Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Le Choix d’Ivana » par Tito
Le 21 juillet 2008, la ville de Sarajevo s’agite. Mais ce n’est pas le bruit des obus ou des balles des snipers qui résonnent cette nuit-là . Ce sont des cris de joie car la ville est en liesse et fête l’arrestation de Radovan Karadzic, après treize ans de cavale. L’homme a commandé les Serbes de Bosnie durant la guerre et il est accusé de génocide et de crimes de guerre pour avoir dirigé le siège de Sarajevo et le massacre de Srebrenica.
Ivana ne participe pas à la joie collective. Cette arrestation ravive en elle de douloureux souvenirs. Elle a une trentaine d’années et vit avec sa grand-mère. Elle se rappelle …
Elle se rappelle les premiers jours du siège de la ville et la mort de ses parents, tués, avec d’autres, par un tir d’obus le 27 mai 1992.
Elle se rappelle la douleur, la vie difficile, les privations, la faim et le froid.
Elle se rappelle les kilomètres à pied pour aller chercher de l’eau.
Elle se rappelle les miliciens serbes, croisés au détour d’un chemin, dont un qui fréquentait le même lycée qu’elle avant la guerre. Elle se rappelle le viol, la honte, la dévastation …
Alors Ivana prend une décision. Elle veut retrouver sa fille, Youlia, née de ce viol, qu’elle a confiée pour adoption à une association. Ses recherches l’entraînent vers l’Italie puis à Nancy. Elle y rencontre un couple qui a quitté Sarajevo après y avoir tout perdu. Ils l’hébergent, lui donnent du courage, l’aident. Que fera Ivana lorsqu’enfin, elle aura identifié sa fille ?
Avec ce nouvel album, Tito délaisse pour un temps sa « Tendre banlieue » pour s’intéresser à un pan très douloureux de l’histoire contemporaine. Il y évoque bien sûr des faits avérés et très précis. Mais il aborde l’Histoire sur un registre intimiste et réaliste avec un personnage de fiction, une jeune femme meurtrie et très attachante. On suit avec intérêt le chemin d’Ivana, dont les tourments, qu’elle a pu enfouir un temps, reviennent la hanter et la forcent à agir. Tito nous montre finement les hésitations et la douleur qui l’assaillent lorsqu’elle se retrouve enfin face à un choix. Le récit est mené tout en pudeur et en retenue. Ivana est un personnage magnifique, que l’on accompagne durant ces 64 pages, et qui ne laisse pas le lecteur indifférent. Même si ce récit n’est pas spécifiquement destiné aux adolescents, il pourra néanmoins les intéresser car il traite, hélas, d’un sujet universel, celui des femmes en temps de guerre. Il pourra aussi les éclairer utilement sur une période historique qu’ils ne connaissent pas, ou très mal. Pour toutes ces raisons, « Le Choix d’Ivana » est un bel album.
Le contexte de l’album, quelques faits :
Le siège de Sarajevo dure d’avril 1992 à octobre 1995. Il provoque la mort de 10 000 personnes et la destruction presque totale de la capitale de la Bosnie-Herzégovine.
Le procès de Radovan Karadzic, leader des Serbes de Bosnie, arrêté le 21 juillet 2008, débute le 31 juillet 2008, devant le Tribunal Pénal International Yougoslave (TPIY). Ce tribunal, mis en place par le Conseil de Sécurité de l’ONU, a pour mission de poursuivre et de juger les personnes coupables de violations graves du droit humanitaire sur le territoire de l’ex Yougoslavie, à partir du 1er juillet 1991.
Les travaux du TPIY auraient dû se terminer en 2010, mais les procès n’étant pas clos à ce jour, la date de fermeture du tribunal serait repoussée à 2014. Pourtant, certains pays, dont la Russie, plaident pour une fermeture en 2012.
Enfin, le viol en temps de guerre, est hélas une pratique très courante, à toutes les époques et dans tous les conflits de la planète.
« Au début des années 1990, c’est l’Europe qui devient le théâtre du viol comme arme de guerre. La Yougoslavie implose sous la pression des ultranationalistes. Le viol est pratiqué à grande échelle en Croatie et en Bosnie-Herzégovine. Les hauts responsables serbes bosniaques font ouvrir de camps militaires, les « camps du viol », par où transitent des dizaines de milliers de femmes livrées aux soldats, autant de fois nécessaires pour que la reproduction soit assurée. Elles sont ensuite maintenues en détention jusqu’au sixième mois de grossesse pour prévenir tout « accident dommageable » pour l’enfant. Aujourd’hui, ces femmes traumatisées parlent d’autant moins que leurs violeurs vivent librement à proximité de chez elles.
Le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), créé en 1993, reconnaît les violences sexuelles comme crimes de guerre. Douze hommes seulement ont été condamnés pour des violences sexuelles. Les victimes, jusqu’à présent, n’ont reçu aucune aide de l’Etat. »
(Source : http://blog.mondediplo.net)
(Source : http://blog.mondediplo.net)
Catherine GENTILE
« Le Choix d’Ivana » par Tito
Éditions Casterman (15 €) – ISBN 978 2 203 04118 9
bjr j’aimerai beaucoup vous présenter une de mes bande dessinée. je suis gabonais et je vis au Gabon.