« Affaires d’État » : trois décennies, trois dessinateurs, un scénariste !

Loin de l’exposition médiatique dont se repaissent certains auteurs, Philippe Richelle enrichit discrètement — avec une belle régularité — une carrière exemplaire. Après le succès des « Mystères de la République », dont les ventes dépassent les 300 000 exemplaires, il met un point final aux trois cycles d’« Affaires d’État » : un passionnant thriller politique dont l’ambition est d’évoquer les affaires politico-judiciaires qui ont secoué l’actualité des Trente Glorieuses. Une œuvre ambitieuse, réalisée avec la complicité de trois dessinateurs au meilleur de leur art.

Avec « Guerre froide », ce sont les années 1960 qui sont évoquées, au fil d’un récit dont l’action se situe entre la France et les États-Unis. Fred Ogier, un ancien agent du SDECE, est chargé d’identifier l’espion russe du KGB évoluant dans l’entourage du général de Gaulle. Les confidences de Trifonov — un transfuge soviétique — intriguent le policier, d’autant plus qu’une enquête concernant sa cible est menée aux États-Unis : le FBI recherche une taupe au sein de la CIA. Entre manipulations et trahisons, ce thriller politique — bien que de pure fiction — dévoile quelques secrets savoureux de la grande histoire. « Révélations » est justement le titre du quatrième et ultime volet de ce premier cycle, mettant un terme à une riche intrigue illustrée avec un grand souci historique par Régis Penet.

Né à Dieulefit dans la Drôme, le 9 septembre 1970, titulaire d’un diplôme d’histoire, Régis Penet apprend le dessin auprès de son grand-père. Il publie son premier album, « Fleurs carnivores », suivi par « Marie des loups », chez Soleil. Il adapte « Lorenzaccio », « Les Nuits écorchées » chez Daniel Maghen, signe « Koba » avec Jean Dufaux, adapte « Antigone », puis participe au concept « Roma » initié par Gilles Chaillet… C’est en 2021 qu’il commence sa collaboration avec Philippe Richelle sur « Affaires d’État ».

« Extrême Droite » revient sur la montée de l’extrême droite au cours des années 1970.

À la suite d’une fusillade dans un bar de Bayonne qui fait deux morts (un Basque espagnol et le patron d’une boîte de nuit), l’équipe du commissaire Robert Pommard enquête.

Ils remontent jusqu’aux membres d’un commando sanglant des GAL (Groupes antiterroristes de libération), chargé d’exécuter les anciens terroristes de l’ETA réfugiés en France.

Une taupe dissimulée au sein du groupe ne facilite pas le travail de Pommard et de ses hommes, chargés de protéger Manuel Larrosa, la prochaine cible du commando…

Pierre Wachs, né le 26 juillet 1957, étudie le dessin à l’École des arts décoratifs de Strasbourg. Après avoir illustré des livres pour enfants et travaillé pour la publicité, il publie « L’Avant-Garde du Rhin » en 1988, aux éditions du Signe. Début d’une fructueuse carrière dans la BD où il propose « Disparitions », puis « Marie Tempête », « Les Tentations de Navarre », « Le Saumon » avec Patrick Cothias, « Poème rouge » avec Joëlle Savey, « Opération vent printanier », « Les Guerriers de Dieu », « Secrets bancaires » avec Philippe Richelle, participe au « Triangle secret », puis à « L’Épopée de la franc-maçonnerie » avec Didier Convard. Enfin, à partir de 2013, il collabore aux « Mystères de la Troisième République », puis à « Affaires d’État ». Doté d’une grande puissance de travail, Pierre Wachs est à la tête d’une impressionnante production sans pour autant bâcler.

Avec les années 1980, le terrorisme islamique ensanglante Paris.

Informés par Anis Bouhageb, les services de renseignements de la DST sont persuadés que le Hezbollah — à la solde de l’Iran — est à l’origine de ces opérations qui sèment la terreur en France : c’est le sujet de « Jihad ».

Tout au long de son enquête, l’inspecteur Crémieux doit composer avec les intérêts économiques et les enjeux de la diplomatie.

Entre attentats à la voiture piégée, filatures discrètes, corruption dans les hautes sphères et enjeux politiques, la traque aux terroristes islamiques s’annonce compliquée.

Cet ultime album est riche en révélations sur les réseaux djihadistes du Hezbollah en France, au fil d’une intrigue passionnante.

Né en 1969 à Alessandria en Italie, Alfio Buscaglia publie ses premiers travaux chez divers éditeurs locaux,dont Sergio Bonelli Editore. Depuis 2003, il travaille en France pour plusieurs maisons d’édition : Delcourt, Bamboo, 12 Bis… et Glénat où il participe aux cinq volumes des « Mystères de la Quatrième République »,puis à « Affaires d’État ». Toujours avec Philippe Richelle, il dessine « Algérie, une affaire française ».

Tout au long de sa carrière, Philippe Richelle — né à Liège le premier juillet 1964 — a privilégié les fictions historiques se déroulant dans la seconde partie du XX^e siècle. Ayant appris le métier de dessinateur dès l’âge de 15 ans auprès de Didgé, il commence sa carrière dans Tintin, mais abandonne rapidement le dessin pour le scénario. Il excelle dans les thrillers politiques mêlant avec gourmandise réalité et fiction. Parmi ses séries emblématiques, notons « Donnington », « Belle comme la mort », « Les Coulisses du pouvoir », « Amours fragiles », « Secrets bancaires », « Les Guerriers de Dieu », « Algérie, une guerre française »…

Ces trois titres concluent les cycles (de quatre albums chacun) de la trilogie « Affaires d’État », revisitant les heures sombres de la France des années 1960, 1970 et 1980. Un exercice de haute voltige, mené de main de maître par trois duos d’auteurs passionnés et passionnants.

Henri FILIPPINI