Beau démarrage pour les Visions du futur avec « Aiôn » !

En demandant à une nouvelle génération d’auteurs de bandes dessinées à quoi pourrait bien ressembler demain, les éditions Dargaud ont mis en chantier une nouvelle collection de science-fiction qui laisse toute latitude pour imaginer des visions de ce futur qui reste à inventer. Visions du futur en est justement le titre et le premier opus, « Aiôn » de Ludovic Rio, est une excellente surprise : un peu dans la lignée des « Valérian et Laureline » ou « Aldébaran », titres phares du genre anticipation en BD qui sont déjà au catalogue de cet éditeur !

Les boucles temporelles répétitives sont au cœur de cette espèce de huis clos de l’espace, où une voyageuse de la galaxie va sortir d’hibernation, contrainte d’interrompre son périple à mi-parcours, car son cargo spatial intercepte un message de détresse. Le signal provient d’une colonie scientifique qui étudie certaines particularités de l’espace-temps et qui est située sur la petite planète d’Aiôn, proche du vaisseau. Or, le protocole prévoit que, dans ce cas-là, l’équipage doit lui porter secours. Ayant rejoint le centre de recherche, l’androïde chargé de veiller sur cette station, visiblement à l’abandon, explique à la jeune femme que le dernier résident est mort, il y a de ça huit mois. Enfermée et endormie de force, elle se retrouve pourtant, à son réveil, en face de ce physicien qu’elle venait de voir réduit à l’état de cadavre squelettique, tout à fait vivant… Ce que notre bourlingueuse de l’espace croyait être une simple mission de sauvetage va l’entraîner au cœur d’une expérience particulièrement déstabilisante, dont elle deviendra elle-même le cobaye.

Il faut bien reconnaître que ce paradoxe temporel est parfaitement maîtrisé, tant sur le plan narratif que graphique, par l’Amiénois Ludovic Rio, formé à l’école de la bande dessinée indépendante et expérimentale des éditions Polystyrènes qu’il a cofondé avec cinq autres illustrateurs et au reportage en BD sur le site local Le Télescope d’Amiens. 

Ici, le style adopté est pourtant très classique : entre ligne claire et manga. Tout à fait dans l’air du temps, ce parti pris sobre et soigné devrait séduire aisément les lecteurs ados, même s’il n’y a aucun combat galactique, cité futuriste ou monstre effrayant : seulement trois personnages (deux humains et une intelligence artificielle) pour les tenir en haleine avec cette subtile évocation des responsabilités scientifiques, en pas moins de 130 pages en couleurs. 

Voilà qui inaugure plutôt bien cette nouvelle collection, au format presque carré — situé entre celui des comics et ceux des romans graphiques —, qui est appelée à se décliner, dans des genres tous différents, en cinq autres albums, que l’on espère aussi prometteurs, d’ici la fin de l’année : « L’Humain » des Argentins Lucas Varela et Diego Agrimbau (à paraître en août), « Univers ! » d’Albert Monteys (en septembre), « Mécanique céleste » de Merwan et « Tremen » de Pim Bos  (en septembre), puis « Soon » de Benjamin Adam  et Thomas Cadène (en octobre).

Gilles RATIER

« Aiôn » par Ludovic Rio

Éditions Dargaud (16,95 €) – ISBN : 978-2-205-07936-4

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