Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Lila, 13 ans, grandit et murit : elle découvre son corps et fait l’apprentissage du deuil…
Nous suivons la vie de la tonique Lila depuis ses dix ans. Dans le huitième album de la série qui porte son nom, l’adolescente affronte les soucis des grandes collégiennes : si la découverte de son corps de jeune fille lui apporte quelques agréments, elle doit aussi pour la première fois affronter la perte d’un proche. Une belle série qui aborde avec un humour rafraichissant les sujets liés à la puberté. De quoi intéresser jeunes lectrices… et leurs parents.
Nous retrouvons toujours avec grand plaisir la petite rousse Lila depuis le premier volume de ses aventures « Lila, pommes, poires, abricots ». C’est maintenant une adolescente accomplie, bien dans son corps qui passe avec les félicitations du conseil de classe en 4e : de quoi enrichir son CV pour l’Agence spatiale européenne, car elle n’a pas abandonné son rêve d’enfance de devenir spationaute.
Pendant que sa mère a accosté en Indonésie avec son nouveau conjoint pour sauver quelques espèces animales menacées et que son père file le parfait amour avec sa compagne et leur bébé de bientôt un an : la demi-sœur de Lila, la jeune fille partage toujours la chambre de sa copine Cora dans le pavillon de ses parents. Les deux adolescentes partagent les mêmes gouts et les mêmes amies : de quoi se confier sans appréhension l’une à l’autre.
Si elles participent ensemble au cross du collège, les deux jeunes filles prennent plus de plaisir lors d’une séance de cinéma avec leurs petits copains respectifs.
Toutes les deux se posent des questions sur les limites à imposer dans leur relation sentimentale et évoquent même, parfois, leurs plaisirs solitaires : ce qui met à l’aise l’encore prude Lila.
Enfin, viennent les vacances de Noël et le voyage tant attendu en avion avec son frère vers Bali pour rejoindre leur mère et son compagnon. Le dépaysement est total ; le séjour idyllique entre plongées sous-marine, plages paradisiaques et distributions de présents aux enfants d’un orphelinat.
Le choc est d’autant plus rude au retour en France quand elle apprend que sa grand-mère a été conduite à l’hôpital mourante. L’aïeule a un dernier souhait, qu’elle demande à Driss et Lila de réaliser…
Nous découvrons dans « Le Rôle de ma vie » ; le huitième volume des aventure de Lila, comment l’énergique adolescente continue d’assumer un corps qui n’a pas fini de se transformer en assumant ses désirs et des plaisirs solitaires. Aborder les affres de la puberté avec légèreté, humour et pédagogie, sans être ni graveleux ni niais, n’est pas chose aisée. C’est pourtant la gageure que tiennent Séverine de La Croix et Emily Dal Zovo, sa nouvelle dessinatrice, dans la série « Lila ». Elles modernisent et dynamisent l’approche en bande dessinée de l’adolescence des jeunes filles, et c’est très bien.
Le scénario est intelligent, délicat, toujours juste. Il part du journal intime de la pétillante Lila, procédé commun avec l’excellente série « Les Carnets de Cerise », pour introduire des séquences amusées de bandes dessinées sur la vie de Lila et de ses proches, mais aussi des fiches didactiques dans un langage accessible pour les plus jeunes sur des sujets variés : « Les Cosmonautes et les règles », ou « À la découverte de son intimité ». Avec une formation de psychologue et de sexologue, Séverine de La Croix sait dédramatiser les sujets délicats que doivent surmonter les jeunes filles lors de la puberté avec des mots simples et une grande justesse dans les termes choisis.
Emily Dal Zovo reprend dans cet album le trait rond, expressif parfois jusqu’à la caricature de Pauline Roland. « Lila T8 : le rôle de ma vie » est une bande dessinée qui sait rester drôle et légère tout en apportant des réponses sérieuses aux questions les plus intimes que se posent les jeunes filles quand elles quittent le monde de l’enfance pour celui encore mystérieux de l’adolescence qui mène à l’âge adulte. Nous ne pouvons que conseiller sa lecture à tous les membres de la famille, car elle aborde avec le mélange parfait d’humour et de sérieux des sujets qui embarrassent si souvent les parents. Ceci explique le succès de la série avec déjà plus de 100 000 exemplaires vendus.
Laurent LESSOUS (l@bd)Â
« Lila T8 : Le Rôle de ma vie » par Emily Dal Zovo et Séverine De La Croix
Éditions Delcourt (15,50 €) – EAN :  978-2-4130-4838-1
Parution 4 septembre 2024