Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« China Li » : une jeune femme au cœur de la révolution chinoise…
Passionnés par la grande Histoire, Maryse et Jean-François Charles invitent leurs lecteurs à partager leur soif de la découverte. À travers le personnage attachant de la jeune Li, ils évoquent l’histoire de la Chine du XXe siècle, alors que Mao commence sa longue marche : une série passionnante, comme on les aime, mêlant l’Histoire et la fiction. Elle est prévue en quatre albums, dont le troisième vient de sortir. Un travail d’orfèvre, précis, documenté, et surtout jamais ennuyeux.
Dans les années 1920, la pauvre paysanne Li est vendue à Zhang Xi Shun par son frère aîné qui a perdu au jeu. Le mystérieux Zhang est un eunuque : chef d’une puissante mafia qui contrôle le trafic de l’opium à Shanghai. Homme cruel, mais raffiné, il éduque la jeune adolescente et finit par l’adopter. Craignant l’invasion japonaise, il l’envoie à Paris où elle étudie la photographie et tombe amoureuse d’un jeune peintre. Devenue mère, sans nouvelle de son père adoptif, elle revient en Chine en qualité de reporter-photographe. Elle retrouve Zhang réfugié dans un monastère, et lui promet de faire revenir ses attributs — conservés dans un bocal — au cÅ“ur de la Cité interdite. Vêtue de l’uniforme d’une révolutionnaire, dont la casquette à l’étoile rouge du parti communiste, elle rêve de photographier Mao qu’elle admire. Tout en suivant « La Longue Marche » de Li, on apprend le passé douloureux de Zhang. Sa mère, la passionnée de calligraphie Reflets de Lune est régulièrement violentée, sous ses yeux, par son père le riche mandarin Hio-Chu. L’homme finit par vendre son fils, fragile, qui vient d’avoir dix ans. Désespérée, sa mère se pend. L’enfant est castré au cÅ“ur de la Cité interdite, destiné aux besognes humiliantes. Au fil du temps, l’adolescent dont l’ambition égale l’intelligence parvient à éliminer les sociétés secrètes et à créer la sienne : La Bande verte. De son côté, Li rencontre Mao avant de suivre les rescapés de La Longue Marche… Au fil d’une intrigue parfaitement maîtrisée, on s’attache à la frêle héroïne, mais aussi au destin tragique de l’énigmatique monsieur Zhang : mafieux implacable, mais aussi bienfaiteur de Li. Â
Après le Canada des « Pionniers du Nouveau Monde », l’Inde d’« India Dreams », l’Afrique d’« Africa Dreams », le couple Maryse et Jean-François Charles invite leurs lecteurs à revivre l’épopée chinoise du début du XXe siècle. Une solide documentation leur permet de faire voyager leurs personnages dans des décors soignés, tout en respectant la chronologie historique. Une fois encore, Jean-François Charles propose 64 pages d’une incroyable richesse dont il assure la mise en couleurs chaude et lumineuse. Voilà une bande dessinée classique (1), au scénario crédible, signée par deux auteurs méticuleux qui ne cherchent pas à gagner du temps en simplifiant leur trait pour compenser les pertes de revenus causées par un marché difficile. Et ça à l’air de payer !
« China Li T3 : La Fille de l’eunuque » par Jean-François Charles et Maryse Charles
Éditions Casterman (15,50 €) — EAN : 978 2 2032 1864 2
Parution 20 octobre 2021
 (1) Voir aussi les chroniques des tomes précédents ici « China Li T1 : Shanghai » par Jean-François Charles et Maryse Charles et ici « China Li » : bien plus que les tribulations d’une Chinoise en Nouvelle Chine….