Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« L’Envolée sauvage » T4 (« La Boîte aux souvenirs ») par Hamo et Laurent Galandon
« La Boîte aux souvenirs », quatrième volet de cette série historique largement remarquée, clôt le second cycle du récit. Celui-ci se déroule durant les années brunes de notre histoire, dans une France occupée par les Allemands et déchirée entre ceux qui résistent à l’occupant et ceux qui font preuve d’un zèle meurtrier.
Nous y retrouvons les deux jeunes héroïnes, Ada et Luçja, devenues Camille et Alice, qui ont dû quitter leurs parents et fuir pour éviter la déportation et la mort. Elles ont trouvé un temps une paix relative chez l’exemplaire Berthe. Mais l’étau se resserre et les deux fillettes doivent repartir pour gagner la zone libre et trouver refuge chez les Zimmerman, où vivent déjà plusieurs autres enfants.
Leur répit est de très courte durée car le vent mauvais les rattrape alors qu’elles tentent de gagner la Suisse. Elles sont séparées ; Ada, arrêtée par les miliciens, est déportée. Elle n’est plus qu’un matricule, 296349. Un seul espoir la maintient debout, celui de retrouver un jour sa petite sœur perdue.
Cet album est d’une tonalité plus sombre que les trois premiers puisque Ada, la plus âgée des deux sœurs, est déportée à Auschwitz. Cependant, Hamo et Laurent Galandon évitent les écueils du trop spectaculaire et du sensationnel. Les images du camp et des déportées sont à la fois sobres et éloquentes, à l’instar des trois vignettes de la page 35 où l’on voit la transformation du visage d’Ida.
Cependant, le récit est émaillé de notes plus légères, de petits moments de joie grâce auxquels les personnages peuvent oublier un peu l’angoisse et l’incertitude qui les rongent. Ce sont, par exemple, les instants où Ida, « la meilleure conteuse du monde » selon sa sœur, raconte à son jeune public fasciné la forêt du temps qui passe. Cette forêt trompeuse vole les souvenirs de ceux qui ne font pas assez attention, leur enlevant leur histoire et leurs souvenirs et les transformant en sans-nom avant l’effacement total.
La survie est aussi à ce prix : garder quelque part intacte la boîte à secrets, où l’on enferme les espoirs et les souvenirs des temps plus doux.
Nous l’avons déjà dit, « L’Envolée sauvage » est décidément une très bonne série, sensible et intelligente et ce dernier tome le montre une fois encore.
 Catherine GENTILE
« L’Envolée sauvage » T4 (« La Boîte aux souvenirs ») par Hamo et Laurent Galandon
Éditions Bamboo (13,90 €) – ISBN 978 2 889 2408 2