Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...L’imposant retour de Tintin…
Pour fêter, les 77 ans de ses éditions cette année, Le Lombard — qui publia l’hebdomadaire Tintin pendant 42 ans et poursuit l’exploitation, notamment en albums, de nombreuses mythiques séries qui y furent créées — propose de célébrer autant le passé que le présent et le futur avec divers événements et publications, en commençant par le retour du journal Tintin pour un numéro unique de 400 pages, en collaboration avec les éditions Moulinsart : historique et panégyrique, ce mook circonstanciel n’a d’autre but que de commémorer un périodique créé en 1946 par Raymond Leblanc (le responsable du Lombard) et par Hergé (le créateur du célèbre reporter à la houppette), lequel a marqué durablement le paysage du 9e art. Pas moins de 80 auteurs et autrices se sont joints à la fête pour réinterpréter ou ressusciter les héros de leurs enfances !
Mais pourquoi donc mettre en avant le fait que la revue Tintin et les éditions Le Lombard ont aujourd’hui 77 ans ? Tout simplement parce que, pendant des années, le slogan du magazine a été « l’hebdomadaire pour les jeunes de 7 à 77 ans » et que l’accroche est restée.
Peu de gens doivent encore s’en souvenir, mais l’inventeur de ce bon mot s’appelait Karel Van Milleghem et était le rédacteur en chef de la version flamande de Tintin (Kuifje). Engagé dès le début de l’aventure par Raymond Leblanc — qui appréciait beaucoup cet homme dynamique ayant toujours une nouvelle idée en tête —, celui qui utilisait parfois le pseudonyme de Johan De Brabander (pour créditer ses textes dans la revue) est devenu de plus en plus influent au sein du Lombard, étant considéré comme une sorte d’adjoint du grand patron.
C’est donc lui qui va poser les bases de la fameuse formule à l’occasion d’un numéro spécial Pâques de 1947, en suggérant d’abord « l’hebdomadaire pour les garçons de 7 à 77 ans ».
Il s’inspirait d’une définition assez voisine qui avait déjà été employée pour mettre en valeur les albums de Tintin par le secrétaire d’Hergé Marcel Dehaye : d’après ce dernier, ces livres étaient destinés aux enfants de 6 à 66 ans. Trois ans plus tard, dès le 11 septembre 1950, « l’hebdomadaire pour les jeunes de 7 à 77 ans » s’affichera sur tous les numéros du journal, sous le titre Tintin.
Même s’il est toujours bon de rappeler les origines des célébrations, cela ne nous empêche pas de saluer cette fort louable initiative festive du Lombard, en avançant que cet ouvrage — aussi imposant que prestigieux — est, sans nul doute, l’événement éditorial de la rentrée 2023 : il sera disponible dans sa version brochée (couverture orange) dès le 8 septembre, tandis qu’une édition cartonnée (couverture bleue) sortira en librairies en novembre.
Pour fêter dignement ces 77 années d’aventures et de héros, la direction du Lombard a donc demandé au gratin de leurs auteurs du moment de donner, dans diverses histoires courtes, leur vision de leur personnage préféré du journal : celui qui les a le plus marqués parmi tous ceux qui ont fait et feront encore rêver toutes les générations…
Toutefois, comme le précise Gauthier Van Meerbeeck (le responsable actuel du Lombard) dans son édito : « Mais l’histoire du journal est longue. Tous ceux et celles qui l’ont lu ont leur propre période bénie, leurs héroïnes et leurs héros favoris. Car ce numéro spécial est imparfait, forcément. Il pèche surtout par ce qui manque. Il était impossible d’être exhaustif et d’aucuns regretteront l’absence de personnages qu’ils ont aimés. Notre plongée dans la nostalgie s’accompagne de quelques regrets… »
Ainsi une belle double page finale nous rappelle toutes les séries importantes oubliées (ou qui, plutôt, n’ont pas eu les faveurs des artistes pressentis), dont certaines ont quand même eu leur heure de gloire :
on pense surtout à « Barelli » ou « Cori le moussaillon » de Bob De Moor, « Bruce J. Hawker » ou « Howard Flynn » de William Vance, « Chic Bill » de Tibet, « Jari » ou « Vincent Larcher » de Raymond Reding, « Chevalier Ardent » de François Craenhals, « Les Franval » d’Édouard Aidans, « Lefranc » de Jacques Martin, « Martin Milan » de Christian Godard, « Mr Magellan » de Géri, « Rataplan » ou « Strapontin » de Berck, « Taka Takata » de Jo-El Azara…
Pour ce faire, il aurait fallu que ce projet, déjà pharaonique, puisse alors comporter 777 pages, et non pas seulement 400 !
