N’hésitez pas à revenir régulièrement sur cet article, puisque nous l’alimenterons, jour après jour, avec tout que nous envoient nos amis dessinateurs, scénaristes, coloristes, libraires, organisateurs de festivals et éditeurs pour vous souhaiter de joyeuses fêtes : et ceci jusqu’à la fin du mois de janvier 2024 !
Lire la suite...« Les Sept Vies de l’Épervier – Troisième époque T1 : Quinze ans après » par André Juillard et Patrick Cothias
Le « retour d’un mythe » ! Les termes employés par les éditions Dargaud ne sont pas excessifs pour vanter rien moins que la parution du nouvel opus de « Les Sept Vies de l’Épervier – Troisième époque T1 : Quinze ans après », par André Juillard et Patrick Cothias. Les lecteurs retrouveront ici avec plaisir, douze ans après la parution du tome 4 de « Plume aux vents », la suite des aventures d’Ariane de Troïl : cette dernière, de retour dans la France de 1642, se lance sur les traces de sa fille Ninon, dont elle fut tragiquement séparée à sa naissance… En couverture, sur fond de cité parisienne enneigée, notre héroïne – digne d’un roman de Dumas – se lance au galop vers un destin que l’on imagine tumultueux.
C’est en fait et pour l’occasion une double actualité éditoriale que présente Dargaud, qui en profite pour faire reparaître la totalité de la série « Plume au vent » (se déroulant au Nouveau Monde aux côtés des indiens Iroquois) sous une nouvelle maquette de couverture : les 4 tomes déjà parus en 1995 (« T1 : La Folle et l’assassin »), 1996 (« T2 : L’Oiseau-tonnerre »), 2001 (« T3 : Beau-Ténébreux ») et 2002 (« T4 : Ni Dieu ni Diable ») sont retitrés « Les 7 Vies de l’épervier – 2ème époque ». Cette uniformisation profite à la compréhension de la série pour les jeunes générations, mais devrait faire réfléchir les collectionneurs, certains d’entre eux ayant peut-être même acquis entre-temps la magnifique et luxueuse intégrale proposée par Glénat en octobre 2009 (volume de 560 pages réunissant à la fois les 7 tomes des « Sept Vies de l’Épervier » et les 4 tomes de « Plume au vent »).
Rappelons que la saga imaginée par Patrick Cothias recouvre non seulement tous les albums déjà évoqués, mais aussi un univers peuplé de six séries parallèles, toutes publiées entre 1984 et 2011 : « Masquerouge » (3 tomes dessinés par André Juillard et 7 par Marco Venanzi), « Cœur brûlé » (7 tomes dessinés par Jean-Paul Dethorey puis Michel Méral à partir du tome 3), « Ninon secrète » (6 tomes dessinés par David Prudhomme), « Le Fou du Roy » (9 tomes dessinés par Brice Goepfert), « Le Masque de fer » (6 tomes par Marc-Renier), « Les Tentations de Navarre » (2 tomes par Pierre Wachs pour cette série interrompue en 1999) et « « Le Chevalier, la Mort et le Diable » (2 tomes par Alain Robet ; série interrompue en 2000). Soit 53 albums au total ! Rappelons en outre que toute l’aventure avait démarré dès 1978 suite à une demande directe des éditions de Vaillant (Pif-Gadget) à Patrick Cothias, lequel a également écrit depuis plusieurs milliers de pages destinés à un ou plusieurs romans-fleuves encore inédits…
Dans ce vaste « Cycle des Sept Vies », on pourra relire un peu plus méticuleusement « Ninon secrète », dans la mesure où cette série narre les péripéties vécues par la fille d’Ariane et de Germain Grandpin, à la fois soldat, compagnon et confident de la fière baronne de Troïl. Avec « Quinze ans après », on assistera donc avec émotion et non sans difficultés aux retrouvailles familiales, dans un Paris qui vit aussi la fin de règne de Richelieu (disparu en décembre 1642) et de Louis XIII (qui meurt le 14 mai 1643).
La couverture de ce nouvel opus s’inscrit de manière assez fine dans la continuité de la série. En effet, le premier tome des « Sept Vies de l’Épervier » (« La Blanche morte ») s’était ouvert en mai 1983 sur une scène d’anthologie, reprise sur le 1er plat : quelque part dans une forêt d’Auvergne, une noble femme court dans la neige, terrifiée. Dans ses bras, un bébé. Derrière elle, des chiens affamés… Elle mettra au monde avant de mourir gelée son enfant prénommée Ariane.
Cette séquence initiale et tragique trouvera un premier écho en couverture du premier tome de « Plume au vent » en 1995 : cette fois-ci, c’est Ariane elle-même qui s’élance au travers d’une autre forêt enneigée, épée déjà ensanglantée à la main, afin de retrouver sa liberté et de venger son honneur. Ceci alors que ses aventures précédentes l’ont traumatisée (on la redécouvre d’ailleurs dans un asile en début de récit) et qu’on a subtilisé sa petite fille (Ninon), faible enfant à peine né et cependant promis à la mort par ceux, riches et puissants, qui désirent l’abandonner dans la forêt. « Quinze après » poursuit donc la boucle du Destin, en faisant un clin d’œil à tout un genre romanesque et cinématographique (le roman de cape et d’épée, dont « Les Trois Mousquetaires » (1844) et sa première suite, « Vingt ans après » (1845), œuvres inaltérables d’Alexandre Dumas). En couverture, nous retrouvons les ingrédients précités, soigneusement recomposés : la ville de Paris enneigée et la Seine figée remplacent la forêt, dont un arbre dénudé (rajouté dans la version finalisée de la couverture) subsiste encore pour indiquer l’embranchement supplémentaire offert par ce nouveau tome.
La chevauchée d’Ariane, plus solitaire que jamais, traduira autant la rigueur des temps que le caractère farouche et indépendant de cette héroïne – à la fois historiquement Moderne et Contemporaine, entre XVIIème et XXIème siècles – digne du rôle incarné par Sophie Marceau dans « La Fille de d’Artagnan » (B. Tavernier, 1994). A suivre dans le volume suivant, où Ariane recherchera… son autre enfant. Un certain Jean-Baptiste Poquelin, né lui aussi dans l’atmosphère enneigée du mois de janvier 1622.
Philippe TOMBLAINE
« Les Sept Vies de l’Épervier – Troisième époque T1 : Quinze ans après » par André Juillard et Patrick Cothias
Éditions Dargaud (13,99 €) – ISBN : 978-2205070484