« La Tigresse bretonne » : l’histoire vraie de Jeanne de Belleville…

Aujourd’hui, les auteurs de bandes dessinées privilégient les récits contemporains, dont la documentation se limite, souvent, à des décors qui nous sont habituels. Ce n’est pas le cas de Roger Seiter et Frédéric Blier, lesquels optent pour une bande dessinée historique, réaliste, riche en décors, costumes et combats épiques. Ce one-shot passionnant évoque les grandes heures de la vie de la noble Jeanne de Belleville,devenue femme pirate, afin de venger la décapitation — sur ordre royal — de son noble époux. Baptisée la Tigresse bretonne, cette émule de Barbe-Rouge est considérée par les historiens comme la première femme pirate.

Paris, 1343. Bien que fidèle à la couronne de France, le riche baron breton Olivier de Clisson est accusé de trahison par le roi Philippe VI, le premier souverain de la branche capétienne des Valois. Il est décapité,malgré les efforts de son épouse Jeanne de Belleville pour le sauver, aidée par son fidèle écuyer Guillaume. Bien que mère de trois enfants, la jeune veuve décide de livrer une guerre sans merci au royaume de France et à son roi, prête à toutes les folies pour venger la mort de son époux. Plutôt que de combattre sur terre, faute d’effectifs suffisants, elle choisit de lutter sur mer au large de la Bretagne, à bord de deux navires corsaires et avec l’aide d’un équipage dévoué, auquel elle cède l’ensemble des butins. Jeanne et Guillaume — devenu son amant — affrontent pendant neuf mois, entre 1343 et 1344, les navires français, faisant preuve d’une cruauté sanglante et massacrant sans hésitation les équipages des vaisseaux capturés. Surnommée la Tigresse bretonne ou encore la Lionne sanglante, assoiffée de vengeance, Jeanne est désormais sans terres — ses biens ayant été confisqués par le roi — et ses enfants, privés d’héritage. Bannie du royaume de France, vêtue d’un haubert et d’une cotte de mailles, armée d’une épée, elle devient la première femme pirate de l’histoire. Finalement vaincue, Jeanne quittera la France pour l’Angleterre —soutenue qu’elle est par le roi Édouard III — en compagnie d’Olivier, son seul fils survivant : dernier héritier des Clisson-Belleville et futur connétable de France.

Roger Seiter signe un scénario documenté et vivant, aux dialogues ciselés, jamais ennuyeux, mais dont on peut regretter la fin qui ne dit rien sur la vie de Jeanne (morte en 1359) après son départ de France. Frédéric Blier ne ménage pas ses efforts, proposant des séquences aux décors richement documentés, sur terre comme sur mer : un régal pour les yeux. Après plusieurs albums aux thèmes proches ou contemporains, il se révèle un excellent dessinateur de scénarios historiques. Un atout précieux qu’il devrait faire fructifier.

Né le 5 mai 1955 à Strasbourg, Roger Seiter — après des études d’histoire — débute comme conseiller d’éducation. Il commence sa carrière de scénariste en 1989, avec la publication d’« Après un si long hiver »,avec Johannes Roussel, aux éditions Objectif bulles. Suivront (avec dans un premier temps la collaboration d’Isabelle Mercier, son épouse) « Fog », avec Cyril Bonin ; « Le Cœur de sang », avec Vincent Bailly ; « HMS », avec de nouveau Johannes Roussel ; « Dies Irae », avec Max (Maxime Thierry) ; « Les Histoires extraordinaires d’Edgar Poe » avec Jean-Louis Thouard ; « Spécial Branch » avec Hamo (Pierre-Yves Berhin)… En 2014, il entre chez Casterman, dans l’équipe des scénaristes des séries « Alix » et « Lefranc » créées par Jacques Martin.

Né à Lyon le 6 mai 1977, Frédéric Blier étudie le dessin à l’école Émile-Cohl de sa ville natale. Il aborde la bande dessinée en 2007 avec le diptyque « Amère patrie », écrit par Lax, pour la collection Aire libre. En 2014, il rejoint Grand Angle, en signant le quatrième volume de « La Lignée », écrit par Damien Marie. Il propose ensuite « La Parole du muet », avec Laurent Galandon, puis les biographies « Général Leclerc » et « Philippe Kieffer », avec l’historien Jean-Yves Le Naour, dans la série « Les Compagnons de la Libération ». C’est avec panache qu’il aborde la bande dessinée d’aventure avec le one-shot « La Tigresse bretonne ».

Henri FILIPPINI

« La Tigresse bretonne » par Frédéric Blier et Roger Seiter

Grand Angle (16,90 €) — ISBN : 978-2-8189-9065-0

Parution 21 août 2024

Galerie

Une réponse à « La Tigresse bretonne » : l’histoire vraie de Jeanne de Belleville…

  1. Zaza dit :

    Il y a de belles choses dans le dessin de ces planches. Malgré parfois des zones un peu plus « flottantes », comme dans la représentation de certaines perspectives, mais on s’en fout un peu. Beau travail.

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