Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...PLUS DE LECTURES DU 15 SEPTEMBRE 2008
Notre sélection hebdomadaire : ? Miss Pas Touche T.3 : Le prince charmant ? par Kerascoët et Hubert, ? Un après-midi un peu couvert ? par Philippe Squarzoni, et ? Le protocole du tueur T.2 : Mortel souvenir ? par Denis Falque et Didier Convard.
? Miss Pas Touche T.3 : Le prince charmant ? par Kerascoët et Hubert – Editions Dargaud (10,40 Euros)
Après un délicieux diptyque mélangeant allégrement les poncifs de l’enquête policière, de la chronique sociale et du feuilleton populaire, le scénariste Hubert (également connu pour son excellent travail de coloriste) et le couple qui se dissimule sous le pseudonyme de Kerascoët (Marie Pommeguy et Sébastien Cosset) reprennent en main la destinée de cette mignonne provinciale : vierge de son état, elle s’était infiltrée dans une maison close luxueuse pour y découvrir, à l’origine, les meurtriers de sa sœur. Et les auteurs ne donnent absolument pas l’impression de tirer sur la corde en remettant en selle leur naïve héroïne, réussissant, une fois de plus, à évacuer tous les écueils des différents genres narratifs utilisés. Toujours pensionnaire du somptueux lupanar parisien qu’est Le Pompadour, « Miss Pas Touche » s’est spécialisée dans le fouettage, dominant ses clients tout en préservant sa virginité. Alors que sa mère, une harpie alcoolisée, débarque dans la capitale pour rejoindre sa fille, voilà que la jeune candide rencontre l’amour en la personne d’un blondinet de la haute, séduit par le côté « pas touche » de l’ingénue. Evidemment, on sent que le drame va arriver mais on n’en est pas encore là , le scénario sophistiqué privilégiant l’ambiance de l’époque avec ses paramètres sociaux complexes (puritanisme, hypocrisie sociale…) ; du moins dans ce premier tome illustré dans un style graphique léger, de plus en plus épuré, et qui participe à l’entière lisibilité de l’ensemble.
? Un après-midi un peu couvert ? par Philippe Squarzoni – Editions Delcourt (14,95 Euros)
Un jeune bibliothécaire parisien rend une brève visite à sa compagne ornithologue, en pleine mission de surveillance, sur une île bretonne imaginaire : l’une des plus importantes réserves d’oiseaux de mer de l’hexagone. Resté seul le temps d’un après-midi, le citadin amoureux part en balade : profitant de son exploration du site, il met à jour les tensions et les contradictions socio-économiques des îliens dont la vie est rendue encore plus complexe depuis une affaire de pédophilie qui a divisé ces habitants reclus sur eux-mêmes… Avec cette fiction presque sentimentale, Philippe Squarzoni délaisse les manifestes altermondialistes et les reportages dessinés qui ont fait sa réputation (« Garduno, en temps de paix », « Zapata, en temps de guerre », « Torture blanche », « Dol »…). Pourtant, même s’il essaie ici de lorgner ici du côté des récits contemplatifs du japonais Jirô Taniguchi, son engagement revient au galop, puisqu’il aborde les faux avantages du tourisme, les rivalités entre pêcheurs et agriculteurs, les problèmes posés par le vieillissement de la population… Son discours moins didactique, et plus subtil qu’à l’accoutumée, est illustré par un dessin plus sensible, moins rigide, qui s’inscrit dans un beau gaufrier en bichromie. Au bout du conte… : une perle de plus à mettre au profit de la toujours intéressante collection « Mirages » des éditions Delcourt !
? Le protocole du tueur T.2 : Mortel souvenir ? par Denis Falque et Didier Convard – Editions Glénat (9,40 Euros)
Le premier tome de ce diptyque (décidément, la formule est à la mode puisqu’elle se propage de plus en plus dans le monde de la BD, les scénaristes se rendant compte qu’il est très difficile d’écrire une histoire vraiment intéressante en seulement 46 planches) nous avait déjà énormément séduits ; et cette deuxième partie finit de nous convaincre de l’intérêt de cette nouvelle série policière… Un notable, député-maire briguant un poste au gouvernement, est directement concerné par le dernier assassinat d’un meurtrier en série surnommé « Le tueur à la ficelle » : en effet, la victime était sa maîtresse. Afin d’éviter tout scandale, il s’en réfère à un ami officier de police, lequel n’hésite pas à escamoter une pièce à conviction pour le protéger. Le policier se rend alors compte que le premier magistrat de la ville l’a manipulé. C’est alors que la fille de celui que tout accuse est kidnappée par un jeune maître chanteur qui cherche à se venger… Par de nombreux petits retours explicatifs dans le passé, maître Convard, décidément en pleine forme manipulatrice, nous apporte brillamment la lumière sur cette énigme passionnante, faisant, comme d’habitude, preuve d’efficacité et de subtilité. Mettons également en avant la fine mise en images de Denis Falque, lequel est en constante évolution : son graphisme réaliste étant vraiment de plus en plus minutieux et convaincant !
Gilles RATIER