Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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Edo Brenes, auteur de bande dessinée du Costa Rica, en tout cas son personnage Arturo, part avec sa compagne Ivannia découvrir Cuba. Au total, 380 pages lui permettent de brosser le portrait des habitants, plutôt que celui des touristes, à travers un récit choral très éclairant…
C’est par une famille de Cubains que commence le récit, en 2016 à La Havane, où parents et enfants font le point sur la situation économique et politique : Lucho, le fils et sa petite amie Marisa, épris de libertés, veulent quitter Cuba au grand dam des parents. Les amoureux Costa-Ricains vont précisément s’installer là , dans leur maison d’hôtes.
Alors que Lucho hésite à partir et que son amie tente de le décider, au point de se déchirer, arrivent les deux touristes qui découvrent la ville, ses beautés et ses difficultés, notamment la difficulté des connexions Internet ou des taux de change. Très vite, le paradoxe s’impose : les touristes souhaitent découvrir Cuba et les Cubains veulent en partir ! Le fils, Lucho, est très clair : entre le manque de libertés et les difficultés économiques cachées derrière les avantages médicaux notamment, le choix de fuir s’impose.
En plus de ces deux familles, l’auteur convoque d’autres personnages qui commentent, eux aussi, leur quotidien : notamment Tami et Corina qui souhaitent s’investir dans les visites guidées ou Omar, ex-avocat, qui explique comment il s’est fait renvoyer et souligne, après avoir fermé les fenêtres, qu’on peut le dénoncer s’il critique le régime ! Ils rêvent tous de rejoindre « La Yuma », mot cubain désignant l’étranger et plus particulièrement les États-Unis. La Floride et Miami sont tout proches, mais les garde-côtes américains ne laissent guère passer les volontaires à l’exil.
On peut rappeler, qu’en 2018, Davy Mourier avait signé chez Delcourt un petit volume (« Davy Mourier vs Cuba ») où l’auteur se représentait en voyageur qui n’aime pas voyager. S’il va à Cuba cette année-là , en 2017, c’est pour accompagner sa mère, pour lui faire plaisir (d’autant que c’est elle qui paie !). Alors Davy, contraint et forcé, découvre Cuba et se sent très mal dans ce pays où tout manque (pour obtenir quoi que ce soit : essence, électricité, wifi… tout devient parcours du combattant), mais surtout la liberté.
Cerise sur le gâteau, voilà qu’on annonce un ouragan ! Un gros, un exceptionnel ! Dès lors, c’est Irma qui va marquer définitivement le séjour de Davy Mourier. Ces conditions climatiques justifient amplement le nombre de pages que l’auteur leur consacre car avant, pendant et après, tout bascule, notamment la durée du séjour car l’aéroport a quelques problèmes…  Dans ce petit volume, textes illustrés, dessins d’humour, photos, l’emportent sur la narration BD proprement dite, le tout traité – commenté – de façon très critique.
Didier QUELLA-GUYOTÂ ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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« Touristes à la Havane » par Edo Brenes
Éditions Steinkis (29 €) – EAN : 9782368467541
Parution 21 septembre 2023
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