Une enquête difficile pour un duo d’enquêteurs improbables : pourquoi les abeilles se cachent-elles pour mourir dans « Les Larmes du yôkaï » ?

Même quand on est adulte, on aime lire les albums jeunesse scénarisés par Loïc Clément. Le récit est toujours surprenant, avec de l’action ou des thématiques traitées toujours profondes et intéressantes… Et pour agréger actions, personnages attachants et émotions, le scénariste n’oublie jamais d’ajouter une bonne dose d’humour. On retrouve tous ces ingrédients dans « Les Larmes du yôkaï » : une enquête policière amusée et amusante dans un Japon médiéval revisité.

Dans l’archipel nippon, dans un temps médiéval incertain, un couple de nobles désespèrent d’avoir un héritier. Étonnamment, c’est en combattant des brigands qu’ils en trouvent un, car ils adoptent, après avoir occis les aigrefins, un bébé abandonné, encore dans des langes sur lesquelles est brodé son prénom : Caleb.

Des années plus tard, le bébé a bien grandi. Caleb est un jeune samouraï plein de fougue et de malice. Il parcourt le pays avec Doglass : son serviteur souffre-douleur. Il est présentement en mauvaise posture, car prisonnier de malandrins dirigés par un immense chef : Célestin. Rusés, Caleb et Doglass réussissent leur mission : faire exploser de la poudre volée au seigneur local. Ils parviennent ensuite à s’enfuir, en sautant du haut d’une falaise. Reste à se faire payer par leur commanditaire.

Le duo Caleb–Doglass arrive relativement serein dans la ville de Chidori. Ils entendent se restaurer dans l’auberge tenue par Béryle : une patronne énergique. L’humour, un rien caustique, du jeune samouraï, provoque une belle bagarre, et les deux amis se retrouvent dans les geôles du seigneur local. S’ils arrivent à se faire libérer, le daimyo refuse de les payer pour leur mission précédente.

Sans emploi, Caleb commence à enquêter sur la mort mystérieuse de toutes les abeilles de la région qui désole les apiculteurs, mais aussi tous les habitants. Le manque de réaction du daimyo leur semble vite suspect. Il est corrompu, mais par qui ? Qu’est-ce qui fait mourir ces pauvres insectes ? Et quelle sombre machination se cache derrière cet étrange phénomène ?

C’est à ces questions et à quelques autres que Caleb s’emploie à trouver des réponses, grâce à son raisonnement et à au maniement de son sabre qui renferme l’âme d’une créature légendaire : les larmes d’un yôkaï.

« Les Larmes du yôkaï T1 » page 11.

Nous vous vantons régulièrement sur BDZoom.com l’immense talent de scénariste pour le jeunesse de Loïc Clément. Les éditions Delcourt lui dédient désormais une collection : Les Contes des cœurs perdus. On y trouve des titres remarquables :  « Chaussette », « Le Voleur de souhaits », « Chaque Jour Dracula », « Jeannot », « Le Silence est d’ombre », ou « Mauvais Sang ». Il est aussi l’auteur du « Temps des mitaines », de l’adaptation en bande dessinée de « Miss Charity » et des aventures d’« Armelle et Mirko ». Il démontre une nouvelle fois son savoir-faire et son intelligence narrative, tout au long des 85 pages des « Larmes du yôkaï »

Le premier volume de cette série annoncée est rythmé par les aventures rocambolesques d’un jeune samouraï intelligent, mais pas sans défaut. Il en effet impétueux, trop sûr de lui, et son humour inutilement mordant lui vaut de solides inimitiés.

Dans un Japon médiéval, dans lequel se meuvent des animaux anthropomorphes, le fougueux et vaniteux Caleb et l’indolent Doglass forment un duo mal assorti : source de scènes comiques habiles. Un humour omniprésent berce toutes les pages de ce premier volume d’une série annoncée, que ce soit par des dialogues savoureux au langage parfois soutenu ou par les nombreuses références amusées qui parsèment les rebondissements d’une riche intrigue.

« Les Larmes du yôkaï T1 » page 28.

Le scénario de Loïc Clément a été storyboardé par Stéphane Benoît pour le dessin tout en vivacité de Margo Renard (l’autrice remarquée de « Monkey Family) et les couleurs pétillantes de Grelin. Tout en respectant les décors et les légendes du Japon d’avant l’ère Edo, le dessin apporte une note d’humour supplémentaire bienvenue par des exagérations dans la lignée du style manga et une forte expressivité de tous les personnages.

« Les Larmes du yôkaï » réussissent la gageure de mêler, sans effort apparent, bande dessinée d’aventures aux multiples rebondissements, thriller médiéval entre enquête à la Sherlock Holmes et combats de sabres, récit fantastique avec intervention d’esprits légendaires, les célèbres yokaï… Tout cela grâce à un humour décalé omniprésent. Les auteurs de cette première enquête auto-conclusive n’oublient pas de traiter avec légèreté des thématiques sérieuses, comme la nécessaire protection de la nature, l’écologie donc, mais aussi l’acceptation de toutes les différences : une tolérance jamais mièvre.

Laurent LESSOUS (l@bd) 

« Les Larmes du yôkaï T1 : Les Abeilles se cachent pour mourir » par Margo Renard et Loïc Clément

Éditions Glénat (15,95 €) – EAN :  978-2-3440-5321-8

Parution 11 septembre 2024

 

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