Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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Les éditions Glénat viennent de publier le premier recueil des illustrations érotiques de Leone Frollo (1931–2018). Moins connu que certains de ses compatriotes dont le trait libertin a rencontré un grand succès (tels Manara, Crepax ou Serpieri), Leone Frollo a cependant acquis une belle réputation auprès des connaisseurs par son dessin sensuel, jamais vulgaire, tout en séduction. Vous pouvez le (re)découvrir à la lecture des 120 pages de « L’Art érotique de Leone Frollo ».
Né en 1931 à Venise, Leone Frollo s’est lancé dans la bande dessinée dès la sortie de ses études d’architecture avec un western : « Sur les grands lacs ».
Dans les années 1950-1960, il publie des récits aussi bien de western (comme « Melody John ») que de science-fiction (« Guerre aux invisibles »), des illustrations documentaires ou des albums relevant du genre épouvante  tel le remarqué « La Veuve noire ».
C’est dans les années 1970 que décolle un filon qui devient très populaire, celui des comics de poche soft-erotic. Il s’y fait remarquer par les 15 premiers volumes des aventures de Lucifera : brune diablesse du moyen-âge, envoyée spéciale des enfers sur Terre. Suivront plusieurs titres malicieusement érotiques.
Nous n’entendons pas ici être exhaustif pour sa riche bibliographie, signalons simplement que Leone Frollo est l’auteur des 26 premiers épisodes de « Blanche-Neige ». Sur des textes de Renzo Barbieri, puis de Rubino Ventura, une héroïne ingénue aux courbes plantureuses est persécutée par une libidineuse marâtre et abusée par des nains aux dépravations burlesques. Viendront ensuite d’autres héroïnes plus naïves ou dépravées dans diverses séries : de « Naga » (« Shatane » dans la version française publiée par Elvifrance), « Casino » ou « Mona Street ». Il abandonne progressivement la bande dessinée pour se consacrer à l’érotisme –  à partir des années 1980-1990 - avec des illustrations sur papier, à l’aquarelle, au crayon ou aux pastels.
Dans sa préface biographique élogieuse de huit pages, Claudio Dell’Orso résume ainsi la carrière et le style de celui qui fut surnommé Le Maître du Rialto : « Frollo, après avoir été photographe, devient réalisateur de cinéma puis dessinateur de bandes dessinées, et réalise dans les années de sa maturité des panoramas vénitiens à l’aquarelle. C’est durant ses années consacrées à la bande dessinée que son talent explose, exaltant des beautés sensuelles indémodables, effervescences romantiques nées d’une époque permissive plus que transgressive.
Étendues sur des canapés ou bien en équilibre sur des fauteuils liberty, ses « ensorceleuses » donnent souvent l’impression d’accorder pour la première fois aux regards leurs secrètes beautés. Plongées dans le frou-frou d’accueillants boudoirs, elles nous défient au milieu des dentelles, déshabillés de soie, coussins de velours, tentures entrouvertes, rendant ainsi quasi perceptibles les effluves de leur épiderme. Raffinement, imagination, recherche du sortilège érotique. Tel fut Leone Frollo, Maître du Rialto. »
Le présent ouvrage met en valeur sur 120 pages des illustrations érotiques, en grande partie inédites, du maitre vénitien. L’ouvrage se divise en quatre chapitres : « S’exhiber », « Fantasmes », « La Langue » et « Le Fouet ». Chacun est introduit par une citation d’un auteur classique : Apollinaire, Shakespeare, Li Yu et le Marquis de Sade.
Les illustrations sont présentées, sans commentaire ni date, dans un désordre apparent, si ce n’est qu’elles sont en adéquation avec l’un des quatre thèmes retenus.
Des dessins en noir et blanc succèdent à d’autres en couleurs. On passe d’une illustration pleine page à six miniatures élégamment distribuées sur la page suivante ou de crayonnés à de belles aquarelles. De quoi apprécier, sous toutes les coutures, des corps souples de femmes sans préjugés ou de femmes fatales proposant des jeux vertigineux.
Laurent LESSOUS (l@bd)Â
« L’Art érotique de Leone Frollo » T1 par Leone Frollo, préface de Claudio Dell’Orso
Éditions Glénat (32,00 €) – EAN :  978-2-3440-6540-2
Parution 21 août 2024