau et la fantaisie de madame Renarde. Les enfants apprennent à se connaître, non sans quelques jolies prises de bec, doivent partager et accepter que le papa des uns s’occupe aussi de la renarde et inversement. Tout cela se fait doucement, au gré des saisons, et la nouvelle vie s’installe assez tranquillement.
La série, développée aujourd’hui sur cinq albums, (le tome 5, « Le Carnaval », est sorti en 2012) nous raconte, par petites touches délicates, la vie quotidienne de cette famille singulière recomposée. Les enfants s’y chamaillent et s’entraînent à se disputer à l’aide d’un vocabulaire bien inventif : « gros nul, poule mouillée, truffe morveuse, cervelle de limace, tapis pouilleux, paillasson à rayures, crotte de mouche, prout de putois … », les garçons blaireaux reconnaissant volontiers que, pour une fille unique, Roussette se défend bien ! On y organise des fêtes, on invite les voisins, on se prépare pour l’hiver, et les corvées de grand ménage sont une entreprise familiale qui suscite bon nombre de discussions.
Sur le plan graphique, la série est un véritable régal, combinant la douceur et la délicatesse du trait à la luminosité des planches aquarelles, servie par des dialogues bien écrits et quelques beaux morceaux de bravoure. Les jeunes lecteurs s’installent avec bonheur dans ces récits rassurants qui, par le truchement d’animaux sacrément humains, leur parlent de leur vie quotidienne. Les adultes qui partagent ces temps de lecture avec leurs enfants, y trouvent aussi matière à réflexion, puisque la série aborde, très délicatement des sujets reflétant parfaitement l’évolution de notre société où les familles recomposées et les couples mixtes ne sont plus une minorité.
Il est dans la série un personnage un peu en retrait, dont les apparitions suscitent pourtant émotion et tendresse : c’est la petite Cassis. Cette bébé blaireau, qui vit avec son papa et ses deux frères, accueille avec plaisir l’arrivée de Madame Renarde et de Roussette. Elle est ravie d’avoir enfin une nouvelle maman et une grande sœur et ne se pose pas plus de questions.
Elle a désormais sa propre série, « Cassis », dont le premier album est paru le 14 mars dernier, dans un format à l’italienne 246 x 182. « Cassis » s’adresse à de très jeunes lecteurs, qui ne savent pas encore lire ou qui débutent tout juste. Ses vingt-huit planches racontent comment la petite blairotte, qui déborde d’énergie, fatigue un peu ses deux frères et Roussette, qu’elle sollicite sans cesse et qui auraient envie de rester entre eux pour se livrer à leurs jeux de grands. Alors Cassis décide de jouer toute seule et, échappant à la vigilance des aînés, se lance dans la grande forêt à la poursuite d’un joli papillon …
Le récit fait la part belle à l’image et au mouvement, les couleurs tendres des aquarelles accrochent d’emblée les lecteurs. Pas de cases délimitées, mais un récit qui progresse par pages entières, ou en deux ou trois temps, horizontalement ou verticalement ; pas de bulles, mais des dialogues très lisibles, dans un lettrage proche de l’écriture manuscrite.
Une histoire au charme fou, où il est question d’enfance, de relations entre frères et sœurs, de jeu et de volonté d’indépendance. C’est bien cela, grandir !
La série «Monsieur Blaireau et Madame Renarde » , très largement récompensée, est publiée chez Dargaud. Elle a été traduite dans plusieurs langues, a obtenu de nombreuses récompenses et fait l’objet d’un projet d’adaptation audiovisuelle.
« Monsieur Blaireau et Madame Renarde, tome 1 : La Rencontre », 2006
« Monsieur Blaireau et Madame Renarde, tome 2 : Remue-Ménage », 2007
« Monsieur Blaireau et Madame Renarde, tome 3 : Quelle équipe ! », 2009
« Monsieur Blaireau et Madame Renarde, tome 4 : Jamais tranquille ! », 2010
« Monsieur Blaireau et Madame Renarde, tome 5 : Le Carnaval », 2012
Les quatre premiers tomes sont publiés également à l’École des loisirs, dans la collection Mille bulles, dans un moyen format souple à petit prix, 6 euros.
Enfin, dans la même collection pour tout petits à l’italienne, les éditions Dargaud ont déjà publié quatre titres inspirés de l’univers de « Boule & Bill » : « P’tit Boule & Bill » ainsi que trois titres dérivés de « Pico Bogue », signés Alexis Dormal et Dominique Roques : « Ana Ana ». Le troisième, « Une virée à la mer » est sorti en même temps que « Cassis ».
Nous avons parlé du premier tome, « Douce nuit », sur BDzoom.com, le 8 novembre 2012, là  :
Catherine GENTILEÂ Â Â
« Cassis T1 : Cassis veut jouer » par Ève Tharlet et Brigitte Luciani
Éditions Dargaud (7,95 €) – ISBN 978 2 2 205 07217 4
Bonjour
merci de citer « le vent dans les saules ». Mais vous avez fait une petite erreur: la série est en 4 tomes (et le cycle suivant « …les sables » est en 5 tomes).
Amicalement
Michel Plessix
Merci, Michel, pour cette précision. Je viens de rectifier sur l’article. Bon vent à vous !
Amitiés.
Catherine Gentile
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