Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Hellboy » T12 (« La Fiancée de l’enfer ») par Mike Mignola & co
Attention, mes anges, Hellboy est de retour ! Déjà douzième volume consacré à notre colosse écarlate préféré chez Delcourt, avec au programme des artistes aussi prestigieux et talentueux que Richard Corben, Scott Hampton et Kevin Nowlan. Un très très bon moment de lecture, comme toujours…
Ce nouveau tome de « Hellboy » contient six histoires de longueurs diverses, pour moitié dessinées par l’irremplaçable Corben (ce qui est toujours un bonheur !). Ces nouveaux épisodes dessinés par Corben, très réussis, sont techniquement intéressants en ce qui concerne la couleur : en effet, on se rend bien compte en les lisant combien Dave Stewart a travaillé pour que sa mise en couleurs colle à l’esthétique de Corben, selon les ahurissants veloutés que l’artiste a mis en place depuis des décennies. C’est toujours appréciable de constater qu’un coloriste ne se contente pas de remplir des vides mais qu’il travaille en accord avec l’esprit de l’auteur. Cela saute aux yeux lorsque l’on compare la mise en couleurs que Stewart a faite pour Corben avec celle réalisée pour Scott Hampton, radicalement différente, quittant le granuleux souple pour les matières peintes. Esthétiquement, Scott Hampton apporte une belle rupture, entre deux épisodes de Corben, nous délivrant un récit d’une très grande puissance d’évocation, dans un style gothique, réaliste, à la fois peint et photographique, plus atmosphérique que dans le détail. Mignola n’apparaît en tant que dessinateur que dans une histoire courte, avant de laisser Kevin Nowlan clore l’album avec une histoire étonnante et brillamment illustrée par ce dessinateur trop rare. On comprend que Mignola ait été enchanté que Nowlan lui dessine une histoire de « Hellboy », lorsqu’on voit le résultat : c’est vraiment très chouette, à l’image de la superbe couverture qu’il a réalisée pour ce récit. Bref, ce douzième volume nous apporte notre lot de jouissances visuelles, dans un rythme et des variations très appréciables.
Vous le savez, Mignola explore le parcours de son héros de manière non linéaire, puisant dans diverses époques pour en tirer des tranches de vie, des événements qui ont jalonné le destin de Hellboy. Les histoires de cet album se situent dans les années 50-60, avec quelques incartades dans les années 80. Dans « Hellboy au Mexique », on découvre qu’en 1956 Hellboy a connu un moment de désœuvrement total alors qu’il était au Mexique, croisant la route de trois frères lutteurs de catch. Un contexte un peu inattendu qui fait mouche grâce au scénario malin de Mignola et aux dessins réjouissants de Corben. Dans « Le Double Visage du mal », Mignola nous emmène au cinéma avec les zombies pour voir deux courts-métrages : « La récompense de Sullivan » et « La Maison de Sobek », inspirés par Jean Ray et l’égyptologie. Dans « Les Endormis et les morts », Mignola intègre l’univers des vampires dans sa longue saga fantastique. Le style d’Hampton fait des merveilles dans ce contexte gothique au possible, rappelant les meilleurs récits fantastiques du 19ème siècle. Dans « La Fiancée de l’enfer », qui donne son titre à l’album, on revient au satanisme, aux Templiers, aux saints et aux démons, puissamment mis en images par Corben. « L’Héritage Whittier », très liminaire, est entièrement réalisé par Mignola, huit pages où l’auteur s’est encore une fois fait plaisir graphiquement. Enfin, « Buster Oakley voit son vœu réalisé » est certainement le récit le plus étrange de cet album, avec comme je vous l’ai dit précédemment un Kevin Nowlan au style impeccable, réalisant de surcroît ses couleurs lui-même. Un récit plus SF que fantastique, mais très bien venu !
Je ne peux finir cet article sans parler de la galerie de couvertures proposée dans cet album, des couvertures qui sont toutes des petits chefs-d’œuvre, notamment celles de Hampton et Nowlan. Un douzième volume qui ne fait donc que confirmer la qualité et l’intérêt de cette série mythique, même sur la longueur. Bravo, Mike !
Cecil McKINLEY
« Hellboy » T12 (« La Fiancée de l’enfer ») par Mike Mignola & co Éditions Delcourt (17,95€) – ISBN : 978-2-7560-2504-9