Saviez-vous qu’en 1916, à Unicoi (comté de l’État du Tennessee, aux États-Unis), une éléphante prénommée Mary a été condamnée à mort et pendue à une grue pour avoir écrasé la tête du dresseur qui la battait ? Eh oui, en Amérique, à cette époque-là, on ne rigolait pas avec la loi, même en ce qui concernait les animaux à qui ont accordait, suivant la croyance populaire, une conscience morale. La plupart d’entre eux devant alors être exécutés, il y aurait eu, d’après l’excellent narrateur et dessinateur David Ratte (1), des bourreaux assermentés qui devaient parcourir tout le pays pour appliquer la sentence suprême à ces bestioles assassines, à la suite de décisions issues des procédures fédérales. C’était d’ailleurs le métier du jeune Jack Gilet : un type un peu paumé qui aimait tellement les animaux qu’il ne voulait pas qu’on les abatte comme des bêtes…
Lire la suite...« Temudjin » Antoine Carrion et Antoine Ozanam
Temudjin : c’est le nom d’un enfant qui naît sous une yourte mongole en des temps aussi incertains que les frontières du désert de Gobi, en enfant né d’une copulation entre une femme et un loup démoniaque, semble-t-il. Le chaman Ozbeg est là pour mettre au monde ce fils qui pourrait bien faire « les beaux jours des conteurs pour des siècles et des siècles ». Mais non, ce n’est pas Genghis Khan, même s’il en a le prénom, enfin pas tout à fait…
La mère ne survit pas à la naissance et le Chaman prend l’enfant sous son aile, d’autant que ce gamin a le pouvoir de jouer avec les esprits ! Ce n’est pas une surprise pour le vieil homme, il a vu l’avenir de Temudjin dans ses rêves. Dès lors, il va tout faire pour l’aider à accomplir sa fabuleuse destinée. Des esprits de plus en plus nombreux animaliers et monstrueux accompagnent l’enfant élu mais Temudjin ne devient pour autant un chaman. Il doit faire ses preuves, subir l’initiation de la vie, grandir tout simplement, se poser des questions, choisir aussi, choisir ce destin ou le refuser et être libre.
Ils errent tous deux dans une Mongolie intemporelle où la magie a encore des droits comme celui pour l’enfant de combattre un ours avec sa seule pensée (mais on reconnait les yourtes millénaires, les temples bouddhistes ou l’ancienne capitale Karakorum, pages 31 ou 71). Au fil des jours et des années, le vieil homme raconte des histoires à Temudjin, le prépare à prendre sa place, à sa mort prochaine. Bientôt, Temudjin se retrouve seul et découvre l’amour d’une femme très particulière, l’Esprit de l’arbre, qui va désormais l’accompagner partout, mais de l’intérieur - c’est une voix qui le conseille – ! S’ensuit l’initiation proprement dite, l’adversité, les combats, la haine, l’humiliation, l’abandon… Mais une idée en tête : réunifier les clans et en devenir le chef, le khan ! Et peut-être faire la guerre pour pacifier !
Cette quête venue du fond des âges est admirablement mise en images par Antoine Carrion dont le trait sec est rehaussé de couleurs qui donnent de l’épaisseur à ses personnages et de la profondeur à ses décors. Les scènes oniriques sont quant à elles tout simplement exceptionnelles. Aux 84 pages de bande dessinée s’ajoute en outre un texte agrémenté de croquis et dessins inédits qui clôt le récit.
Alors, bon voyage ! …
Didier QUELLA-GUYOT ([L@BD->http://www.labd.cndp.fr/] et sur Facebook).
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« Temudjin » Antoine Carrion et Antoine Ozanam
Éditions Daniel Maghen (18, 50 €) – ISBN : 978-2-356746-025