« Majunga », qui donne son titre à l’album signé Stéphane Doreau et Geoffroy Larcher, est le nom d’une ville du nord de Madagascar : une ville portuaire animée où commence l’histoire de Joseph, en 2005. Joseph et quelques autres sont alors de jeunes pensionnaires, sous la férule de Père Manuel : le genre qui veut tout décider pour ses « brebis », même de leur avenir…
Lire la suite...Bananas n° 17 : un an déjà !
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Fidèle à son rendez-vous annuel, Bananas — la revue animée par l’infatigable Évariste Blanchet — propose un no 17 à la fois passionnant et éclectique. Sous-titrée Revue critique de bande dessinée, elle invite le lecteur curieux à parcourir l’histoire de la bande dessinée, sans se soucier de l’actualité ni des tendances actuelles du média. À lire avec modération : nous avons un an pour en savourer le riche contenu… C’est un dessin de Fabrice Neaud, issu de son album « Le Dernier Sergent » datant de 2023, qui sert de couverture à cette nouvelle livraison.
Chronologiquement, Marcel Turlin dit Mat, le chantre de la bande dessinée populaire — et créateur du fameux « Oscar le petit canard » né en 1941 dans l’hebdomadaire Fillette —, est le premier invité.
Cet article documenté, fort bien illustré et signé Jean-Jacques Lalanne, permet de découvrir un auteur à la production impressionnante, dont hélas ! il ne reste quasiment rien aujourd’hui.
Le rendez-vous suivant, signé Manuel Hirtz, conduit le lecteur en Italie dans l’immédiat après-guerre : plus particulièrement à la découverte du studio EsseGesse qui réunissait Giovanni Sinchetto, Pietro Sartoris et Dario Guzzon.
Pendant un demi-siècle, le trio a campé une belle brochette de personnages évoluant pour la plupart dans l’Amérique des temps héroïques : « Kinowa », « Il Cavaliere Nero », « Capitan Miki » (« Miki le Ranger »), « Il Grand Blek » (« Blek le Roc »), « Alan Mistero » (« Ombrax »), « Il Comandante Mark » (« Cap’tain Swing »)…
Autant de héros qui ont fait en France le bonheur (et la fortune) des regrettés pockets.
C’est au milieu des années 1960 que l’éditeur Éric Losfeld ose publier des albums de bandes dessinées destinés à un lectorat adulte.
Cette aventure éditoriale suicidaire au temps de la censure gaulliste est évoquée par deux scénaristes de l’époque : Jean Rollin, l’auteur de « Saga de Xam » avec Nicolas Devil, et Pascal Thomas, le collaborateur de Guy Peellaert sur « Pravda la survireuse ».
Fourmillant d’anecdotes évoquant l’improvisation qui régnait à l’époque, ces deux entretiens ne manquent pas de sel.
Bien plus sage au premier regard, « Yoko Tsuno », l’héroïne de Roger Leloup, est étudiée à la loupe par Olivier Jarrige qui évoque le féminisme et l’antisexisme de l’auteur belge.
Antiraciste, profondément chrétien, amoureux des femmes, Roger Leloup — qui poursuit son œuvre à plus de 90 ans (1) — est présenté ici sous un regard nouveau qui étonnera plus d’un lecteur de l’hebdomadaire Spirou.
L’invité principal de ce numéro est un auteur atypique dont la vie à elle seule fut un roman (2).
Né en 1927 à Paris de parents alsaciens, Guy Mouminoux combat — au titre de Malgré-nous, incorporé de force — au sein de l’armée allemande, de 1942 à 1945, envoyé sur le front russe.
À son retour en France, il se lance dans la bande dessinée, travaillant pour la plupart des journaux de l’époque avant de se fixer à Pilote, Tintin ou Spirou, puis de rejoindre Charlie hebdo où il crée « Krampon » — le futur antihéros du « Goulag » — sous la signature de Dimitri.
Ami de Jijé et de Reiser, rare fidèle au Professeur Choron, auquel il rendait visite jusqu’à la fin de sa vie, Guy Mouminoux était un homme de l’Ancien Monde : à la fois attachant et agaçant pour qui le connaissait.
L’article d’Évariste Blanchet est complet et passionnant.
L’habituelle retranscription d’une rencontre réalisée au SoBD 2024 propose la reprise d’un débat titré « La Bande dessinée de fiction est-elle révolue ? » : une discussion conviviale entre Manuel Hirtz, Sylvain Insergueix et la dessinatrice Jeanne Puchol.
Enfin, Jean-Paul Jennequin revient sur ses diverses positions à propos de la place des femmes autrices dans la bande dessinée.
La lecture de ces deux derniers articles se révèle bien plus ardue que celle des précédents.
Plus pointu encore le portrait de Jules Stromboni — un artiste contemporain — par Pierre-Gilles Pélissier,qui aurait laissé sans voix plus d’un lecteur de Mat et d’« Oscar le petit canard »…
Né en 1958, Évariste Blanchet crée les éditions Bérérama en 1980. Il publie les revues Critix en 1993, puis Bananas, laquelle est proposée dans sa formule actuelle depuis 2006.
Henri FILIPPINI
(1) Voir notamment dans BDzoom.com : « Yoko Tsuno » : l’ultime aventure ?.
(2) Voir également dans BDzoom.com : Guy Mouminoux — Guy Sager — Dimitri : trois signatures pour un seul homme !.
Bananas n° 17 (février 2025)
128 pages (12 €) — Bananas, 22, bd du Général-Leclerc, B5, 95100 Argenteuil