Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Nostalgie haute en couleur avec « Comet Girl » !
Il y a clairement une faille spatio-temporelle chez Casterman. Voilà qu’ils éditent un manga des années 1980 réalisé par une autrice qui n’était, pourtant, même pas née à cette époque. « Comet Girl » touche à notre fibre nostalgique, celle d’un temps où l’animation japonaise commençait juste à régner en maître sur les programmes jeunesse de la télévision française.
Comet Girl, c’est Mina : une jeune fille née d’une comète. Elle parcourt l’univers sur sa moto, alors qu’elle est pourchassée par tous les pirates de l’espace qui veulent capturer son énergie incommensurable. Au détour d’une de ses courses poursuites, elle rencontre Sazan : un jeune ouvrier terrien qui opère dans l’espace. Celui-ci vient de louper sa dernière correspondance entre les planètes et est coincé dans un arrêt galactique au beau milieu de nulle part. Elle se propose donc de le ramener chez lui, sur Terre. C’était sans compter sur la présence d’une bande de pirates, avec un cochon à sa tête qui entend bien capturer cette fille comète. Mais celle-ci ne va pas se laisser faire et, avec un flegme certain, va se sortir de ce mauvais pas. Sazan, subjugué, va tout faire pour la revoir. Ainsi commence la belle histoire de ce couple atypique et de leurs aventures mouvementées.
« Comet Girl » est un manga atypique, et dès les premières pages, plusieurs choses nous sautent aux yeux : il est entièrement en couleurs et son dessin semble un tantinet désuet. Pourtant, ce n’est pas une réédition d’un succès d’il y a 40 ans, c’est un manga fraîchement réalisé par une jeune autrice qui n’était même pas née à cette époque qui pourtant semble la fasciner. Inspiré de la dynamique et le design des séries des années 1980, « Comet Girl » emprunt son univers à tous ces space operas qui ont commencé à se développer, notamment ceux de Sunrise : « Mobile Suit Gundam » et surtout « Dirty Pair ». Ces deux séries ayant comme point commun d’avoir des personnages créés par Yoshikazu Yasuhiko. Que ce soit sur la physionomie des personnages, comme sur la gamme de couleurs utilisée, l’influence est indéniable et clairement assumée. On y retrouve également la touche d’une autre star de l’époque : Akemi Takada qui a officié sur de nombreuses séries cultes des années 1980 : « Patlabor », « Lamu », « Creamy » ou encore « Orange Road ».
L’hommage ne s’arrête pas qu’au dessin, il y a une certaine naïveté dans l’histoire qui nous renvoie dans un passé où tout semblait plus simple et ne nécessitait pas d’explication scientifique poussée pour être crédible. Un peu comme la série « One Piece », aujourd’hui, qui mise tout sur l’humour et l’exagération des faits à tel point qu’ils deviennent naturels. Dans « Comet Girl », on ne s’étonne pas de voir un cochon qui parle, une combinaison d’air enveloppante issue d’une simple pilule, une moto de l’espace et surtout une jeune héroïne se baladant en bikini.
Est-il nécessaire d’avoir une grande connaissance des séries d’animation et mangas d’il y a 40 ans pour apprécier « Comet Girl » ? Bien sûr que non, la série offre peu de référence directe à cette période. C’est plus une sensation et un graphisme caractéristique qu’une suite de clin d’œil accessible uniquement aux initiés. C’est comme si vous écoutiez du Daft Punk sans jamais avoir entendu du Chic. L’aventure ici présentée se suffit à elle-même et son intrigue est prenante avec ses personnages charismatiques. On s’attache immédiatement aux deux héros (Mina et Sazan) : leur candeur et leur détermination portent le récit. Durant un peu plus de 500 pages, le lecteur passe par toute la palette d’émotions imaginable. On est émerveillé devant l’immensité de l’espace et la beauté des paysages, effrayés quand Mina est capturée, triste quand un personnage meurt, ou joyeux quand Mina arrive à facilement échappé a ses poursuivants.
L’histoire étant complète en seulement deux volumes, les éditions Casterman ont eu la bonne idée de les publier en même temps. Avec ses personnages attachants, ce manga peut être lu par un très large public. Il plaira aux enfants qui découvriront un univers spatial chatoyant ainsi qu’aux adultes qui y verront forcément un petit côté nostalgique satisfaisant.
Gwenaël JACQUET
« Comet Girl » T1&2 par Yuriko Akase
Éditions Casterman (11,95 €) – EAN : 9782203208704