La comtesse Elisabeth Bathory descend d’une famille princière hongroise. Elle s’est fait connaître, au XVIe siècle, par sa cruauté extrême : goût du sang (littéralement), liberté sexuelle débridée et absence de respect de la vie humaine. Sa famille, originaire de Transylvanie, évoque évidemment le comte Dracula, dont on peut considérer Elisabeth Bathory comme l’annonciatrice. A-t-elle inspiré Bram Stocker ?!
Lire la suite...« Elisabeth Bathory » : avant Dracula, au féminin !
La comtesse Elisabeth Bathory descend d’une famille princière hongroise. Elle s’est fait connaître, au XVIe siècle, par sa cruauté extrême : goût du sang (littéralement), liberté sexuelle débridée et absence de respect de la vie humaine. Sa famille, originaire de Transylvanie, évoque évidemment le comte Dracula, dont on peut considérer Elisabeth Bathory comme l’annonciatrice. A-t-elle inspiré Bram Stocker ?!
Le ton est donné avec la scène initiale : un bain de sang, pourtant plus symbolique que réel, pour que la comtesse se présente, ainsi que sa lignée… Suivra, entre autres, une scène saphique entre Elisabeth et sa (jeune) tante, qui semble-t-il, l’initie au mal et la guide vers son mariage. Puis, promise, à 16 ans, à Ferenc, un jeune prince fougueux et cruel, elle se dirige vers Prague pour son mariage. De jeunes filles disparaîtront mystérieusement et la rumeur — fondée, si on en croit la légende retracée par l’album, qui décrit quelques-uns de ses crimes — accusera Elisabeth…
En un seul tome (dans l’intéressante série « Les Reines de sang » chez Delcourt), l’album ne peut que résumer l’existence et les méfaits de la comtesse diabolique… Le lecteur est plongé d’emblée dans une ambiance horrifique —comme un cauchemar — qui se maintient ensuite dans le malsain et le pervers. Le récit se développe dans une ambiance gore, pour public averti — âmes sensibles s’abstenir ! —, pimenté par les froides atmosphères d’Europe centrale. De quoi nous faire frissonner, mais pas que de froid !
Le récit a bien entendu son lot de fous et de désaxés, que ce soit l’implacable Ferenc lui-même ou encore la belle-mère d’Elisabeth : intégriste et méchante à souhait. Comme pour les autres héroïnes des « Les Reines de sang », l’accent est mis sur un personnage réel : alors que le « Dracula » deBram Stocker est imaginaire, même si fantasmé à partir du prince valaque Vlad Draculea. Son histoire a été souvent adaptée en bande dessinée (1), ainsi qu’au cinéma.
Il reste que, si les personnages sont bien représentés, la plastique des deux femmes (la comtesse et sa jeune tante) est caricaturale : poitrine imposante, apparence pulpeuse, soit les canons artificiels des bimbos de nos jours. Les autres personnages, plus ordinaires, sont paradoxalement mieux mis en image. Pourtant, on aurait aimé rencontrer un peu plus le sens de l’évocation, voire la démesure (comme dans le « Dracula » illustré par Georges Bess paru en 2022). Mais Leo Pilipovic, dessinateur serbe, s’en tire honorablement. Quant à Jean-Pierre Pécau, il a, entre autres, scénarisé tous les tomes de la série « L’Histoire secrète » (à partir de 2005) ainsi que ceux du « Dernier Dragon » (à partir de 2019), chez le même éditeur : Delcourt.
C’est évidemment un album à lire pour les amateurs des « Reines de sang » et ceux d’histoires de vampires… Mais à ne pas mettre entre toutes les mains !
(1) Voir notamment : « Elizabeth Bathory » de Pascal Croci (Emmanuel Proust, 2009) ; « Erzsebeth » d’Emre Ohrun et Cédric Rassat (Glénat, 2010) ; « Elisabeth Bathory » de Lawrence Rasson et Amaury Quétel (Juste pour lire, 2010) ; « Itinéraire d’un cercueil maudit » de Raulo Caceres (Tabou, 2021) ; « Bathory : la comtesse maudite » d’Anne-Perrine Couët (Steinkis, 2022).
« Elisabeth Bathory : la Comtesse sanglante » par Leo Pilipovic et Jean-Pierre Pécau
Éditions Delcourt (15,95 €) — EAN : 9 782 413 042 273