Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...PLUS DE LECTURES N°47 DU 6 SEPTEMBRE 2004
Voici votre régulière chronique du lundi avec cette semaine : « Pest T.1 : Le défosseur » par Amaury Bouillez et Corbeyran aux éditions Delcourt, «Portraits de Titeuf» aux éditions Glénat et à la galerie Christian Desbois, « Les nouvelles aventures de Lucky Luke T.1 : La belle province » par Achdé et Laurent Gerra aux éditions Lucky Comics, « Le livre » par José-Antonio Mu?oz et Carlos Sampayo aux éditions Casterman et « Le monde perdu de Maple White T.1 » par Patrick Deubelbeiss et Anne Porot aux éditions Vents d’Ouest.
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« Pest T.1 : Le défosseur » par Amaury Bouillez et Corbeyran
Editions Delcourt (12,50 Euros)
Voilà une belle surprise qui sort vraiment du lot des nombreux albums parus aux éditions Delcourt ce mois-ci (ceci dit, il y a aussi le «Fagin le juif» de Will Eisner qui est un véritable chef-d’œuvre !). «Le défosseur» raconte l’histoire d’Abelard Tournemine, modeste employé à la station d’épuration des eaux des marais qui entourent Spleen City, ville frappée depuis dix ans par une maladie incurable appelée Pest. Le traitement tarde à être découvert et les habitants contaminés sont enfermés dans des dépotoirs aux conditions d’hygiène déplorables. Or, notre héros découvre des éléments qui lui permettent de penser que tout cela n’est qu’une manipulation de la part des hautes autorités politiques, scientifiques et religieuses. Traqué, il est heureusement pris en affection par une sympathique mangeuse d’homme : l’épouse d’un illustre professeur fort impliqué dans cette machination. Le trait d’Amaury Bouillez est aussi incisif mais beaucoup moins sombre que dans son précédent récit («Le phalanstère du bout du monde», toujours avec Corbeyran et pour Delcourt mais dans la petite collection «Encrages») et convient à merveille pour illustrer ce drôle de récit kafkaïen imaginé par Corbeyran, lequel est très à l’aise dans cet univers onirique, un brin décalé et futuriste, et qui porte un regard acerbe sur notre société. Cette fantastique histoire prévue en deux tomes rappelle d’ailleurs un peu deux des meilleurs récits du prolifique scénariste («Abraxas» et «Le fond du monde») où son art du dialogue faisait déjà merveille !
« Portraits de Titeuf »
Editions Glénat et Galerie Christian Desbois (40 Euros)
La BD jouit aujourd’hui des plus gros succès de l’édition francophone, tous genres confondus et “Titeuf” en est le plus bel exemple puisque cette série, crée par Zep, sera sans doute, encore une fois, la meilleure vente de l’année. Le nouvel album («Nadia se marie»), le dixième de cette série de gags éditée par Glénat, a été tiré à 2 000 000 exemplaires ! A cette occasion, 30 grands de la BD (de Bilal à Uderzo en passant par Gotlib, Juillard, Larcenet, Margerin, Roba, Tardi, Vuillemin, Yslaire et bien d’autres) ont salué cette star du préau, à leur manière, dans des dessins réunis dans l’album «Portraits de Titeuf», co-édité par Glénat et la galerie Christian Desbois. “Titeuf” : une BD à succès qui nous prouve que, quelques fois, quantité peut aussi être synonyme de qualité !
« Les nouvelles aventures de Lucky Luke T.1 : La belle province » par Achdé et Laurent Gerra
Editions Lucky Comics (8,70 Euros)
En utilisant la plupart des techniques narratives du génial Goscinny, le médiatique Laurent Gerra réussit ici une de ses meilleures imitations. Il est brillamment secondé par le dessin caricatural et virtuose d’Achdé, lequel se moule parfaitement dans le style de Morris, le créateur du célèbre cow-boy solitaire. Lancé à la poursuite d’un dangereux hors-la-loi, l’homme qui tire plus vite que son ombre se retrouve au Québec pour le plus grand plaisir de son fidèle destrier qui est «tombé en amour» pour une belle pouliche. Voilà donc encore une agréable reprise !
« Le livre » par José-Antonio Muñoz et Carlos Sampayo
Editions Casterman (12,50 Euros)
Les deux célèbres auteurs Argentins (même si Muñoz vit désormais à Paris et Sampayo à Barcelone) se retrouvent pour nous conter l’histoire d’une édition originale du livre «Joueur d’échecs» de Stefan Zweig contenant le récépissé au porteur d’un dépôt dans une banque suisse de 27 millions de francs, daté de 1944. Intrigue policière sur fond de traque aux anciens nazis dans l’Argentine de l’après-guerre, cette BD veut surtout nous démontrer qu’un livre contient toujours plus que ce qu’il nous donne à lire car il passe de mains en mains, multipliant les secrets et les mystères. Ce scénario malin de l’ «écrivain d’images» (c’est ainsi qu’il se définit) qu’est le trop rare Carlos Sampayo est illustré par le trait noir, allégorique, baroque et expérimental de son complice de toujours, avec lequel il a composé, rappelons-le, une série magistrale : «Alack Sinner».
« Le monde perdu de Maple White T.1 » par Patrick Deubelbeiss et Anne Porot
Editions Vents d’Ouest (12 Euros)
Pour son retour à la BD, Patrick Deubelbeiss nous propose une nouvelle adaptation en BD du roman de Sir Conan Doyle. Ce dernier fût maintes fois imagé, ne serait-ce qu’en 1990 sous le titre «Challenger» (le nom du professeur organisant cette expédition en Amazonie afin de démontrer que des créatures préhistoriques subsistent) par Patrice Sanahujas et André-Paul Duchâteau, pour les éditions Lefrancq. Ce roman inspira également nombre de films, de «King-Kong» à «Jurassic Park», et reste passionnant, grâce à son atmosphère à la Jules Verne et à la frontière du fantastique qui touche à ce qui reste de notre âme d’enfant. Patrick Deubelbeiss avait repris, en 1987, les aventures d’ «Ergün l’errant» (crées par Didier Comès) sur un scénario de Benoît Peeters avec lequel il avait également signé un récit atypique : «Le transpatagonien», en 1989. Cantonné ces derniers temps dans l’illustration pour les documentaires destinés aux enfants, c’est avec plaisir que nous retrouvons son style «ligne claire» dans cette fidèle mise en image prévue en deux tomes.
Gilles RATIER