Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Entre services chinois et CIA, des vacances mouvementées pour Lady S…
Après un épisode éprouvant, séquestrée lors du détournement d’un drone sous-marin (dans « Code Vampiir »), Shania entame un séjour en Indonésie. Il ne sera pas de tout repos ! L’album rejoint l’actualité, en mettant en scène services chinois et américains dans une histoire d’espionnage et d’action prenante : Shania-Lady S dans la gueule du Tigre !
Shania Rivkas/Lady S, en vacances à Java avec sa tante atteinte d’Alzheimer, en profite pour revoir une ancienne connaissance : Doug Adams, devenu consul sur l’île.
Hébergée pour une nuit, elle surprend une conversation entre lui et son assistante Wong, sur des échanges de données : une liste d’agents chinois (du Guoanbu) collaborant avec la CIA.
Il est prévu qu’Adams reçoive une somme d’argent lors de l’échange avec un agent chinois appelé le Tigre.
Très troublée, elle décide de voler la boîte du disque dur contenant cette liste.
Elle alerte son compagnon Conrad, à même de contrecarrer l’opération.
Sans le savoir, Adams délivre une boîte sans le disque, lequel a été mis en lieu sûr par Shania.
Une course s’engage pour cet objet, entre le Tigre et la CIA qui redoute sa diffusion, avec Shania au milieu.
Elle est inculpée de meurtre et emprisonnée.
Ses collègues de la CIA vont tout faire pour la récupérer.
Dans ce nouveau tome, l’auteur se sert du toujours utile Mac Guffin, cet outil d’intrigue de cinéma (cher à Hitchcock), de polars ou de BD : un objet au centre de l’histoire, que les protagonistes doivent retrouver/protéger/voler/supprimer/monnayer.
Son intérêt réel est donc symbolique, mais sert de ressort, de carburant à l’histoire…
Il y aura donc — n’en doutons pas — une course de vitesse, de l’action et des retournements avec cette série.
Mais ici, Aymond fait une part un peu plus importante à l’intime, aux rapports humains (avec la tante, ainsi que Conrad, Doug Adams), d’où des scènes de dialogue et d’intérieur plus nombreuses, notamment en début d’album.
Ensuite, l’action démarre avec les personnages qui se démènent, coups tordus des services secrets, et suspense.
L’auteur nous fait voyager dans un autre pays lointain, aux beaux paysages et à l’ambiance peu connus du public.
Comme à son habitude, l’auteur maîtrise son intrigue, et la met en scène de façon efficace, en bonne série B à lire avec plaisir.
On note un trait et une mise en place toujours sûrs, équilibrés, lisibles, ce qui n’est pas nouveau, mais aussi un encrage plus ombré, plus marqué.
En clin d’œil, certains reconnaîtront peut-être un chroniqueur de BDzoom.com, parmi le duo d’agents de la CIA essayant de suivre et récupérer Shania et le disque. Une histoire de ces clins d’œil et utilisations, finalement très fréquents en BD, reste encore à faire et réserverait bien des surprises…
En bonus, l’auteur nous a fait le cadeau de plusieurs planches en versions successives : crayonné, encrage, ce qui fait bien ressortir tout ce travail minutieux.
Un album agréable, d’un auteur qui se partage maintenant avec « Les Nouvelles Aventures de Bruno Brazil » et avec une « Lady S » non plus annuelle, mais à faire évoluer différemment. Apprécions donc bien ce tome 15.
Patrick BOUSTER
« Lady S T15 : Dans la gueule du Tigre » par Philippe Aymond
Éditions Dupuis (12,50 €) — EAN : 979-1034757305
Bien dommage que les albums de « Lady S » ne soient plus annuels, justement !
Oui, mais on peut se consoler en pensant qu’il reste toujours aussi productif. Il y aura donc un Aymond chaque année, par ex. un Bruno Brazil ou un autre album…