Vivant depuis 25 ans avec Tanie — qui est aveugle d’un œil et qui, en conséquence, doit se démener tous les jours pour s’adapter de son mieux aux charges du quotidien —, le dessinateur et scénariste Marc Cuadrado a repris ses crayons pour nous expliquer comment sa courageuse femme fait face à sa déficience visuelle. Pour l’occasion, cet adepte du style gros nez — « Norma » chez Casterman et « Parker & Badger » chez Dupuis ou « Je veux une Harley » pour Frank Margerin chez Fluide glacial et Dargaud (1) — renoue avec la discipline graphique qu’il avait abandonnée depuis une dizaine d’années : passant à autre trait, plus semi-réaliste, où sa plume se fait alors tendre et émouvante… même s’il insuffle toujours sa lumineuse touche d’humour personnelle !
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Décidément, en ce moment, sur bdzoom, il n’y en a que pour Thierry Gloris !?
Il est vrai que ce jeune scénariste fait, en effet, partie de cette nouvelle génération de narrateurs feuilletonistes (on pourrait citer aussi Alcante, Laurent Galandon, Joël Callède, Cédric Rassat, Dobbs, Jérôme Félix…) qui ont su tirer les leçons de leurs prédécesseurs (les Charlier, les Greg et les Van Hamme) en renouvelant ce genre encore si décrié aujourd’hui, surtout en pleine période de valorisation de la bande dessinée comme média mature… En plus, quand ces brillants raconteurs d’histoires prennent aussi le risque de se mettre en danger, comme c’est le cas pour Thierry Gloris ici, en sortant de leur terrain de prédilection (l’aventure sous toutes ses formes), ils ne peuvent, bien évidemment, qu’attirer notre sympathie…
« Ainsi va la vie » est une espèce de roman graphique aux allures de manga qui raconte, pendant 132 pages, l’histoire d’un petit groupe de six amis, « adulescents » trentenaires nés dans les années 80 ou 90, qui se revoient, tous les ans, à la même date. Seulement voilà, ils ne vivent pas tous de la même façon l’approche de la date de ce qui sera, pour eux, leur dernier rendez-vous : et oui, le temps passe…, et chacun a sa vie, son boulot et sa part d’emmerdements…
Avec ce récit contemporain à la narration non linéaire (qui nécessite donc une attention soutenue), Thierry Gloris prouve donc, une fois de plus, qu’il fait partie des scénaristes à vraiment suivre de très près… ; ceci grâce à l’efficacité de ses dialogues et à la lisibilité de sa mise en scène. Quant à Frédéric Charve, dont c’est le premier album, il fait preuve d’un évident savoir-faire graphique et sort son épingle du jeu même si son trait ressemble beaucoup à tout ce qui se fait aujourd’hui dans ce style chez KSTR, Ankama, Les Humanos et autres labels prônant une nouvelle manière de mettre les cases en images, entre blog et manga…
Gilles RATIER
? Ainsi va la vie ? par Frédéric Charve et Thierry Gloris
Éditions Drugstore (17 Euros)