D’autant plus que quelques héros apparaissent plusieurs fois ! En effet, étant donné que certains auteurs ont également jeté leur dévolu sur des séries que d’autres avaient réservées avant eux… il était difficile de leur refuser le privilège de donner eux aussi leur version !
Tant pis, ça sera peut-être pour une autre occasion… Alors, ne boudons pas notre plaisir de découvrir tant de vraiment belles interprétations et résurrections, oscillant entre nostalgie, humour, aventure et émotions.
Outre celles qui ont déjà été plus ou moins dévoilées ici ou là (« Alix » par Robin Recht, « Bernard Prince » par Philippe Xavier et Matz, « Blake et Mortimer » par Lewis Trondheim ou par Simon van Liemt et Yann, « Bob et Bobette » par Alain Henriet, « Bob Morane » par Dimitri Armand, « Clifton » par Philippe Foerster, « Jugurtha » par Franck Biancarelli et Nathalie Sergeef, « Modeste et Pompon » par Nob ou par François Boucq — que l’on retrouve aussi sur « Ric Hochet », « Thorgal » et « Bernard Prince » —, « La Tribu terrible » par Fabcaro…), nous avons eu un petit faible pour celles d’« Adler » par Romain Renard, « Buddy Longway » par Mobidic et Fabien Vehlmann, « Le Chevalier blanc » par Mateo Guerrero et Tristan Roulot, « Corentin » par Christophe Simon, « Julie, Claire, Cécile » par Bastien Vivès, « Olivier Rameau » par Olivier Grenson, « Pom et Teddy » par Quentin Zuttion, « Robin Dubois » par Benoît Feroumont, « Rork » ou « Simon du Fleuve » par Clarke, « La Saga du grizzli » par Alain Ayroles ou l’histoire de 17 pages qui met en scène Bernard Prince, Bruno Brazil, Tounga et Les Panthères (créations du scénariste Greg), vus par Hamo et Benoît Dellac sur scénario de Zidrou et Falzar… et bien d’autres encore !
Signalons aussi que certains piliers du magazine comme Crisse (sur « Nahomi »), Derib (sur « Buddy Longway »), Cosey (sur « Jonathan ») ou Hermann (sur « Comanche ») revisitent — souvent avec malice, recul et émotion — le destin de leur propre progéniture de papier : les aficionados apprécieront !
Enfin, quelques plaisants et érudits rédactionnels complètent ce sommaire varié et éclectique : ainsi, Daniel Couvreur nous démontre que l’œuvre d’Hergé continue toujours de nourrir l’imaginaire et de sublimer la créativité́ artistique, Jérôme Dupuis survole efficacement l’histoire patrimoniale du journal Tintin, Anne-Claire Norot nous liste avec délectation — et de façon quasi exhaustive — la longue épopée des autrices et des héroïnes dans l’hebdomadaire, et Julien Bisson nous parle de la multiplicité des genres narratifs de cette revue qui nous manque tant.
Évidemment, comme il en faut pour tous les goûts dans tout bon collectif qui se respecte, le lecteur appréciera ou pas certaines versions, en fonction de ses inclinations personnelles ou de son degré d’implication, d’intérêt ou de nostalgie… Quoi qu’il en soit, il serait vraiment dommage que vous ne soyez pas au rendez-vous de cet événement unique, qui va, assurément, toucher tellement de générations à la fois !
Gilles RATIER
Tintin : numéro spécial 77 ans version brochée 400 pages en couleurs
Éditions Moulinsart/Le Lombard (29,90 €) — en kiosques et en librairies (EAN 978828082210218)
Parution 8 septembre 2023
Tintin : numéro spécial 77 ans version cartonnée 400 pages en couleurs
Éditions Moulinsart/Le Lombard (39,90 €) — en librairies (EAN 9782808212748)
Parution novembre 2023
Dans les annonces de début d’année, il y avait deux reprises de Martin Milan, dont une avec même un visuel, par Hautière et Fourquemin et par Dellac.
Il y a eu un problème avec Godard ?…
Bonjour Marcel !
Nous n’avons eu aucune information à ce sujet, désolé…
Bien cordialement
La rédaction
Rien que de savoir qu’il y a Foerster présent suffit à me motiver pour acheter cette affaire!
J’avais posé la question à l’auteur début juillet voilà la Réponse que m’avait faite Christian Godard il y a quelques semaines « Mes séries n’y figurent pas parce que je n’avais pas été consulté pour une reprise « hommage » qui se préparait sans mon accord, et je n’ai pas validé cette idée… »
Merci Joël pour cette information…
Bien cordialement
La rédaction