« Natacha » : François Walthéry reprend les commandes !

C’est dans le n° 1663 de l’hebdomadaire Spirou du 26 février 1970 que l’hôtesse de l’air la plus sexy de la bande dessinée prend son envol. Quelque 55 ans et 24 albums plus tard, elle est toujours présente sous le crayon de François Walthéry : son fringant « papa », qui — malgré ses 79 ans — possède un crayon toujours aussi alerte. Une bande dessinée pur jus des années 1970, qui n’a pas pris une ride et dont l’ambition unique est de divertir ses lecteurs.

De nos jours, dans la nuit du 26 au 27 décembre, le vol SN.Bardaf 614 survole l’Atlantique en direction de l’Europe. Leur service terminé, Natacha et Walter poursuivent la lecture du journal intime de la grand-mère de la pulpeuse hôtesse. Baptisée elle aussi Natacha, c’est le vivant portrait de sa petite fille. Idem pour Walter, dont l’aïeul vient de vivre une aventure dramatique en Nouvelle-Calédonie en compagnie de la blonde jeune femme. Une rencontre due à un hasard miraculeux auquel seule la bande dessinée des années 1950 permet d’être crédible.

Monsieur Walter et Madame Natacha font route vers l’Europe à bord de leur modeste embarcation : l’Épervier bleu. Ils sont accompagnés de la jeune Chacha, laquelle s’avère le portrait craché de Sheba : le jeune Hindou compagnon d’aventure d’Éric (l’Épervier bleu) et de Larsen, soit le trio animé par Sirius dans Spirou à partir de 1942. La découverte du Waiquiqui — un paquebot réservé aux millionnaires, errant au milieu du Pacifique — interrompt leur paisible retour. Équipage et passagers ont été endormis par une bande de malfrats bien décidés à rafler leurs biens. C’est le début d’une folle aventure qui conduit nos héros à bord d’une île stratosphérique géante conçue par un savant génial, mais fou, qui rêve de dominer le monde. Il est entouré par une bande de redoutables mercenaires conduite par Steiner : un ancien nazi proche d’Hitler. De folles poursuites dans les entrailles de l’immense nef volante en combats épiques : nos héros vont — une fois encore — triompher des forces du mal.

C’est d’après un scénario de son ami Sirius que François Walthéry adapte cette trilogie, dont le présent album est le dernier. Sirius (1911–1997), Max Mayeu de son vrai nom, est l’auteur de « L’Épervier bleu », une série d’aventure chassée de Spirou en 1953 par la censure française. (1) Pour l’occasion, François Walthéry — accompagné d’ordinaire par des assistants — en signe seul les 54 pages, superbes, réalisées de 2019 à 2024. Avec Roger Leloup et Willy Lambil, il est le seul représentant de l’âge d’or de l’hebdomadaire belge encore en activité. Et ce n’est pas fini, puisqu’il confie avoir commencé un nouveau récit, ayant pour cadre l’Afrique. Affaire à suivre…

Né le 17 janvier 1946 à Argenteau, dans la région de Liège, François Walthéry fréquente les ateliers de Saint-Luc à Liège avant d’apprendre le métier auprès de son voisin Mittéï, tout en animant « Pipo » dans le modeste hebdomadaire Junior. Assistant de Peyo à partir de 1963, il travaille sur les Schtroumpfs, tout en réalisant — sous le pseudonyme de Pop’s — quatre épisodes de « Jacky et Célestin » destinés au supplément du Soir : Le Soir illustré. Toujours avec Peyo, il dessine « Benoît Brisefer » jusqu’en 1973. C’est en 1970 qu’il publie le premier épisode de « Natacha » dans Spirou. Son héroïne devenue une icône, il n’hésite pas à la dessiner dans des tenues sexy pour divers supports, à destination de ses lecteurs adultes. On lui doit aussi la création du « Vieux Bleu » avec Raoul Cauvin et du « P’tit Bout de chique ». Il participe à la réalisation de « Rubine » au Lombard et à celle d’« Une femme dans la peau » pour P&T productions. Son trait semi-réaliste et dynamique lui vaut la sympathie d’un large lectorat.

Les éditions Dupuis, avec le concours de Champaka Brussels, consacrent le treizième volume de la luxueuse collection Une vie en dessins à l’œuvre de François Walthéry. Plus de 200 facsimilés sont présentés, principalement à partir des originaux de « Natacha ». (2)

Enfin, Natacha est la vedette d’un long métrage, réalisé par Noémie Saglio et baptisé « Natacha (presque) hôtesse de l’air », dont la sortie est annoncée le 2 avril. Camille Lou (Natacha) et Vincent Dedienne (Walter) sont entourés par Elsa Zylberstein, Didier Bourdon, Anne Charrier, Baptiste Lecaplain, Antoine Gouy, Fabrice Luchini, Isabelle Adjani… Une invitation, pour les amoureux de Natacha, à se plonger dans la lecture de cet album : nous jugerons le film par nous même, quand nous l’aurons vu : pas avant !

Henri FILIPPINI

(1) Sur Sirius, voir sur BDzoom.com : Sirius, Les éditions Ad hoc « font [brillamment] mémoire » avec l’étoile Sirius ! et « Pemberton » de Sirius : un second volume ad hoc de l’intégrale !.

(2) Si ce bel ouvrage est dédié à la série « Natacha », il est à noter que le premier tome de la collection Une vie en dessins, en 2019, était déjà consacré, plus largement, à François Walthéry. Il était donc plus épais avec de nombreux facsimilés de « Benoît Brisefer », du « P’tit Bout de chique », de « Jacky et Célestin » ou encore du « Vieux Bleu » : les planches de « Natacha » — toutefois complètement remaquettés — étant sensiblement les mêmes. Enfin, le texte érudit de Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault est remplacé, dans cette édition quand même différente, par celui du non moins éminent spécialiste Charles-Louis Detournay. Voir aussi sur BDzoom.com : Une vie (en dessins) avec « Natacha » !.

Gilles RATIER

« Natacha T24 : Chanson d’avril » par François Walthéry et Sirius

Éditions Dupuis (12,95 €) — EAN : 9791034757442

Parution 28 mars 2025

« Natacha : une vie en dessins » par François Walthéry et Charles-Louis Detournay

Éditions Dupuis/Champaka Brussels (69 €) — EAN : 9782390410485

Parution 28 mars 2025

« Natacha : une vie en dessins » par François Walthéry et Charles-Louis Detournay

Éditions Dupuis/Champaka Brussels (89 €) — EAN : 9782390410492 (pour le tirage de tête limité à 399 exemplaires signés et numérotés, sous jaquette, avec une couverture inédite)

Parution 28 mars 2025

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