Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...« La Mort de Captain Marvel » par Jim Starlin
Avec l’édition de cette œuvre de Jim Starlin, c’est un vrai monument que Panini Comics exhume, presque 30 ans après sa première parution française chez Lug… Un classique moderne incontournable, indispensable, ne bénéficiant malheureusement ici d’aucune réflexion éditoriale… Rogntudjuuûûuu !
« La Mort de Captain Marvel »
En 1982, Marvel Comics décide de se lancer dans le graphic novel. Pour que cet évènement marque réellement les esprits, il fallait ouvrir cette nouvelle collection avec un titre fort et historique. Commencer par la mort de Captain Marvel vue par Jim Starlin fut une idée de génie qui allait arranger tout le monde. En effet, à l’époque, aucun auteur ne semblait arriver à écrire de manière satisfaisante pour ce personnage pourtant doté d’un grand potentiel et d’une aura historique importante : finalement (et bizarrement!?!), chez Marvel, on se savait plus trop quoi faire de ce personnage… Et puis on savait combien la mort d’un super-héros peut déchaîner les passions et créer l’évènement – on l’avait récemment constaté avec la mort de Phénix dans « Uncanny X-Men ». « The Death of Captain Marvel » de Jim Starlin tint bien plus que ses promesses de succès, puisque ce récit est désormais considéré à juste titre comme l’un des chefs-d’Å“uvre absolus de Marvel, une création qui a fait date et qui est devenue cultissime pour nombre de lecteurs, d’artistes, d’éditeurs… Il faut dire que Jim Starlin réalisa là une Å“uvre de toute beauté, foncièrement humaine, émouvante, profonde… Un petit bijou de sensibilité et d’intelligence, simple et direct. Faire mourir Captain Marvel d’un cancer plutôt que d’un rayon cosmique ou d’une baston extra-terrestre était une belle idée, et Starlin aborda ce sujet comme une thérapie, son propre père ayant disparu à la suite de cette terrible maladie. Il en ressort une vérité de ton et de cÅ“ur qui ne trompe pas. Comme beaucoup de lecteurs de ma génération, j’avais lu cette Å“uvre lorsqu’elle parut en 1983 chez Lug dans la collection « Top BD ». Je me souviens avoir été très ému par ce récit, et le ressenti fut si fort que presque 30 ans après je ne peux penser à cette Å“uvre sans avoir un petit pincement au cÅ“ur. « The Death of Captain Marvel » fait partie de ces comics qu’on n’oublie jamais, et qui nous suivent toute notre vie. Le fait que Panini réédite enfin ce chef-d’Å“uvre après plusieurs décennies est donc une très bonne nouvelle pour celles et ceux qui sont trop jeunes pour l’avoir découvert à l’époque, mais la présente édition laisse un petit arrière-goût amer de n’importe quoi.
Comme d’habitude, Panini Comics se targue de publier là un monument, une Å“uvre indispensable et historique… et propose une édition qui ne tient pas la route et ne rend certainement pas hommage à l’Å“uvre si encensée. J’en ai un peu marre de ces éditeurs qui publient de l’or – en le clamant haut et fort – tout en ayant des pratiques éditoriales merdiques. Pire, Panini nous ment dans ses accroches : contrairement à ce qui est indiqué en quatrième de couv’, en achetant cet album vous n’aurez pas « toutes les aventures de Captain Marvel écrites par Jim Starlin », puisqu’à part le graphic novel vous n’aurez droit qu’à deux épisodes signés Starlin (les 29 et 34 de la série régulière) alors que l’auteur en réalisa une dizaine entre 1973 et 1974. Ils nous prennent vraiment pour des nazes, hein… et avec quel aplomb et quelle suffisance ! Ensuite, l’album ressemble plus à un petit fourre-tout qu’à un véritable hommage digne de ce nom. Rien à dire sur le graphic novel en soi, évidemment, mais le choix des quatre épisodes qui le précèdent laisse perplexe. Je comprends qu’on publie l’épisode 29, car on y voit comment Éon donna la conscience cosmique à Captain Marvel, transformant le guerrier en protecteur, cet épisode étant aussi une bonne introduction à l’histoire de Titan et de ses héros. L’épisode 34 était plus que nécessaire, puisque c’est bien celui où Captain Marvel combat Nitro et se retrouve exposé au gaz toxique qui engendrera son cancer. Mais les épisodes 1 et 2 de « Marvel Spotlight » par Moench et Broderick sont non seulement bavards, ennuyeux et pas très beaux esthétiquement (pour tout dire sans aucun intérêt), mais en plus ils arrivent là comme un cheveu sur la soupe, foutant en l’air toute la cohérence de l’ouvrage. J’ai lu çà et là que grâce à ces épisodes on fait mieux connaissance avec Titan, Mentor, Eros et Elysius, que ces épisodes sont présents dans l’édition américaine… Premièrement, il me semble que l’épisode 29 est nettement suffisant pour amorcer cette approche, que cette qualité justifie sa présence ici, comme je l’ai dit plus haut. Et deuxièmement, Panini n’était pas obligé de faire une édition à l’identique de l’originale sans réfléchir (la preuve, dans le TPB américain, l’épisode 29 n’est pas présent), et en plus ils auraient pu remplacer ces deux épisodes par un dossier sur l’Å“uvre, des dessins de Starlin sur le sujet, quelque chose, quoi ! Ici, même pas une préface, même pas un texte, rien, rien, rien. Désespérant. Ils n’ont même pas reproduit ce magnifique dessin de Starlin qui concluait l’édition Lug de 1983 et que vous pouvez admirer ci-dessous grâce à votre serviteur, puisqu’il semblerait qu’on doive rattraper le non-professionnalisme (j’m'en-foutisme capitaliste?) de Panini :
Bref. Je ne vais pas m’énerver pendant des plombes, je suis déçu je suis déçu et puis voilà … En conclusion, et malgré les critiques fortes que je viens de formuler, je ne peux que vous conseiller de lire cet album si vous ne connaissez pas « The Death of Captain Marvel ». À lui seul, ce récit mérite qu’on achète l’album, n’ayant rien perdu de sa vérité et de sa beauté… Une très belle Å“uvre, l’une des plus sensibles jamais éditées chez Marvel, où Jim Starlin atteint une qualité de dessin tout à fait remarquable. Superbe.
Cecil McKINLEY
« La Mort de Captain Marvel » par Jim Starlin, Pat Broderick et Doug Moench
Éditions Panini Comics (20,00€)