Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« 5 Ronin » par Peter Milligan & co
Tout en abordant la rentrée, je vous propose jusqu’à mi-septembre de revenir sur quelques albums Panini Comics que je n’avais pas chroniqués ces derniers temps à cause d’un grand nombre d’ouvrages intéressants parus chez les autres éditeurs, et aussi par lassitude face à la récente production Marvel relayée par Panini Comics, nettement en baisse qualitative… Depuis « Secret Invasion », Marvel pédale un peu dans la semoule, mais ce n’est pas une raison pour ignorer certains albums publiés en VF cette année.
Le procédé n’est plus nouveau, maintenant, mais depuis quelque temps il s’accélère et se multiplie. Je parle bien sûr de la réinvention des super-héros Marvel à des époques antérieures au Silver Age. Le « 1602 » de Neil Gaiman reste la référence en la matière, envisageant à quoi auraient ressemblé les X-Men, Spider-Man, Nick Fury, Docteur Strange ou encore Fatalis, Magneto et les Quatre Fantastiques au début du XVIIe siècle. Récemment, il y eut l’émergence de la vague « Noir » qui plonge les super-héros du Silver Age en plein Golden Age, dans une ambiance de polars des années 30, et même un « Deadpool » version pulp situé dans les années 50. Un retour dans le temps moins impressionnant, certes, mais qui dénote d’une vraie tendance s’expliquant en partie par l’acharnement avec lequel Marvel veut étendre son univers afin de maintenir l’excitation de son lectorat et gagner de nouveaux fans. Une boulimie de renouvellement qui a même parfois mis en cause l’univers Ultimate jugé moins rentable que prévu après une décennie d’existence. Une course à la nouveauté assez peu raisonnable et qui peut se retourner contre la Maison des Idées (la succession ininterrompue de crossovers monumentaux ces dernières années ont fini par lasser une partie des lecteurs, et le fameux « Spider-Man : Brand New Day » a été beaucoup moins bien accueilli que prévu par un public qui s’est questionné à juste titre sur le bien-fondé et la nécessité d’un tel remaniement faisant table rase de tout ce qu’avaient connu les fans). À force d’envisager les futurs possibles et les réalités parallèles, Marvel s’essouffle, et la voie du passé est apparue comme une nouvelle donne très prometteuse. Ou comment aller de l’avant en retournant en arrière… Autres variantes participant du même mouvement : on a fini par projeter les véritables origines de Wolverine au XIXe siècle, et l’on apprend dans « Immortal Iron Fist » que Daniel Rand n’est pas le premier homme au poing de fer, puisque pas moins de 75 Iron Fist ont existé depuis le XIIIe siècle…
Dans « 5 Ronin », le scénariste britannique Peter Milligan plonge 5 super-héros Marvel dans le Japon du XVIIe siècle. L’idée de Milligan, contrairement à Gaiman pour « 1602 », est de ne pas doter ces personnages de leurs super-pouvoirs connus : ici, ils ne sont que de simples ronin (un ronin est un samouraï sans maître). Wolverine, Hulk, Le Punisher, Psylocke et Deadpool, chacun dans leur épisode respectif, vont voir leur destin se croiser de près ou de loin autour de la figure d’un puissant daïmio (seigneur) qui est la source de leur malheur. Aucun surhumain, donc, mais des personnages recréés selon Milligan en n’en gardant que la nature profonde. Ainsi, Hulk ne devient pas un géant vert sous l’effet de la colère, mais voit sa rage se décupler au point d’apparaître comme un monstre meurtrier aux yeux des autres. Le calme que doit garder Bruce Banner pour se contrôler et ne pas se transformer en Hulk est ici transposé en méditation zen que doit pratiquer le ronin pour ne pas laisser éclater sa colère contre l’oppresseur. Le pouvoir autoguérisseur de Wolverine est décliné en l’existence de ronin multiples, frères qui donnent l’illusion que le héros ne peut jamais mourir. L’un d’entre eux est muni de « bracelets à griffes en acier », mais ce sera bien le seul artifice de l’album faisant un lien explicite avec les super-héros connus. De même, l’histoire dramatique de Frank Castle – alias Le Punisher – est transposée dans ce Japon du passé, et le pouvoir psy de Psylocke devient une intuition remarquable. Deadpool, quant à lui, est un ronin qui semble bien entendu avoir perdu l’esprit… Cette transposition sans super-pouvoirs est assurément le point fort de cette Å“uvre qui – sans être inoubliable – constitue une expérience intéressante, classique et originale à la fois. Milligan a su éviter les clichés les plus évidents pour trouver une vérité de ton alliant toutes les valeurs qui ont forgé l’âme ancestrale du Japon, du code d’honneur samouraï à la méditation. Chaque épisode est dessiné par un artiste différent : Tomm Coker, Dalibor Talajic, Laurence Campbell, Goran Parlov et Leandro Fernandez. Mention spéciale à Coker pour Wolverine et Campbell pour Le Punisher, avec de somptueux dessins noirs. Parmi les variant covers proposées par l’éditeur, j’ai choisi celle – sublime – de David Mack pour « 5 Ronin : Psylocke ».
Cecil McKINLEY
« 5 Ronin » par Peter Milligan & Tomm Coker, Dalibor Talajic, Laurence Campbell, Goran Parlov et Leandro Fernandez Éditions Panini Comics (13,20€) – ISBN : 978-2-8094-2350-1
je suis heureuse de la connessonsse de tes livers ………………………………………………………….. merssi