« Sankarea » T 1 par Mitsuru Hattori

Encore une histoire de zombie diront certains ! Ils n’ont pas tort, ce thème est à la mode depuis que le comics « Walking Dead » casse la baraque. Pourtant, ce manga, comme c’est souvent le cas, ne fait que surfer sur cette mode, sans en suivre ses codes. Mitsuru Hattori se détache du genre pour faire une histoire à la fois divertissante et décalée.

Chihiro Furuya est un collégien amateur de culture zombie. Il a vu tous les films de morts vivants, du plus sage au plus crade. Il les connaît par cÅ“ur. À côté de ça, il collectionne tout ce qui se rapproche, de prêt ou de loin, à ces êtres en putréfaction : figurines, posters, porte-clefs, capsules de bouteille, etc. Son lycée est séparé de celui des filles qui se trouve sur l’autre berge du fleuve. Là-bas, il y a la plus belle fille du coin, Réa Sanka. Malheureusement, c’est la fille du proviseur. De ce fait, elle est inaccessible. Son père se comporte en vrai tyran, voire en pervers, avec elle. À un tel point qu’elle fait régulièrement le mur pour aller crier sa rage et son désespoir dans un terrain vague à côté d’un immeuble délabré. C’est ici que, la nuit, Chihiro tente des expériences étranges sur son chat mort. Il essaie de créer une mixture à base de plante pour le ressusciter. Cela fait presque une semaine qu’il s’acharne. Malheureusement, il lui manque un ingrédient indispensable. Une fleur vénéneuse dont il n’arrive pas à déchiffrer le nom dans son vieux grimoire abîmé. Sanka pense connaître cette fleur, un simple hortensia. Décidée à aider ce jeune garçon, elle lui fait promettre de s’occuper d’elle après sa mort en la faisant devenir un zombie. Bien évidement, elle va arriver à ses fins, nous le savons des les premières pages de ce manga, mais il est amusant de voir comment cette transformation est arrivée et, surtout, quels en sont les conséquences.

Aujourd’hui, écrire une histoire originale sur des zombies tient de la gageure. Pourtant « Sankarea » est à la fois extrêmement original et divertissant. Le scénario est particulièrement bien construit et il a très peu de temps morts. Les deux héros sont complètement décalés et à l’opposé l’un de l’autre. Le garçon, Chihiro Furuya, n’a de goût que pour les zombies et, pour lui, la fille idéale serait à la fois morte et bien vivante. Pourtant, il ne fait pas partie d’un mouvement gothique, ne s’habille pas en noir et ne se maquille pas à outrance. Il ressemble juste à un jeune bien élevé, mais vivant avant tout dans son monde. Quant à la fille, Sanka Rea, elle est issue d’une famille se pensant d’un rang supérieur, alors que son père n’est que le proviseur d’un lycée. Du coup, elle est brimée et ne semble pas pouvoir vivre une vie d’adolescente normale. Ses goûts sont assez basiques, elle ne rêve que de sortir faire les courses, visiter les musées, aller au parc d’attractions et, bien évidemment, voir des films de zombies depuis qu’elle a rencontré Chihiro.
L’auteur joue à fond sur ce décalage, mais également sur les clichés du genre Zombie et romance confondu. Et comme c’est bien amené et bien structuré, ça marche. On rentre très facilement dans le monde de ces deux jeunes et, de temps en temps, on se surprend à les comprendre.

Côté graphisme, ce manga ne peut pas cacher son origine. Les dessins utilisent tous les stéréotypes de la BD japonaise. Les yeux sont démesurés, les cheveux en bataille et les filles longilignes. Le fan service est également présent, mais est utilisé avec parcimonie. Ce n’est pas une débauche de décolletés ou de culottes envahissant chaque case. Il faut que cela serve l’histoire et leur intégration est vraiment réussie. Il est peut-être étrange de noter cela d’un manga sur les morts, mais le dessin est réellement plein de vie. Les attitudes sont bien trouvées et impossible de confondre les différents protagonistes. Par contre, peu de décors, l’humain prime…, et de préférence en gros plan.

Mitsuru Hattori est déjà connue en France pour son manga « Umishô » édité chez Pika. « Sankarea » en est très éloigné, aussi bien dans le fond que dans la forme. Beaucoup moins farfelu et avec un humour plus fin, moins tape-à-l’oeil. Comme je l’ai déjà précisé, l’histoire joue peu sur le côté voyeur et fan service. Le fait que « Umishô » parle de natation, offre il est vrai, bien plus d’opportunités à l’auteure pour montrer des corps de jeunes filles dans des angles avantageux. « Sankarea » n’est pas dans ce cas et le héros est loin de paraître stupide. Les filles, de leur côté, ont un rôle bien plus intéressant et très éloigné de la bimbo nunuche et écervelée, courante dans les mangas.

« Sankarea », c’est avant tout une comédie romantique, avant d’être une histoire de morts-vivants. Nul besoin de maîtriser la culture zombie pour apprécier le ton de ce manga. Les codes utilisés sont tout ce qu’il y a de plus conventionnel. Ils font aujourd’hui partie de l’inconscient collectif. Rien de bien effrayant non plus, les morts ne sont pas réalistes avec les entrailles pendantes. Les plus jeunes, voir les plus sensibles ne feront pas de cauchemars suite à sa lecture.

Si vous cherchez un titre de zombies sortant des sentiers battus, tout en restant très conventionnel dans la forme, « Sankarea » est fait pour vous. Vivement avril 2013 pour la suite qui promet d’être encore plus surprenante. Pour le moment, sept tomes sont disponibles au Japon et une adaptation en série animée existe également.

Gwenaël JACQUET

« Sankarea » T 1 par Mitsuru Hattori
Éditions Pika (6,95 €) – ISBN : 9782811610708

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