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Les nouvelles aventures de Fantax : les super-héros ne meurent jamais !

01/03/2025
Par Henri Filippini

Créé dans l’éphémère Paris-Monde Illustré, Fantax devient, en juillet 1946, le héros d’une série de 39 fascicules aux couvertures spectaculaires et aujourd’hui cultes, proposés jusqu’en mai 1949. Ils ont révolutionné les sages héros français de l’après-guerre. Justicier masqué portant un grand F sur son collant noir, il est prêt à toutes les formes de violence pour que « SA » justice triomphe. Victime de la censure de 1949 censée protéger la jeunesse, mais revenu brièvement en 1959, il disparaît définitivement après la publication de neuf fascicules. Après le volume collectif « Fantax Renaissance » paru en 2019 aux éditions Connaître Chott — dirigées par Tanguy Mouchot (le petit-fils du créateur décédé en 1966) —, Fantax revient pour de longues aventures, dans deux albums de 54 pages publiés chez le même éditeur.

C’est avec émotion que nous retrouvons Lord Horace Neighbourg : un diplomate britannique envoyé en mission secrète aux quatre coins du monde. Épris de justice, la sienne, il revêt le costume de Fantax, le justicier masqué, afin de combattre la pègre et plus particulièrement Al Capy : un redoutable gangster qu’il accuse d’avoir tué sa fille Barbara. Flanqué de sa femme Lady Patricia, il fracasse les crânes, bousille les mâchoires et réduit en miettes ses ennemis, tel un catcheur dont il possède la carrure. Imaginé par J. K. Melwyn Nash, pseudonyme de Marcel Navarro (le futur fondateur des éditions Lug) et par Pierre Mouchot, alias Chott, Fantax possède tous les atouts pour devenir la bête noire des censeurs de la récente loi votée à l’unisson.

Après avoir réédité de 2010 à 2015, en six albums superbes, les fascicules mythiques des années quarante et publié le collectif « Fantax Renaissance » en 2019 où le gentleman fantôme renaître de ses cendres, les éditions Connaître Chott se lancent dans la publication de nouveaux albums complets et inédits. Un pari d’autant plus audacieux que les lecteurs d’après-guerre sont de moins en moins nombreux… et que compter sur un nouveau public n’est pas gagné.

Deux scénaristes — spécialisés dans les super-héros —, Thierry Mornet et Jean Depelley, relèvent le défi avec panache.

Dans « Ô vieillesse ennemie ! », El Capo (est-ce Al Capy ?) utilise une toxine mortelle pour réduire en cendres des jeunes femmes de la haute société… Lorsque Lady Patricia est à son tour victime de la terrible épidémie, Fantax entre en scène, menant un combat féroce contre la pègre entre New York et Paris. Une aventure passionnante, qui n’économise pas les séquences violentes permettant de retrouver quelques vieux comparses du justicier : comme Murph, le serviteur zélé, ou l’inspecteur Leterrier de la PJ parisienne.

Thierry Mornet, qui signe le scénario, est né en 1963. Après avoir travaillé pour Semic, successeur des éditions Lug, ilentre aux éditions Delcourt où il dirige la collection Contrebande, traduisant plusieurs séries à succès, dont « Walking Dead ». Scénariste d’épisodes du « Garde républicain » — un autre super-héros franchouillard — depuis 2013, il est l’auteur de l’ouvrage « Comics, les indispensables de la BD américaine » édité chez Huginn & Muninn.

Graphiste, illustrateur, affichiste, musicien, Paskal Millet est bien connu des amateurs de rock.

Il dessine quelques épisodes du « Garde républicain » et participe au collectif « Fantax Renaissance » en 2019…

D’un trait rugueux et vivant, il anime avec délectation ce retour explosif du héros de Chott.

« Espions sur la Tamise » se déroule en septembre 1949 à Londres.

Lord Horace Neighbourg est engagé par le MI6 britannique, afin d’enquêter non loin d’Oxford, au sein de l’Atomic Agency où se fabrique la première bombe atomique anglaise.

Des espions au service de l’Union soviétique se dissimulent parmi les scientifiques.

Prisonnier des Soviets, Fantax est déporté au goulag où, avec l’aide de la fidèle Lady Patricia, il finit par découvrir l’identité des taupes.

Moins violent que le précédent, cet album restitue avec justesse l’ambiance de la guerre froide omniprésente tout au long du récit. Plus sensuels, les dessins de Jean-Michel Arroyo offrent une nouvelle facette du personnage.

Né le 22 mars 1966 à Limoges, Jean Depelley travaille comme scénariste dans le monde du cinéma tout en écrivant sur les comics books dans la presse, mais aussi sur BDzoom.com. Il écrit une biographie de Jack Kirby en deux volumes, participe aux scénarios du « Garde républicain », crée le personnage de « Louise Petibouchon » pour Éric Albert aux éditions du Long Bec [puis Paquet] et publie chez Original Watts la collection des Howard’s Barbarians avec Nicolas Guénet et l’album «Neige rouge » avec Icar.

Jean-Michel Arroyo, né le 21 mai 1971 à Béziers, participe à des courses cyclistes avant de se tourner vers la bande dessinée. Il dessine « Le Paquebot des sables » à partir de 2004, puis entre aux éditions Zéphyr en 2006 où il dessine « Air blues » et « L’Escadrille des têtes brûlées ». De 2013 à 2019, il réalise les six premiers volumes — salués par la critique — du spin-of « Buck Danny Classic ». Condamné pénalement pour violences conjugales et sexuelles en février 2023, Jean-Michel Arroyo a purgé sa peine. Des dissensions avec les scénaristes de « Buck Danny Classic » l’avaient amené à quitter la série. Après un superbe « Pigalle 1950 » scénarisé par Pierre Christin (dans la collection Aire libre de chez Dupuis), ce « Fantax », dont il avait lui aussi signé un épisode dans « Fantax Renaissance », devrait lui permettre de rebondir.

Henri FILIPPINI