Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...PLUS DE LECTURES DU 12 NOVEMBRE 2007
Notre sélection de la semaine : “ Pietrolino T.1 : Un cri d’espoir ” par Olivier G. Boiscommun et Alexandro Jodorowsky, “ Chroniques birmanes ” par Guy Delisle, et “ Zoo T.3 ” par Frank et Philippe Bonifay.
Cliquez sur l’appareil photo pour découvrir les couvertures des albums chroniqués.
“ Pietrolino T.1 : Un cri d’espoir ” par Olivier G. Boiscommun et Alexandro Jodorowsky
Editions Humanoïdes associés (10 Euros)
Petit texte rédigé, il y a une dizaine d’années, par le prolifique Alexandro Jodorowsky à l’intention du mime Marceau, «Pietrolino» est devenu une émouvante et onirique bande dessinée de 96 pages, réparties sur 2 albums, dont nous vous avions présenté en exclusivité les premières esquisses ; ceci grâce aux talents narratifs et graphiques d’ Olivier G. Boiscommun, épaulé par le célèbre scénariste et cinéaste chilien… Au milieu de la 2ème guerre mondiale et au cours d’une représentation dans un bar, un mime, qui s’accroche à sa liberté de penser, se fait briser les mains par des nazis n’appréciant guère son interprétation des combats. Trahi par le tenancier du troquet et par sa plantureuse compagne, il se retrouve dans un camp de travail en Allemagne, avec son fidèle compagnon de spectacle : un petit homme au physique ingrat, lequel est le véritable narrateur de ce récit poignant car il nous décrit tout ce que ressent le talentueux saltimbanque lorsqu’il joue. Ce mode de narration, volontairement elliptique, n’altère guère le fait que les sentiments et les expressions de visages soient remarquablement mis en images, avec un tel réalisme que l’on arrive parfaitement à se mettre dans la peau du personnage principal ! Par ailleurs, ce touchant conte dramatique est aussi un véritable message d’espoir… Le grand homme qu’était le mime Marceau aurait pu en être fier ; hélas, ce dernier n’a pas attendu la sortie de ce premier tome finement mis en images (et dont on attend la suite avec impatience) pour nous quitter.
“ Chroniques birmanes ” par Guy Delisle
Editions Delcourt (16,50 Euros)
Après ses expériences chinoises et coréennes, où il exerçait son métier d’animateur de dessins animés (qu’il a raconté dans les deux romans graphiques «Pyongyang» et «Shenzhen», deux classiques de la bande dessinée de reportage), le québécois Guy Delisle poursuit son petit tour du monde des régimes despotiques. Cette fois-ci, c’est du Myanmar (nouveau nom de la Birmanie, adopté par l’O.N.U. depuis 1989) qu’il a choisi de nous parler, bien avant que les manifestations des bonzes birmans mettent ce pays sous les feux de l’actualité, en septembre dernier. En effet, il est allé vivre un an à Rangoun, en plein territoire sensible, sous le régime de la junte militaire, pour suivre son épouse membre de Médecins Sans Frontières. Le couple découvre d’abord cette région, baignant dans une chaleur moite, derrière la poussette de leur bébé, rencontrant habitants, serpents, crapauds et chiens errants. Puis, par petites touches, l’auteur approche et effleure tous les ingrédients de ce dispositif dictatorial, qui existe depuis plus de quarante-cinq ans, enchaînant les saynètes cocasses de leur vie quotidienne : un témoignage tendre et lucide, mais sans complaisance…
“ Zoo T.3 ” par Frank et Philippe Bonifay
Editions Dupuis (14 Euros)
Cela faisait huit ans que nous l’attendions ! Voilà enfin ce troisième et dernier tome de «Zoo», émouvant récit où les protagonistes habitent un jardin zoologique plein d’humanité, transcendé par les magnifiques et envoûtants dessins semi-réalistes de Frank Pé. Anna, la femme sans nez, se dévoile être le cœur de l’histoire, partant à la recherche de Celestin qui a rejoint les soldats sur les champs de bataille de la Première guerre mondiale : la vie dans le petit paradis qu’il a créé n’étant plus la même sans lui… Ce dernier a préféré devenir le médecin des hommes plutôt que celui des animaux, mais il va payer de sa vie ce choix douloureux… Le scénario théâtral et tourmenté de Philippe Bonifay ne pourra qu’émouvoir le lecteur qui sentira aussi la passion du dessinateur pour ce sujet. D’autant plus que Frank est particulièrement à l’aise dans l’esthétique «début du XXème siècle» : il n’y a qu’à voir comment les animaux, qu’il dessine de façon remarquable, côtoient les architectures ornées de fer forgé et de serres… Bref, voici un chef-d’œuvre du 9ème art à ne pas rater !
Gilles RATIER