Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Terres d’exclusions et terres d’accueil…
L’histoire est faite de déplacements de populations contraints et forcés. Il y a heureusement des pays qui accueillent tant bien que mal et d’autres, malheureusement, qui éjectent, voire éliminent des peuples qu’ils se mettent à détester pour de folles raisons politico-religieuses. L’intolérance mégalomaniaque est à l’œuvre quand certains « responsables » entendent purifier leurs empires. C’est ce qu’évoquent deux albums parus aux éditions Petit à petit : « Terres d’accueil » et « Une histoire du génocide des Arméniens »…
Sous-titré « Deux familles, deux parcours, un espoir », l’album « Terres d’accueil » fait alterner deux « échappées », deux destins. D’un côté, Nahba et Hija, originaires de Damas, en Syrie, où la guerre fait rage. De l’autre, Demba et Djibril, qui vivent à Labé, en Guinée, dans une misère extrême. Chaque trajectoire est découpée en séquences semblables : la décision de partir, les difficultés rencontrées au fil des transits, l’arrivée aux portes de l’Europe, le séjour dans des camps, enfin l’accompagnement reçu sans le pays d’accueil pour permettre à ces déshérités de s’installer, de s’intégrer, et avec cela, l’espoir enfin récompensé pour eux de commencer une vie meilleure.
Comme « Terres d’accueil » est un Docu-BD (c’est le nom de la collection), outre une introduction sur l’histoire des migrations récentes en Europe, chaque étape de chaque parcours est complétée de pages documentaires et les points abordés sont nombreux : le droit d’asile, le problème des visas, l’attente en transit, l’agence Frontex, les démarches administratives, les sauvetages en mer, l’enfer de Calais… et bien d’autres sujets. Autant dire qu’il s’agit là d’un ouvrage extrêmement complet, clair et parfaitement documenté et, qui plus est, joliment dessiné par deux auteurs différents, Valette et Samuel Figuière, très efficaces.
Avec « Une histoire du génocide des Arméniens », l’enjeu est encore plus dramatique puisqu’il s’agit d’y raconter le drame perpétré par l’empire ottoman d’avril 1915 à juillet 1923.Dans le récit fiction fondé sur de nombreux épisodes authentiques, tout commence à 1915, à Dendil, où réside la famille Hagopian.
Les populations turques et arméniennes vivent alors en bonne entente.Mais, alors que la guerre fait rage en Europe, un plan d’extermination des Arméniens est mis en place par le gouvernement… Arakel, le père, est fusillé tandis que sa femme Vartouhie et sa fille Anouche sont déportées. Mikael, le fils, est condamné à vivre reclus chez un Turc qui l’accueille. Il s’y cachera déguisé en fille pendant trois ans…
Comme l’explique l’éditeur, cet album est utile parce que le génocide arménien est encore trop souvent nié ; même dans un pays qui en a reconnu officiellement l’existence, le nôtre, en 2001. L’album se termine par des faits historiques plus récents : la guerre du Karabagh et le drame des Yézidis persécutés sur les lieux même de la déportation des Arméniens…
Didier QUELLA-GUYOTÂ ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
[L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook.
« Terres d’accueil » par Valette, Samuel Figuière et Emmanuel Marie
Éditions Petit à petit (19,90 €) – EAN : 9782380461404
Parution 28 septembre 2022
« Une histoire du génocide des Arméniens » par Kyungeun Park, Gorune Aprikian et Jean-Blaise Djian
Éditions Petit à petit (19,90 €) – EAN : 9782380461121
Parution 28 septembre 2022