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Toute la puissance horrifique du « Dracula » originel est dans la réinterprétation BD de Corrado Roi et Marco Cannavò !

22/04/2024
Par Gilles Ratier

Créé par l’écrivain irlandais Bram Stoker en 1897 — et inspiré par le personnage historique du comte Vlad III de Valachie, qui vécut au XV^e siècle —, « Dracula » s’apparente autant à un roman qu’à une étude ethnologique ou géographique : l’auteur décrivant pourtant la Transylvanie, sans jamais être allé dans cette région austro-hongroise, en se documentant uniquement dans des bibliothèques. En effectuant un retour aux origines du mal présentes dans l’œuvre originale, tout en s’inspirant librement, cette version — sous-titrée « L’Ordre du dragon » — est une somptueuse bande dessinée d’horreur coéditée par Glénat et Lo Scarabeo.

Piégé par le prince Vlad Dracula, le jeune clerc de notaire Jonathan Harker se retrouve emprisonné entre les murs lugubres de son cachot. C’est alors que Greta, la première épouse de ce prince sanguinaire qui l’a répudiée, décide de lui venir en aide. Elle lui apprend que Dracula est un vampire qui ne peut avoir plus de trois femmes et, qu’en ce moment, il navigue vers l’Angleterre afin de se marier avec sa nouvelle fiancée, Lucy, qui serait, d’après lui, à l’image de son unique amour mortel, trépassée depuis plus de quatre siècles. Décidé à assouvir sa soif de sang neuf dans la capitale britannique, Dracula a déjà pris plaisir à décimer tout l’équipage du bateau, regagnant ainsi une bonne partie de ses pouvoirs. Une impitoyable traque commence quand Jonathan va parvenir, à son tour, à rejoindre enfin Londres…

L’histoire de ce personnage emblématique est bien connue et le livre, dès sa parution, a eu un énorme succès, à tel point que de nombreuses adaptations cinématographiques et télévisuelles, plus ou moins fidèles, ont aussi été réalisées. On se souviendra, parmi tant d’autres de « Nosferatu le vampire » de Friedrich Wilhelm Murnau en 1922 ou du « Dracula » de Francis Ford Coppola, 70 ans plus tard. La première interprétation théâtrale, elle, a été mise en scène en 1924, et les conversions en bande dessinée ont, depuis, été également innombrables. (1)

Les éditions transalpines Lo Scarabeo ont donc proposé au scénariste italien Marco Cannavò (qui est l’auteur des textes de la suite de la série « Druuna ») (2) et au légendaire dessinateur Corrado Roi — l’un des meilleurs illustrateurs de « Dylan Dog » — (3) de s’approprier le mythe de Dracula. Cet artiste avait déjà représenté le célèbre vampire en 2017, pour la couverture d’une nouvelle version du roman chez Mondadori, et collaborait avec Lo Scarabeo depuis 2019 : sur la reprise d’une bande dessinée créée par Dino Battaglia (centrée sur le personnage de l’inspecteur Coke), puis en imageant un superbe jeu de tarot. Son dessin au lavis en noir et blanc, d’une grande beauté, est véritablement ensorcelant.

Quant à l’adaptation de Marco Cannavò, elle permet de redécouvrir le mythe originel : mettant en exergue sa substantifique moelle, tout en en développant une relecture originale et audacieuse.

Cet ouvrage, proposé d’abord en Italie en octobre 2022, fut très bien reçu par la critique et donna lieu à une deuxième bande dessinée inspirée des classiques de la littérature d’horreur, avec le même duo gagnant : « Frankenstein – Nel nome del padre », publié en septembre 2023. Espérons que Glénat en éditera également, et rapidement, une traduction française aussi réussie que celle-ci.

Gilles RATIER