Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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L’italien Matteo est un excellent dessinateur qui n’a, hélas, pas pu encore être reconnu comme tel avec ses pourtant remarquables quatre tomes de « Mèche rebelle » (scénarios de Zidrou chez Dupuis), dont les deux derniers ont été publiés sous le nouveau titre de « ProTecto », sans plus de succès.
Après avoir décroché un diplôme en architecture, il commence à travailler comme décorateur (particulièrement sur des décors en trompe-l’oeil) tout en livrant quelques illustrations au magazine transalpin Il Messaggero dei Ragazzi et pour l’éditeur américain Boyds Mills Press, à partir de 1998. Il collabore ensuite à l’édition de manuels et livres scolaires, se spécialisant surtout dans les dessins historiques pour les éditions italiennes Mondadori Scuola, Carlo Signorelli Editore ou Einaudi Ragazzi. C’est aussi à cette époque qu’il publie ses premières bandes dessinées dans le magazine italien Schizzo, avant de rencontrer Zidrou (en 2000) qui lui propose d’illustrer son premier scénario réaliste : « Mèche rebelle », publié dans Spirou à partir de 2003 !
Outre quatre autres pages dans Spirou où il nous propose une « Petite histoire de la bande dessinée en Italien » écrite par Sergio Salma en 2006, on ne le retrouvera qu’en 2009 : au sein du deuxième tome du collectif « Vampyres » chez Dupuis ; pour un récit de 24 pages constituant sa première collaboration avec Alcante (alias Didier Swysen, scénariste de plus en plus prisé, de ses débuts sur « Pandora Box » jusqu’à ses contacts récents avec Jean Van Hamme qui l’a choisi pour adapter son feuilleton télévisé « Rani » en bandes dessinées et pour réaliser un « XIII Mystery », où il mettra en scène le colonel Amos qui sera dessiné par François Boucq ; sortie prévue en 2011) et, certainement, la meilleure nouvelle de ce collectif trop inégal !
Toujours est-il que Matteo retrouve Alcante pour cette démoniaque histoire d’un jeune manchot, assistant d’un gardien de phare sur les côtes du Pays de Galle, là où, la nuit du 25 octobre 1859, pratiquement tous les passagers du Royal Charter se noyèrent… : fort bien narré et mis en images, ce récit nous rappelle les horrifiques EC Comics qu’éditait William Gaines pendant les années 1950 (« The Haunt of Fear », « The Vault of Terror », « Tales from the Crypt »…) ou encore la collection « Hanté » récemment lancé par Christophe Bec aux éditions Soleil. Bref, 55 pages (et un dossier très illustré sur la naissance de cette histoire) à l’ambiance satanique où l’on apprend, entre autres, que, selon leur situation sur la terre ferme, sur une île ou en pleine mer, les gardiens de phare sont classés en trois catégories : les paradis, les purgatoires et… les enfers !
Gilles RATIER
« Les Gardiens des enfers » par Matteo et Alcante
Éditions Glénat (13 Euros)