Saviez-vous qu’en 1916, à Unicoi (comté de l’État du Tennessee, aux États-Unis), une éléphante prénommée Mary a été condamnée à mort et pendue à une grue pour avoir écrasé la tête du dresseur qui la battait ? Eh oui, en Amérique, à cette époque-là, on ne rigolait pas avec la loi, même en ce qui concernait les animaux à qui ont accordait, suivant la croyance populaire, une conscience morale. La plupart d’entre eux devant alors être exécutés, il y aurait eu, d’après l’excellent narrateur et dessinateur David Ratte (1), des bourreaux assermentés qui devaient parcourir tout le pays pour appliquer la sentence suprême à ces bestioles assassines, à la suite de décisions issues des procédures fédérales. C’était d’ailleurs le métier du jeune Jack Gilet : un type un peu paumé qui aimait tellement les animaux qu’il ne voulait pas qu’on les abatte comme des bêtes…
Lire la suite...« Le Kid de l’Oklahoma » par O. Berlion
Jusqu’à présent, toutes les productions du label « Rivages/Casterman/Noir » qui adapte, en bande dessinée, des romans policiers parus dans la célèbre collection dirigée par François Guérif, sont de très bonne facture? Certaines étant même mémorables ! Et ce « Kid de l’Oklahoma » d’après Elmore Leonard, vu par Olivier Berlion, n’est pas loin de l’être? En tout cas, il peut rivaliser, sans honte, avec les autres joyaux de la collection : le « Pauvres zhéros » de Pierre Pelot par Baru, le « Nuit de fureur » de Jim Thompson par Miles Hyman et Matz, le « Shutter Island » de Dennis Lehane par Christian De Metter, « L’Ultime défi de Sherlock Holmes » de Michael Dibdin par Jules Stromboni et Olivier Cotte?
Comme Elmore Leonard (grand nom de la fiction populaire américaine à qui l’on doit plus d’une quarantaine de romans, dont plusieurs ont été adaptés au grand écran) a une écriture très audiovisuelle, son polar, qui a un goût de western, a été facilement transposé en images ; sans que l’on ait à subir de longs récitatifs qui auraient nui à la lisibilité et à la narration ! En plus, le format ramassé (moins grand qu’un album traditionnel de bande dessinée) et la pagination dense (pas moins de cent dix planches) conviennent parfaitement au graphisme, lui-même très cinématographique, d’Olivier Berlion. En effet, son dessin anguleux et efficace retrace parfaitement l’ambiance un peu cynique et les nombreuses scènes d’action qui sont égrenées dans l’œuvre originale
D’ailleurs, la couverture donne le « la » d’emblée : au carrefour des années 1920 et 1930, dans l’état pétrolier de l’Oklahoma alors en plein essor économique, un Marshall et un fils de magnat du pétrole devenu braqueur de banques (et bientôt désigné comme l’ennemi public n°1) vont s’affronter, pendant plusieurs années. Cette épique confrontation nous est narrée par un journaliste qui a minutieusement noté toutes les étapes de leur face à face qui se terminera tragiquement : un vrai « Duel au soleil », remarquablement documenté !
Gilles RATIER
« Le Kid de l’Oklahoma » par Olivier Berlion, d’après Elmore Leonard
Éditions Casterman (18 Euros)