Vivant depuis 25 ans avec Tanie — qui est aveugle d’un œil et qui, en conséquence, doit se démener tous les jours pour s’adapter de son mieux aux charges du quotidien —, le dessinateur et scénariste Marc Cuadrado a repris ses crayons pour nous expliquer comment sa courageuse femme fait face à sa déficience visuelle. Pour l’occasion, cet adepte du style gros nez — « Norma » chez Casterman et « Parker & Badger » chez Dupuis ou « Je veux une Harley » pour Frank Margerin chez Fluide glacial et Dargaud (1) — renoue avec la discipline graphique qu’il avait abandonnée depuis une dizaine d’années : passant à autre trait, plus semi-réaliste, où sa plume se fait alors tendre et émouvante… même s’il insuffle toujours sa lumineuse touche d’humour personnelle !
Lire la suite...« Dent d’ours » T1 (« Max ») par Alain Henriet et Yann

Que voilà un début de série d’aventures brillant, mêlant avec justesse action, émotion et espionnage…
Aux origines était « Buck Danny », série d’aviation bien connue dont le prolifique et talentueux scénariste Yann voulait raconter la jeunesse du héros. Ayant particulièrement apprécié l’aspect technique de l’encrage très « années cinquante » – particulièrement sur les véhicules et les personnages – d’Alain Henriet sur «Damoclès », un excellent thriller écrit par Joël Callède chez Dupuis, il contacte ce dessinateur pour illustrer son projet d’histoire d’aviation.
Henriet, séduit par le scénario, accepte d’emblée, même s’il ne connaît pas grand-chose à l’aéronautique et s’il n’a jamais lu, auparavant, les aventures de ce pilier du journal Spirou mis en lumière par les talents conjugués de Jean-Michel Charlier et Victor Hubinon : hélas, l’entreprise, pourtant enthousiasmante, ne se concrétisera pas. Du coup, Yann recycle son propos (l’héroïne de « Dent d’ours », Hanna Reitsch, n’est autre que le personnage ayant véritablement existé qui a inspiré Charlier pour la création de Lady X, l’ennemie favorite de Buck Danny) et lui propose un autre récit se passant à la même époque.
Formidablement bien documenté, car secondé par des spécialistes du sujet, Alain Henriet fait merveille dans la représentation précise des uniformes, engins et autres accessoires datant de la Seconde Guerre mondiale, exigée par le scénario palpitant et jamais manichéen de Yann. On notera, notamment, l’efficace travail effectué sur la lisibilité, tant sur le plan illustratif et narratif que sur les couleurs légèrement soutenues d’Usagi, pour cette histoire mettant en scène trois enfants passionnés d’aviation, dans les années 1930 ; les différents intervenants étant aussi à l’aise sur la partie liée à l’enfance des trois protagonistes que sur celle du conflit guerrier.
Max, Werner et Hanna se sont promis de voler ensemble et de toujours rester unis. Malheureusement, ils vivent en Silésie, région autrefois indépendante avant d’être annexée par la Pologne, puis par l’Allemagne nazie, et à ce moment-là, les instructeurs des écoles de vol sont allemands. Max, seul Juif du trio va se voir interdit de voler en planeur, et cela va briser ses rêves aériens. On le retrouvera pourtant, quelque part au milieu du Pacifique, en octobre 1944, aux commandes d’un Corsair américain pour combattre les kamikazes japonais : mais alors qu’il est en passe de devenir un as des combats dans les Marines, son passé le rattrape…
Gilles RATIER
« Dent d’ours » T1 (Max) par Alain Henriet et Yann
Éditions Dupuis (13,99 €) – ISBN : 978-2800157221