On vous a déjà dit tout le bien que l’on pensait de la saga ébouriffante, délirante et jubilatoire « The Kong Crew » d’Éric Hérenguel… (1) Or, voilà que les éditions Caurette sortent une très belle intégrale de luxe de la trilogie (224 pages, dans sa version originale en noir et blanc grisé et en français) : une incroyable épopée hommage aux comics, aux pulps et aux vieux films fantastiques des fifties ! Ceci alors que le tome 3, cartonné et en couleurs, vient aussi à peine de paraître chez Ankama… La totale en noir et blanc ou les trois volumes en couleurs, vous avez donc le choix ! L’essentiel étant de ne pas passer à côté de ces aventures follement drôles, débridées et imaginatives, sous couvert de fable épique et écologique !
Lire la suite...« Boule à zéro » T1 (« Petit Cœur chômeur ») par Serge Ernst et Zidrou
La maison de Zita est grande, très grande. Elle comporte des dizaines de chambres, de longs couloirs, des ascenseurs. Zita dit que, dans sa maison, il y a du personnel soignant et du « personnel soigné ». Elle habite au 6ème étage. La maison de Zita s’appelle l’hôpital La Gaufre et Zita fait partie du personnel soigné.
Zita va avoir 13 ans, mais on la pense plus jeune quand on la voit toute fluette dans son jogging rose. Ses cheveux sont tombés, aussi la surnomme-t-on affectueusement « Boule à zéro ». Elle souffre d’une leucémie coriace et vit à l’hôpital depuis neuf longues années. Sa mère ne vient presque jamais la voir et cela la fait souffrir, presque autant que sa maladie.
Pourtant, Zita n’est pas une enfant triste. Quand elle le peut, elle est toujours en mouvement, elle est vive, drôle, inventive. Elle connaît les moindres recoins de l’hôpital qu’elle arpente avec son baladeur rivé aux oreilles. Elle connaît aussi tout le monde, les malades, les médecins, les infirmières et les aides-soignants. Elle y est comme chez elle, même si elle préfèrerait être ailleurs, dehors, dans la vie « normale ». Elle aime tout particulièrement le docteur Semoun, un homme jovial un peu enrobé, avec lequel elle a passé un deal : « Je guéris, tu maigris ! ».
Lorsqu’on la découvre, Zita est très occupée. Elle prépare sa grande fête d’anniversaire qui aura lieu dans une salle de l’hôpital et elle donne ses invitations à tous ceux qu’elle aime : à Haroun, surnommé « Wilfrite » (parce qu’il s’est brûlé avec une friteuse), à « Supermalade », atteint d’une maladie que personne ne sait identifier, à « 90% coton », une vieille dame qui fait de la gymnastique, très doucement, au service gériatrie, à « Happy Papy », vieux gymnaste en fauteuil, à « Puzzle », une fillette souffrant de fractures multiples, à « Made in China », qui s’appelle en réalité Anaïs, même si elle est d’origine coréenne … Et puis, elle espère en secret que sa maman viendra. Mais elle ne le dit pas trop même si elle pleure quand elle est toute seule. Tout le monde aime Zita, dans cette maison hôpital. Car Zita aime la vie, aime ceux qui souffrent, comme elle. Mais parfois, elle a des pannes de cœur, qui se produisent lorsqu’elle est en manque d’amour. Mais son humour dévastateur et son style direct restent, pour l’instant, ses remèdes les plus efficaces …
« Boule à zéro » est un magnifique album qui s’adresse aux enfants, bien sûr, mais pas seulement. Il touchera un public très large.
Il traite d’un sujet grave, difficile : les enfants atteints de maladies incurables ou graves. Mais Ernst et Zidrou abordent ce thème de manière vraiment intelligente, drôle, sensible, sans jamais tomber dans la pesanteur. On aime les répliques savoureuses de Zita, sa manière directe d’aborder les gens, de dire ce qu’elle pense. Elle ne peut pas se permettre de mentir ou de faire semblant. La maladie dont elle souffre la rend à la fois fragile et très forte et l’on apprécie la façon qu’elle a de la combattre, chaque jour.
Certaines planches de l’album invitent à la réflexion, comme celle où l’on voit Zita assise sur son lit d’hôpital, en train de dialoguer avec Madame la Mort. D’autres suscitent une belle émotion, celles qui évoquent les pannes de cœur de Zita par exemple. D’autres, enfin, sont vraiment drôles, telle la séance de gym au service gériatrie.
Susciter l’émotion, la réflexion, la joie et la peine, c’est cela la vie, même lorsqu’elle semble menacée et fragile. Admirable.
Catherine GENTILE
« Boule à zéro » T1 (« Petit Cœur chômeur ») par Serge Ernst et Zidrou
Éditions Bamboo (10,40 €) – ISBN 978 2 8189 0900 3
Voir aussi www.bouleazero.com, notamment la page « 2000 BD » !
Ping : Bandes dessinées | La mare aux mots