Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...PLUS DE LECTURES DU 11 JUILLET 2005
Pour ce dernier «Plus de lectures» avant la rentrée de septembre, nous vous avons sélectionné cinq bons albums à lire pendant vos vacances : “ Sandman T.3 : Domaine du rêve ” par Neil Gaiman et collectif aux éditions Delcourt, “ Prestige de l’uniforme ” par Hugues Micol et Loo Hui Phang aux éditions Dupuis, “ Galata T.1 : Le poète assassiné ” par Stefano Palumbo, Fred Le Berre et Alain Paris aux éditions Humanoïdes associés, “ Miki T.1 : Neuralithium ” par Anton et Serge Meirinho aux éditions Glénat et “ Le meilleur du Tour de France de René Pellos” par Jean-Michel Linfort aux éditions Vents d’Ouest.
“ Sandman T.3 : Domaine du rêve ” par Neil Gaiman et collectif
Editions Delcourt (12,50 Euros)
«The Sandman», le maître des rêves, est resté enfermé pendant 70 ans dans une cage de verre. Libéré, il entame alors une lente reconquête de son royaume. Cette série, glauque et insolite, a été créée aux USA (pour le label Vertigo de DC Comics), en 1988, par l’écrivain anglais Neil Gaiman et par les dessinateurs Sam Kieth et Mike Dringenberg, relayés ensuite par de nombreux graphistes comme Malcolm Jones III, Kelley Jones, Charles Vess et Colleen Doran (que l’on retrouve dans ce volume) ou encore Chris Bachalo, Michael Zulli, Vince Locke, P. Craig Russel, Bryan Talbot, Guy Davis et bien d’autres encore. Très éloignée des comics classiques, cette série, qui plonge ses protagonistes dans les rêves les plus fous, a d’abord été publiée, en version française, par le Téméraire, entre 1997 et 1999. Depuis 2003, les éditions Delcourt proposent une traduction plus littérale (due à Anne Capuron), alternant rééditions et inédits dans un joyeux désordre. Cependant, avec ce tome 3, les lecteurs français peuvent enfin lire, dans leur intégralité, tous les premiers épisodes de la série, lesquels sont déterminants pour la suite de ces cauchemars «lovecraftiens» qui ont participé au renouveau du fantastique en BD. Revisitant des thèmes aussi variés que ceux de la muse Calliope, des chats rêveurs, du «Songe d’une nuit d’été» ou de la mort comme personnage récurrent, les quatre contes oniriques et terrifiants de ce recueil ont connu un immense succès outre-Atlantique et ont contribué à la respectabilité de ce scénariste à l’imagination débridée.
“ Prestige de l’uniforme ” par Hugues Micol et Loo Hui Phang
Editions Dupuis (15 Euros)
Paul passe sa vie dans son laboratoire pharmaceutique où il s’est spécialisé dans l’étude des lichens, délaissant sa famille. Sa fille souffre de l’absence de son géniteur et développe de bien sombres pensées. Quant à sa femme, même si elle continue à le soutenir, elle se réfugie dans des pratiques sado-masochistes et le traite systématiquement de médiocre, les rares fois où ils arrivent à se parler. Car cet homme est corvéable à merci, toujours à la disposition de ses supérieurs… Jusqu’au jour où, par mégarde, il renverse, sur sa main, le produit sur lequel il travaille. Son corps se recouvre alors d’une pellicule qui ressemble à du lichen : et voilà que son physique s’améliore, que son intelligence s’aguerrit et que sa force se décuple. En utilisant un mode narratif qui nous permet de découvrir les différentes situations avec les yeux du héros et en usant de nombreuses ellipses, le scénariste Loo Hui Phang étudie les bouleversements, dus à cette mutation, sur la vie et les valeurs. Entre fantasmes, science-fiction et réalité, à l’antipode de ce qu’on peut lire dans les comics américains, cette BD traite du super-héroïsme en se posant de vraies questions sur les changements biologiques et psychologiques. Signalons aussi le graphisme torturé d’Hugues Micol (déjà repéré sur les japonisants «Contes du 7ème souffle», avec Eric Adam, chez Vents d’Ouest) qui oscille entre le style d’un Blutch et celui d’un Forest : à découvrir absolument !
“ Galata T.1 : Le poète assassiné ” par Stefano Palumbo, Fred Le Berre et Alain Paris
Editions Humanoïdes associés (10,46 Euros)
La collection «Dédales» des Humanos, axée sur les polars historiques, démarre vraiment bien : aucun des quatre premiers titres à notre disposition n’est à négliger. Le scénariste Fred Le Berre nous avait déjà proposé, dans cette collection, un intéressant «Shimon de Samarie» avec Michel Rouge ; voici qu’associé au romancier Alain Paris, il récidive avec cette nouvelle série se déroulant au 16ème siècle. Un ancien chevalier teutonique part prendre ses fonctions de prévôt à Istanbul, navigant sur une caraque vénitienne. Au large de Lemnos, il échappe à un attentat dont la victime est un poète à qui il avait cédé sa cabine par charité. A son arrivée dans le quartier de Galata, enclave chrétienne où il doit officier, le magistrat enquête sur les assassins qui se révèlent être aux ordres du fils du Doge de Venise. Le premier épisode de cette trilogie palpitante est fort bien illustré par le trait dynamique et précis du prolifique dessinateur italien Stefano Palumbo qui fait beaucoup penser à celui d’Enrico Marini. Vivement la suite !
“ L’école emportée T.1 à
Editions Glénat (7,50 Euros par volume)
Ce manga d’horreur, édité dans la petite collection «Bunko» des éditions Glénat, laquelle met en avant les classiques intemporels du genre, mérite vraiment le détour. Publiée dans le sens de lecture asiatique, cette BD japonaise devrait pourtant séduire les lecteurs de «franco-belgeries» peu enclins à se laisser tenter par les «japoniaiseries». La série date de 1972 mais n’a pas pris une seule ride : un matin comme les autres, un élève de CM2, plutôt turbulent, se dispute avec sa mère avant d’aller en classe. Arrivé devant l’école, il se retrouve au milieu de nulle part : un désert entoure l’établissement scolaire, comme s’il avait été le seul à avoir été épargné par un épouvantable cataclysme. En fait, l’école a été projetée dans un futur apocalyptique. Les 862 enfants sont terrorisés mais doivent affronter, seuls, cet environnement hostile et leurs propres démons ; alors que les enseignants commencent à perdre les pédales et se suicident les uns après les autres… En mettant en scène les fantasmagories de l’enfance (monstres, mutants, guerre, folie, famine, reptiles et insectes géants, ruines…, tout y passe) avec son dessin réaliste et classique, hérité du style d’Osamu Tezuka, l’auteur nous embarque pour un terrifiant voyage où tout semble aller de mal en pis. Le noir et blanc ainsi que la densité des hachures contribuent à l’efficacité du traitement horrifique de ce récit initiatique, humaniste et intelligent, qui fait vraiment froid dans le dos.
“ Le meilleur du Tour de France de René Pellos” par Jean-Michel Linfort
Editions Vents d’Ouest (30 Euros)
Actualité oblige, il y a pléthore de livres sur le Tour de France et sur le cyclisme (voir les actuels 5 albums à la une en page d’accueil du site). Ce très bel ouvrage de Jean-Michel Linfort, compilant en 224 pages «Le meilleur du Tour de France de René Pellos», n’est pas une BD mais mérite vraiment que vous vous y attardiez. Le dessinateur Pellos, surtout célèbre pour sa reprise inoubliable des «Pieds Nickelés», a croqué la grande boucle pendant près de cinquante ans, de 1932 à 1981, accumulant quelque cent mille dessins ou courtes BD et mille cinq cents portraits ou caricatures de coureurs cyclistes. Certaines de ces illustrations, réalisées pour des revues comme Miroir Sprint ou Miroir du Cyclisme, sont donc reprises dans cet album où elles sont accompagnées d’un texte érudit qui en décrit le contexte. Considéré comme le plus grand dessinateur sportif de tous les temps, René Pellos alternait un style lyrique proche d’un Gustave Doré et une caricature foisonnante et délirante, dixit Antoine Blondin : un autre grand spécialiste du Tour !
Gilles RATIER